On annonce, depuis des mois, un dialogue, entre le pouvoir et les forces vives de la Nation (Société civile, syndicats, partis politiques). Peinant à démarrer, il serait probablement lancé sans la participation de l’opposition qualifiée, à tort ou à raison, de « radicale ». Des tractations sont en cours. A priori, ledit dialogue, tant souhaité par les Mauritaniens, a pour objectifs de traiter des problèmes qui obèrent le développement du pays. Mais beaucoup s’interrogent sur les résultats qu’on pourrait attendre des « conciliabules » préliminaires qui s’acheminent vers leur fin. De fait, les attentes sont nombreuses et leur satisfaction reste une préoccupation majeure des citoyens. Certes, lister ces attentes peut paraître fastidieux. C’est pourtant un impératif, tant il est vrai qu’il faille établir une grille d’évaluation apte à juger des résultats attendus et à donner une note – positive ou négative – à l’action. Et ces attentes ne sont autres que les actes et décisions qui renforcent la démocratie, assoient l’Etat de droit, dans toute sa splendeur, et contribuent au bien-être social, économique et culturel des populations. Bien entendu, ces attentes doivent transcender le simple formalisme des textes, pour épouser les courbes de la réalité quotidienne : les notions d’égalité, de justice, d’équité et de développement resteront creuses, si le peuple n’en voit pas le bénéfice, dans les faits, dès le court terme. Ces attentes, c’est, d’abord, le raffermissement du sentiment d’appartenir à une seule nation, la culture de l’élan patriotique qui doit sommeiller en tout un chacun, le concours de tous au façonnement d’un pays réellement indépendant. Ces attentes, c’est que ce dialogue, inclusif et ouvert, permette d’aborder, sans tabou ni langue de bois, les sujets d’importance capitale : l’unité nationale ternie par des passifs non encore définitivement soldés ; le respect des lois et règles de la République, notamment la Constitution, en particulier en ce qui concerne ses dispositions intangibles : les libertés fondamentales, la durée et le nombre de mandats présidentiels ; la problématique de l’esclavage et de ses séquelles, sujet polémique qui doit être pris à bras-le-corps, sans surenchère ni désinvolture ; la lutte contre l’extrémisme (qu’il soit religieux ou autre) ; la justice dont l’indépendance est sujette à caution et qui souffre de plusieurs autres maux : lenteur, difficulté d’exécution des décisions, manque de spécialisation, corruption… ; l’Administration et l’Armée qui restent politisées, jouant ainsi une mauvaise partition, dans un domaine qui n’est pas le leur ; l’inadaptation d’un système éducatif dont les multiples réformes n’ont, à ce jour, apporté aucune solution adéquate. Ce système, qui manque d’uniformité, contribue à la division des citoyens : par la langue (arabe/français) et par le statut : écoles privées, pour les riches, et école publique, pour les pauvres… Les attentes, c’est, aussi : l’instauration d’un cadre approprié de discussion et de dialogue interne, permettant d’échanger sur les questions de relation et de cohabitation communautaire ; le respect de la séparation des pouvoirs ; l’utilisation rationnelle des ressources du pays au service de son développement ; la bonne gouvernance ; l’application stricte de la sanction et de la récompense ; le respect scrupuleux des traités et conventions auxquels la Mauritanie a souscrits, notamment ceux relatifs aux droits des femmes et des enfants, aux droits sociaux, économiques et culturels, aux droits de l’homme, de manière générale ; l’assainissement du climat politique ; la répartition équitable de la richesse ; la prise en compte de la Société civile qui doit être perçue comme un partenaire associé à l’animation et à la vie de la Nation, puisqu’étant, ici comme ailleurs, une sentinelle des droits et de la démocratie… Pour une feuille de route consensuelle Ces attentes, c’est, aussi et surtout, que les uns et les autres (dialoguistes ou non) – quelles que soient leurs divergences – mettent leurs griefs de côté, quand il s’agit de l’unité nationale et la cohésion du tissu social du pays. En un mot, les attentes, c’est, qu’à l’issue du dialogue, une feuille de route consensuelle soit établie, pour fixer les bases d’une démocratie apaisée, d’un climat social serein et d’une coexistence pacifique. Oui, cette Mauritanie nouvelle qu’on veut bâtir passe, nécessairement, par l’instauration d’un dialogue ouvert, inclusif et élargi à toutes les familles politiques, dans le respect de l’opinion et des choix de chacun. Oui, les protagonistes doivent être mus par l’idéal de mettre, honnêtement, leurs idées novatrices, utiles et positives, en commun ; ainsi que leur volonté de bien faire au service du pays où les rapports entre les citoyens ne seraient pas conditionnés par l’idolâtrie du plus faible envers le plus fort, ni par la condescendance du plus fort à l’égard du plus faible. Il s’agit, en fait, de préserver la Nation de l’appel des mauvaises sirènes. Cela suppose une rupture, décisive, avec l’étroitesse d’esprit et le chauvinisme. Cela suppose, surtout, l’ouverture d’esprit, la tolérance, l’acceptation de l’Autre, avec, en vue prioritaire, la solution aux problèmes cruciaux que connaît le pays. Pour y arriver, le dialogue attendu doit s’appliquer à un changement qui requiert stabilité. Non pas une stabilité réduite à la seule absence de troubles et de coups d’Etat mais, plutôt, une stabilité où adultes et enfants sont en bonne santé, instruits et pourvus d’eau potable, d’électricité, de nourriture en abondance ; où l’homme, respecté, est vêtu et bien logé, dans un Etat de droit garant du devenir de tous et de tout un chacun. Mais, au rythme où vont les choses, on se demande si ces attentes peuvent être satisfaites. Il est permis d’en douter fortement. D’abord, parce que la suspicion que nourrissent les acteurs politiques les uns envers les autres rend la confiance difficile, surtout quand on sait combien l’opposition s’est, tant de fois, sentie roulée dans la farine. Ensuite, parce qu’aller au dialogue, sans avoir convaincu l’opposition dite « radicale » à y participer, constitue, en soi, un problème. A cet égard, il est légitime de reprocher, à l’opposition « boycottiste », de n’avoir pas accepté de s’engager, étant entendu qu’il importe, pour défendre avec efficacité ses positions, d’être d’abord sur place et nulle part ailleurs : l’adage « Les absents ont toujours tort » est vrai et se vérifie bien souvent. Pour avoir privilégié la politique de la chaise vide, les « boycottistes » ont ouvert un boulevard au pouvoir qu’ils disent combattre ; et rien ne dit qu’à la longue, cette stratégie soit payante : de l’ordre de la politique-fiction, elle ne porte préjudice, en grande partie ici, qu’à ses propres initiateurs… Sans citer tous les partis de cette opposition à l’actuel type de dialogue, ni présumer de leur force, il est permis de penser qu’un dialogue sans le RFD, Tawassoul, l’UFP… aura de la peine à trouver un consensus fort, sur les problèmes (en tout cas, politiques) de l’heure. Ne dit-on pas que c’est avec ses principaux adversaires qu’on négocie ? Sans compter que des dossiers aussi saillants et brûlants que la probable suppression du Sénat, le maintien du BAtaillon de la SEcurité Présidentielle (BASEP), le problème de la CENI et du processus électoral, en général, ne sauraient être discutés – a fortiori, faire l’unanimité – qu’avec la participation des principau
On annonce, depuis des mois, un dialogue, entre le pouvoir et les forces vives de la Nation (Société civile, syndicats, partis politiques). Peinant à démarrer, il serait probablement lancé sans la participation de l’opposition qualifiée, à tort ou à raison, de « radicale ». Des tractations sont en cours. A priori, ledit dialogue, tant souhaité par les Mauritaniens, a pour objectifs de traiter des problèmes qui obèrent le développement du pays. Mais beaucoup s’interrogent sur les résultats qu’on pourrait attendre des « conciliabules » préliminaires qui s’acheminent vers leur fin. De fait, les attentes sont nombreuses et leur satisfaction reste une préoccupation majeure des citoyens.
Certes, lister ces attentes peut paraître fastidieux. C’est pourtant un impératif, tant il est vrai qu’il faille établir une grille d’évaluation apte à juger des résultats attendus et à donner une note – positive ou négative – à l’action. Et ces attentes ne sont autres que les actes et décisions qui renforcent la démocratie, assoient l’Etat de droit, dans toute sa splendeur, et contribuent au bien-être social, économique et culturel des populations. Bien entendu, ces attentes doivent transcender le simple formalisme des textes, pour épouser les courbes de la réalité quotidienne : les notions d’égalité, de justice, d’équité et de développement resteront creuses, si le peuple n’en voit pas le bénéfice, dans les faits, dès le court terme.
Ces attentes, c’est, d’abord, le raffermissement du sentiment d’appartenir à une seule nation, la culture de l’élan patriotique qui doit sommeiller en tout un chacun, le concours de tous au façonnement d’un pays réellement indépendant. Ces attentes, c’est que ce dialogue, inclusif et ouvert, permette d’aborder, sans tabou ni langue de bois, les sujets d’importance capitale : l’unité nationale ternie par des passifs non encore définitivement soldés ; le respect des lois et règles de la République, notamment la Constitution, en particulier en ce qui concerne ses dispositions intangibles : les libertés fondamentales, la durée et le nombre de mandats présidentiels ; la problématique de l’esclavage et de ses séquelles, sujet polémique qui doit être pris à bras-le-corps, sans surenchère ni désinvolture ; la lutte contre l’extrémisme (qu’il soit religieux ou autre) ; la justice dont l’indépendance est sujette à caution et qui souffre de plusieurs autres maux : lenteur, difficulté d’exécution des décisions, manque de spécialisation, corruption… ; l’Administration et l’Armée qui restent politisées, jouant ainsi une mauvaise partition, dans un domaine qui n’est pas le leur ; l’inadaptation d’un système éducatif dont les multiples réformes n’ont, à ce jour, apporté aucune solution adéquate. Ce système, qui manque d’uniformité, contribue à la division des citoyens : par la langue (arabe/français) et par le statut : écoles privées, pour les riches, et école publique, pour les pauvres…
Les attentes, c’est, aussi : l’instauration d’un cadre approprié de discussion et de dialogue interne, permettant d’échanger sur les questions de relation et de cohabitation communautaire ; le respect de la séparation des pouvoirs ; l’utilisation rationnelle des ressources du pays au service de son développement ; la bonne gouvernance ; l’application stricte de la sanction et de la récompense ; le respect scrupuleux des traités et conventions auxquels la Mauritanie a souscrits, notamment ceux relatifs aux droits des femmes et des enfants, aux droits sociaux, économiques et culturels, aux droits de l’homme, de manière générale ; l’assainissement du climat politique ; la répartition équitable de la richesse ; la prise en compte de la Société civile qui doit être perçue comme un partenaire associé à l’animation et à la vie de la Nation, puisqu’étant, ici comme ailleurs, une sentinelle des droits et de la démocratie…
Pour une feuille de route consensuelle
Ces attentes, c’est, aussi et surtout, que les uns et les autres (dialoguistes ou non) – quelles que soient leurs divergences – mettent leurs griefs de côté, quand il s’agit de l’unité nationale et la cohésion du tissu social du pays. En un mot, les attentes, c’est, qu’à l’issue du dialogue, une feuille de route consensuelle soit établie, pour fixer les bases d’une démocratie apaisée, d’un climat social serein et d’une coexistence pacifique.
Oui, cette Mauritanie nouvelle qu’on veut bâtir passe, nécessairement, par l’instauration d’un dialogue ouvert, inclusif et élargi à toutes les familles politiques, dans le respect de l’opinion et des choix de chacun. Oui, les protagonistes doivent être mus par l’idéal de mettre, honnêtement, leurs idées novatrices, utiles et positives, en commun ; ainsi que leur volonté de bien faire au service du pays où les rapports entre les citoyens ne seraient pas conditionnés par l’idolâtrie du plus faible envers le plus fort, ni par la condescendance du plus fort à l’égard du plus faible. Il s’agit, en fait, de préserver la Nation de l’appel des mauvaises sirènes. Cela suppose une rupture, décisive, avec l’étroitesse d’esprit et le chauvinisme. Cela suppose, surtout, l’ouverture d’esprit, la tolérance, l’acceptation de l’Autre, avec, en vue prioritaire, la solution aux problèmes cruciaux que connaît le pays.
Pour y arriver, le dialogue attendu doit s’appliquer à un changement qui requiert stabilité. Non pas une stabilité réduite à la seule absence de troubles et de coups d’Etat mais, plutôt, une stabilité où adultes et enfants sont en bonne santé, instruits et pourvus d’eau potable, d’électricité, de nourriture en abondance ; où l’homme, respecté, est vêtu et bien logé, dans un Etat de droit garant du devenir de tous et de tout un chacun. Mais, au rythme où vont les choses, on se demande si ces attentes peuvent être satisfaites. Il est permis d’en douter fortement. D’abord, parce que la suspicion que nourrissent les acteurs politiques les uns envers les autres rend la confiance difficile, surtout quand on sait combien l’opposition s’est, tant de fois, sentie roulée dans la farine. Ensuite, parce qu’aller au dialogue, sans avoir convaincu l’opposition dite « radicale » à y participer, constitue, en soi, un problème.
A cet égard, il est légitime de reprocher, à l’opposition « boycottiste », de n’avoir pas accepté de s’engager, étant entendu qu’il importe, pour défendre avec efficacité ses positions, d’être d’abord sur place et nulle part ailleurs : l’adage « Les absents ont toujours tort » est vrai et se vérifie bien souvent. Pour avoir privilégié la politique de la chaise vide, les « boycottistes » ont ouvert un boulevard au pouvoir qu’ils disent combattre ; et rien ne dit qu’à la longue, cette stratégie soit payante : de l’ordre de la politique-fiction, elle ne porte préjudice, en grande partie ici, qu’à ses propres initiateurs…
Sans citer tous les partis de cette opposition à l’actuel type de dialogue, ni présumer de leur force, il est permis de penser qu’un dialogue sans le RFD, Tawassoul, l’UFP… aura de la peine à trouver un consensus fort, sur les problèmes (en tout cas, politiques) de l’heure. Ne dit-on pas que c’est avec ses principaux adversaires qu’on négocie ? Sans compter que des dossiers aussi saillants et brûlants que la probable suppression du Sénat, le maintien du BAtaillon de la SEcurité Présidentielle (BASEP), le problème de la CENI et du processus électoral, en général, ne sauraient être discutés – a fortiori, faire l’unanimité – qu’avec la participation des principaux partis politiques, rangés, hélas, aujourd’hui, dans le camp du boycott.
Le fondement premier du dialogue étant d’aplanir les problèmes auxquels fait face la Mauritanie et de sortir des crises, tant politique, économique que sociale, l’idéal serait, en conséquence, que tous les acteurs concernés y participent. Sans cela, le risque est grand de voir ce dialogue n’aboutir à aucun résultat probant.
Maître Mine ould Abdoullah
Avocat à la Cour
Professeur à l’Université
Président de la LMDH
Président de la C.M. PCQVP
x partis politiques, rangés, hélas, aujourd’hui, dans le camp du boycott. Le fondement premier du dialogue étant d’aplanir les problèmes auxquels fait face la Mauritanie et de sortir des crises, tant politique, économique que sociale, l’idéal serait, en conséquence, que tous les acteurs concernés y participent. Sans cela, le risque est grand de voir ce dialogue n’aboutir à aucun résultat probant. Maître Mine ould Abdoullah Avocat à la Cour Professeur à l’Université Président de la LMDH Président de la C.M. PCQVP