A Monsieur Antonio Guterres
Secrétaire Général des Nations Unies
New York
Objet : Acharnement du gouvernement contre le mouvement syndical en Mauritanie
Monsieur le Secrétaire Général
Dans la perspective de votre éventuelle rencontre avec le président de la République Islamique de Mauritanie en marge de la 72ème session de l’AGN, nous souhaitons porter à votre connaissance des cas d’atteinte particulièrement graves à la liberté syndicale commis par le gouvernement mauritanien.
Ces atteintes, portées à l’encontre des droits humains dont est victime notre centrale syndicale : Confédération Générale des Travailleurs de Mauritanie (CGTM) et par ricochet le mouvement syndical ouvrier de notre pays violent de façon notoire les dispositions des instruments internationaux auxquels la Mauritanie a souscrit et notamment la Charte de l’ONU, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et les conventions de l’OIT.
Au cours des derniers mois, plusieurs violations visiblement délibérées des droits syndicaux perpétrées par le gouvernement ont été enregistrées parmi lesquelles on peut citer à titre d’exemple :
- La récente interpellation du Secrétaire général de la CGTM par la police chargée des crimes économiques suivie de sa mise sous contrôle judiciaire pour motifs fallacieux ;
- L’atteinte de l’inviolabilité du siège. Des éléments de la police ont pénétré dans le siège de notre centrale syndicale au moment où le comité exécutif s’apprêtait à tenir sa réunion hebdomadaire ordinaire. Tous les membres du syndicat ont été contraints manu militari de quitter le siège qui a été mis sous scellé sous prétexte que le propriétaire du siège n’a pas payé la taxe d’habitation ;
- Le laxisme dans l’application de la législation du travail et de la sécurité sociale en vigueur dans le pays ;
- La lenteur préoccupante et injustifiée du processus de détermination de syndicats, les plus représentatifs, processus engagé depuis maintenant quatre ans, avec toutes les conséquences qui en découlent et notamment la contestation de la légitimité des accords collectifs ;
- L’adoption d’une circulaire émanant de la direction générale du travail ayant pour objet d’instaurer un moratoire suspendant la tenue sur toute l’étendue du territoire national, d’élection des délégués du personnel ainsi que le gel de la mise en place des structures syndicales pour le motif que le gouvernement veut procéder à des élections professionnelles générales de représentativité. Cette circulaire qui se situe tout en bas de la hiérarchie des normes et qui n’a en principe pas de valeur réglementaire, outre le fait qu’elle a porté une atteinte grave au droit de la négociation collective, elle a provoqué un bouleversement dans l’ordre des normes dans l’ordre juridique en suspendant de facto l’application des dispositions contenues dans le code du travail qui est une loi votée par le Parlement d’où la gravité de cette mesure.
Il va sans dire que l’ONU qui s’est déclarée résolue à proclamer la foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et le respect des obligations nées des traités et autres sources du droit international et à favoriser le progrès social et d’instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande est préoccupée par ces graves violations des droits de l’homme.
Fidèle aux principes dans le préambule de sa charte en vertu desquels les peuples des Nations Unies déclarent faire recours aux institutions internationales pour favoriser le progrès économique et social de tous les peuples, l’organisation des Nations Unies est appelée à agir le plus rapidement possible pour que le gouvernement de la Mauritanie honore ses obligations au titre des textes internationaux précités.
Nous vous prions de recevoir, Monsieur le Secrétaire Général, l’expression de notre haute considération.
Abdallahi Ould Mohamed Dit Nahah