Le second Comité trimestriel de Pilotage (CP2) du Programme Stratégique Initial (PSI)de l’association PRoduits d’Excellence d’une FIlière de plantes MEDIcinales en Mauritanie (PREFIMEDIM) s’est réuni, le 12 Juillet 2017, au siège de l’organisation. Un objectif simple : faire le point sur l’état d’avancement dudit PSI, financé, pour quatre ans (2017-2021) par l’Union Européenne (1).Les participants ont ainsi patiemment écouté les rapporteurs des quatre premiers sites d’intervention visités, depuis le démarrage de l’action, le 1er Avril : Samba Kandji et OuldYengé (Guidimakha), MaataMoulana (Trarza), Maghama (Gorgol). Ils ont également suivi le rapport financier et celui du plaidoyer institutionnel auprès des pouvoirs publics et des partenaires au développement. En somme, il s’agissait de dresser le premier bilan trimestriel du projet, rappeler les différentes tâches des uns et des autres, déterminer le calendrier des actions et missions à venir et signer, enfin, les documents financiers pour le trimestre suivant. Les exposés des rapporteurs ont été suivis de séances « questions-réponses » et de débats divers.
Les deux premiers sites cités – Samba Kandji et MaataMoulana – sont, a priori, les locomotives des autres. Samba Kandji, en ce que ce village soninké est une pièce maîtresse d’une des Associations de Gestion Locale Communautaire (AGLC) les plus dynamiques du Programme de Gestion des Ressources Naturelles (ProGRN) de la GIZ, depuis 2001 ; le second, en ce qu’il a abrité, de 2001 à 2014, le premier jardin expérimental de plantes médicinales, avec l’appui intermittent du GEF-SGP (PNUD). Ce sont ces deux localités que la PREFIMEDIM a choisi d’équiper, au cours du premier trimestre de l’action, en locaux et matériels divers, avant d’y implanter deux centres de formations techniques, courant Octobre, et d’y lancer plusieurs programmes sociaux, en direction des écoles, coopératives féminines de maraîchage, centres de santé et groupements pastoraux, le tout sous la conduite de comités locaux de pilotage, chacun sous incubation, durant deux ans, d’une ONG de développement bien au fait des réalités locales.
C’est quoi, c’est qui, l’association PREFIMEDIM ?
Fondée à Nouakchott, en 2007, avec l’appui de l’OMS et de la GIZ, la PREFIMEDIM a pour objectif de construire une filière nationale de plantes médicinales de qualité certifiée en Mauritanie. Il s’agit d’en organiser tous les acteurs, des producteurs/cueilleurs à la commercialisation, au niveau local et national, voire international ; en passant par la communauté scientifique ; dans un souci constamment entretenu de lutte contre la pauvreté et de gestion durable de l’environnement. Organisation de la Société Civile (OSC) mauritanienne, la PREFIMEDIM n’en promeut pas moins l’action concertée avec les pouvoirs publics et le secteur privé, avec l’appui des Partenaires Techniques et Financiers (PTF). Une table-filière centrée sur la SC, en somme. Une centration marquée, dans le PSI, par la participation de treize OSC à sa mise en œuvre : Terre Vivante, chargé de la promotion des jeunes et des femmes ; ADID, ADIG, J3M et ECODEV (2), dans l’incubation de l’autonomie des OSC localisées ; UCME et URBDD, unités mauritaniennes de recherche scientifique ; Plantes et Nomades, association française d’appui technique ; APHARM, ATM et ONDV, associations de professionnels mauritaniens des secteurs de la santé humaine et/ou animale ; AMSE, pour le suivi-évaluation, et Hadina RIM-TIC, pour le côté technologique de l’information.
Plus concrètement, la PREFIMEDIM entend contribuer à améliorer, durablement, la situation de la biodiversité phytomédicinale et les conditions de vie des populations rurales vulnérables, avant celles des professionnels et institutionnels de la santé et de l’environnement ; en bref, aider à la bonne santé écologique, économique et sociale de notre pays, par une résilience accrue aux effets du changement climatique. En mettant en place une synergie, permanente, entre tous ces acteurs, l’association espère structurer une filière de données diversifiées et suivies sur les Plantes Médicinales (PM), les recherches fondamentale et de terrain, les productions permanentes et les récoltes saisonnières contrôlées, finement adaptées aux potentiels du biotope et du marché, en quantité bien étudiée et qualité certifiée et homologuée ;toutes actions coordonnées, entre le local et le global, la Société civile (SC), l’Etat et le Secteur Privé (SP), jusqu’à former ladite table-filière où tous les intervenants travaillent de concert.
Un ancien concept actualisé
L’action repose donc sur la coopération communautaire, dans un équilibre, assuré, entre les activités non-lucratives (notamment dans la protection de l’environnement) et les activités lucratives (notamment dans l’exploitation de celui-ci) ; au plan local comme au plan national, via des structures autonomes, pleinement responsables et outillées. Ainsi est née l’idée d’associer, au financement des activités non-lucratives de la filière, des structures à but lucratif qui leur soient statutairement liées. On s’est appuyé, à cette fin, sur un concept très développé dans le monde musulman : le waqf ou Immobilisation Pérenne de la Propriété (IPP) dont on n’a retenu, strictement ici, que l’aspect économique. Le principe consacre le droit du propriétaire d’un quelconque bien à retirer, de manière définitive, celui-ci du marché, afin de consacrer les fruits de sa gestion à une œuvre d’utilité publique. Avec ces règles, importantissimes, que tout rajout, de quelque nature soit-il, au capital immobilisé, en suit systématiquement le statut et qu’interdite de décroissance, la valeur de celui-là soit toujours, au minimum, conservée, en son dernier état déclaré.
Au cours du premier semestre du PSI, des terrains (un tiers à un hectare) sont ainsi placé en IPP, par leur propriétaire respectif (particulier, coopérative, village, Etat…), en chaque site retenu et à Nouakchott ; puis équipés en bâtiments techniques et administratifs, de façon à devenir producteurs de plus-values financières. Une association locale est chargée d’en assurer la gestion et reçoit, en retour, les bénéfices nets de l’IPP, sous la surveillance d’un Conseil d’Administration (CA) regroupant : le propriétaire du fonds ou son représentant (un siège) ; le représentant du(des) bailleur(s) de ses équipements et autres rajouts (un siège) ; et trois représentants de l’OSC bénéficiaire (dont le gérant de l’IPP, nécessairement membre de l’OSC, au moins le temps de sa fonction). Les décisions du CA sont prises à la majorité simple (1)mais une minorité de 2/5 suffit à imposer un audit dont les décisions doivent être suivies à la lettre, par la majorité, sous peine de se voir retirer la gestion et le bénéfice de l‘entreprise. L’idée est de préserver l’autonomie d’action de l’OSC, tout en assurant une gestion saine et transparente de l’IPP.
En brousse, ces IPP ont essentiellement fonctions de traitement, conditionnement, (éventuellement, transformation) et expédition des PM à Nouakchott où une autre IPP abrite le Centre de Commercialisation Communautaire de Plantes et produits Médicinaux (3CPM). Un tiers des ventes brutes permet, à celui-ci, d’assurer son fonctionnement et de verser des dividendes trimestriels à la PREFIMEDIM, pour la pérennité de ses œuvres. Quant aux deux tiers retournant en brousse, l’un va à l’IPP local, pour ses propres frais de fonctionnement et ses engagements statutaires envers l’association locale concernée ; l’autre, aux producteurs-cueilleurs.
Appropriation du PSI par les populations ?
La mise en place et, surtout, la pérennisation d’un tel projet nécessitent une adhésion conséquente des populations locales. Huit programmes sociaux ont été ainsi élaborés et accompagnent, dans les différents sites d’interventions, la mise en œuvre de leur IPP respectif. Programme technique, en direction de l’équipe gestionnaire de l’IPP ; programme agrobio, en direction des coopératives féminines de maraîchage ; programme pédagogique, en direction des élèves des établissements primaireet secondaire d’enseignement ; programme santé-PM, en direction des postes de santé ; programme PM-vétérinaire, vers les éleveurs de bétail ; programme Répertoire et Redéploiement de la Biodiversité Médicinale en Mauritanie (2RB2M), avec l’appui de toutes les forces vives locales ; programme Visibilité locale, avec un club de jeunes de chaque localité ; le tout couronné, en fin d’action, par l’étude communautaire d’un premier Plan STratégiquesur 5 ans(PST5-1), avec toutes les représentations locales de l’Etat, qui sera présenté aux bailleurs, à Nouakchott, au final de la grande Quinzaine de Com qui clôturera l’action.
Au cours du second trimestre de celle-ci, trois nouveaux sites – Laazib (Gorgol), Eguenni Aradana (Assaba), Sarandogou (Brakna) – ont été visités par des missions préliminaires, leurs populations sensibilisées, leur IPP délimité et officialisé devant les autorités, leur association locale qui en sera gestionnaire et bénéficiaire identifiée (ou fondée). Deux responsables – un technique et un administratif – pour chaque IPP s’apprête à rejoindre, le 7 Octobre, la première formation organisée à Maata Moulana, avant celle programmée, à la fin de ce même mois, à Samba Kandji. A Maata Moulana, on s’apprête à lancer, avec la rentrée des classes, les programmes sociaux susdits… L’Union Européenne, premier partenaire du PSI, en finance 52%, soit 499 525 € sur 960 725, répartis sur les quatre années du projet. Mais les cofinancements tardent, en cette année 2017 où les PTF peinent à finaliser leurs accords, avec le gouvernement mauritanien, notamment en ce qui concerne l’UNDAF et la SCAPP. Des incertitudes administratives susceptibles d’entraver, voire annihiler, l’élan si prometteur de la PREFIMEDIM ? Ses promoteurs et ses bénéficiaires attendent des réponses…
Dossier réuni par Dalay Lam
Notes
(1) : Pour plus de détails, voir www.prefimedim.com
(2) : ECODEV est également chargé de l’irrigation/électrification de tous les sites par voie solaire.
(2) : à l’exception de toute modification de l’acte fondamental de l’IPP, strictement soumise à la règle de l’unanimité (5/5).