"Ces articles sont publiés dans le cadre d’un projet financé par le Programme de l’Union Européenne pour la Société Civile et la Culture pour la promotion de la protection de l’environnement"
Dans le cadre de l’accord signé entre le Gouvernement Mauritanien et l’Union européenne, le Programme de l’Union Européenne pour la Société Civile et la Culture (PESCC), a attribué une subvention à notre association Action Environnement pour réaliser le projet intitulé Projet de sensibilisation nationale au développement durable et à la protection de l’environnement
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Cinquième article de la série commandée, au journal « Le Calame », par l’association mauritanienne « Action Environnement ». Drainées vers et diffusées à partir du bassin collecteur de l’école, ainsi que nous en avons proposé, précédemment, le schéma, les données environnementales d’un lieu quelconque d’établissement humain génèrent des actions coordonnées dans le temps et l’espace. D’autres institutions entrent en scène, d’autres encore agissent en coulisses, parfois lointaines… mais, au mieux, toutes en symbiose.
Initiée à l’école, en et hors temps scolaire, mobilisant, tour à tour, jeunes et moins jeunes, l’attention à l’environnement se développe à la mosquée. Elle y prend une singulière profondeur, ré-enracinant la jama’a dans son milieu de vie. C’est une des grandes avancées de l’islam que d’avoir intimement lié responsabilité et nature, dans les liens de famille comme en ceux du voisinage, et il n’est pas exagéré de dire que la santé spirituelle d’une communauté se mesure au degré de propreté de son habitat, des concessions privées à la mosquée et vice-versa. De nos jours, certaines qotbas s’attachent à le rappeler. D’autres vont plus loin encore, signalant la continuité naturelle entre l’embellissement de la personne individuelle (ablutions, parfum, habits propres…) et celui de son environnement (assainissement, plantations d’espèces végétales florifères et odorantes, respect et entretien de l’ordre public…).
Motivée au plus profond de sa foi, la population s’organise. Nous avons évoqué, en d’autres publications (1), tout l’intérêt stratégique, du plus local au plus global, à soutenir la formation de structures spécifiques de la Société civile dédiées à la gestion du voisinage. Ordinairement financées, dans leurs activités courantes, par les revenus d’un waqf géré, comme on l’a précisé dans la publication ci-bas référencée, en concertation avec l’autorité publique (la commune) et un PTF, ces « solidarités de proximité » pourraient être également sollicitées dans le cadre de programmes plus ponctuels, relevant de structures plus centrales de l’Etat, comme le ministère de l’Environnement et du développement durable. L’idée, en tout cela, est d’utiliser au mieux le potentiel citoyen, conjointement au biotope, dans un rapport toujours « gagnant-gagnant ».
Là encore, des sessions de formation et d’informations peuvent être menées à l’école ; en temps scolaire, pour ce qui est de la mobilisation des élèves ; le weekend et, de manière plus générale, hors temps scolaire, en ce qui concerne les adultes. Collectrice de données d’étude, l’école le devient également de leurs résultats concrets... qui se transforment, immédiatement, en sujets d’étude : ainsi se met en place une boucle de suivi-évaluation, critiquable et critiquée, sur place et, via Internet, jusqu’au plus hautes instances de la complexité sociétale. Voici la moindre localité, le plus humble quartier devenu base fondamentale de la politique environnementale mondiale ; et, également, socio-économique, notons, en passant, cette potentialité qui rappelle l’indispensable triptyque « écologie-social-économie », fondateur du développement durable.
Les premiers informés des données et des actions glanées collectivement, en un lieu quelconque, sont, bien évidemment, ceux qui y vivent. Des initiatives individuelles apparaissent, spontanément, et le secteur privé local peut y trouver d’opportunes occasions de développement. Des compétitions d’intérêt s’initient, bientôt surgissent des conflits dont l’expérience n’a cessé de prouver qu’ils sont toujours au détriment de l’environnement, partenaire naturellement muet ; d’autant plus en sa défaveur, de surcroît, qu’il est un élément important des enjeux. Avant que le bâton ne se retourne contre le bastonneur : on ne tue pas impunément la poule aux œufs d’or… C’est donc bien en amont d’une telle triste issue que l’Etat doit intervenir, réguler, fixer des limites. Il le fera d’autant mieux qu’il a suivi, dès le début et très précisément, le processus d’exploitation du biotope.
Ce que l’on souligne, ici, c’est la primauté de l’action sur la règlementation. La meilleure conduite du troupeau, disait Tchouang-Tseu (2), est de se contenter de l’écarter de ce qui peut lui nuire. Une telle sage attitude distingue le pâturage au bord d’une falaise et celui en basse plaine, à proximité d’un champ de mil ou en plein Inchiri. A ceci près qu’il y a, tout de même, des nuances, entre conduire un troupeau de ruminants et une communauté d’humains. Aussi obnubilés ceux-ci soient-ils, par l’appât du gain, ils n’en soient pas moins dotés d’entendement et de parole. Bien avant que de penser répression, il faut donc cultiver le dialogue, l’information et la réflexion. De toute évidence, c’est au milieu du champ, entre les gens du cru, que le débat, permanent, doit s’installer. (A suivre).
Tawfiq Mansour
Note
(1) : Notamment : « Solidarités de proximité », une série publiée par Le Calame, disponible gratuitement, en format PDF, sur simple demande à mon adresse courrielle : [email protected].
(2) : in Tchouang-Tseu, « Œuvres complètes », Gallimard/UNESCO, Paris, 1969.