La semaine prochaine, notre pays, pour la première fois de son histoire, sera l'hôte du sommet de la Ligue arabe. De nombreux dirigeants arabes y sont attendus. A cette occasion, nous, au sein de l'Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste (IRA), souhaitons la bienvenue à nos hôtes arabes et leur souhaitons un très bon séjour et un sommet réussi dans leur second pays, la Mauritanie.
Nous voudrions aussi, à cette occasion, attirer l'attention de nos illustres hôtes sur ce que vit notre peuple en termes d'injustice et de marginalisation sur des critères raciaux et de clan particulièrement caractérisés.
En Mauritanie, notre cher pays, se pratique encore l'esclavage sous ses formes les plus archaïques et les plus traditionnelles. Pire, l'esclavage s'y pratique au nom de notre sainte religion, au mépris manifeste du caractère foncièrement égalitaire et libératoire que revêt l'Islam. Au moment où la plupart des pays arabes ont aboli avec courage et volontarisme cette tare qu'est l'esclavage, les autorités mauritaniennes continuent à le couver et à le perpétuer par une politique de déni systématique et de fuite en avant en maintenant dans la misère et la marginalisation la communauté musulmane des Hratine aux origines négro-africaines et à la culture arabe.
En Mauritanie, l'esclavage a été criminalisé, pour la première fois, en 2007 par une loi que notre parlement avait votée à une très large majorité. Mais cette loi est restée lettre morte. Le déni de l'existence de l'esclavage, pratiqué par le gouvernement, donne aux fonctionnaires chargés d'appliquer la loi (juges, administrateurs, officiers de police judiciaire, juge d'instruction...) un parfait alibi pour classer sans suite les dossiers de cas d'esclavage que notre organisation (IRA) et SOS-esclaves déposent devant la justice. Au lieu d'appliquer la loi criminalisant l'esclavage en inquiétant les criminels qui la bafouent, ce sont, bien souvent, les défenseurs des droits de l'homme qui sont jetés en prison sans autre forme de procès.
Nous venons de sortir des prisons mauritaniennes il y a moins de deux mois après y avoir séjourné presque deux années sans raison avouable autres que notre appel à l'application de la loi criminalisant l'esclavage et les pratiques esclavagistes. Aujourd'hui, alors que vous vous apprêtez à vous réunir à Nouakchott, 13 membres de notre organisation croupissent en prison pour des raisons fallacieuses et complètement infondées.
A cette occasion et en conformité avec la volonté qui est la nôtre d'œuvrer dans le sens de l'apaisement et la réconciliation, nous tenons à attirer l'attention de nos frères et hôtes arabes sur la nécessité de demander des comptes à l'Etat mauritanien et de le sommer à renoncer à faire perdurer des pratiques honteuses qui défigure notre sainte religion et se heurte aux traités et conventions que notre pays a souverainement ratifiés. Nous sommes persuadés que de grands pays arabes jouissant d'une notoriété internationale reconnue ne pourraient passer sous silence cette injustice caractérisée que pratique l'Etat mauritanien. Cette question de l'esclavage est une bombe à retardement dont l'explosion est programmée pour souffler les fondements de la Mauritanie mais elle constitue aussi une tache indélébile qui éclabousse et défigure notre religion à tous.
Nous exhortons les dirigeants arabes réunis en sommet à Nouakchott d'exercer toutes les pressions utiles sur le gouvernement mauritanien pour l'amener à libérer les prisonniers d'opinion membres d'IRA et d'autres organisations de défense des droits humains. Pour qu'ils amènent l'Etat mauritanien à permettre aux organisations de défense des droits de l'homme et des partis politiques, d'exercer leurs activités dans un cadre légal en conformité avec les exigences de la modernité. La persistance de l'esclavage en Mauritanie est une ignominie qui poursuivra, s'ils ne cherchent pas à la contrer, tout Etat ou gouvernement, arabe ou musulmans, qui ne cherchera pas à la combattre.
Nous avons exprimé ces doléances à son excellence Salah Ahmed Sarhan, ambassadeur et président de la mission de la Ligue des pays arabes, à Washington. Qu'il soit chaleureusement remercié pour l'accueil et la qualité de l'écoute qu'il nous a réservés lors de notre dernière rencontre et ce malgré ces très nombreuses occupations.
New York le 24 Juillet 2016
1 - Le president :
Biram Dah Abeid / candidat aux elections presidentielles 2014 / prix des Nations unis pour les droits de l’homme 2013 / prix TIP Heros du département d’Etat Americain 2016 ….
2- Le vice president :
Brahim Bilal Ramdhane / prix TIP Heros du departement d’Etat Americain 2016