Le wali du Trarza, Mohamed Moustapha ould Mohamed Vall, a été dégagé de son poste, lors de la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le jeudi 31 Mars. Et aussitôt prié de passer service à son remplaçant, Saïdou Sall, quelques heures avant la tenue à Rosso, le 2 Avril, du meeting d’El Wiam dont nous avons relaté les péripéties dans notre précédente édition. Une précipitation laissant le parti de Boydiel ould Houmeïd soupçonner quelque « parti pris », dans la crise que vit le conseil municipal de Rosso.
De fait, celui-ci est bloqué, dans son fonctionnement, depuis près de deux ans. Pour cause, l’exclusion, par le bureau exécutif d’El Wiam, de deux conseillères élues, sur sa liste, en 2013, qui auraient été « débauchées », à en croire des sources dignes de foi, par le sénateur de Rosso. Décision donc logiquement consécutive à une « démission de fait », selon le parti de Boydiel, puisque ces dames ne participaient plus aux activités du parti et refusaient, surtout, de se plier à ses textes réglementaires. Elles devaient, donc, être remplacées, conformément à la législation en vigueur, depuis l’accord politique de 2011 bannissant le nomadisme politique. Certes, reconnaît El Wiam, les conseillères exclues peuvent poser le problème devant la Cour suprême, seule habilitée à statuer en la matière. Et de souligner que le parti a parfaitement informé les autorités administratives (wali, ministère de l’Intérieur, Primature) de toutes les procédures et décisions prises ; il a, même, sollicité l’arbitrage du gouvernement, pour le respect des textes régissant le fonctionnement des communes et ceux interdisant la transhumance...
Dans une correspondance N° 001, en date du 28 Janvier 2016, adressée au maire de la commune, le désormais ancien wali du Tarza contestait toute révocation, suspension ou remplacement de l'adjointe au maire et des conseillères municipales, par le maire de Rosso, qualifiant d’« illégal » le retrait ou la suspension de l’indemnité de la première adjointe, avant d’inviter le premier édile à « œuvrer pour le rétablissement d’un climat de cohésion », au sein du conseil municipal et d’éviter tout agissement illégal pouvant perturber le fonctionnement de l’institution. Le wali terminait son courrier en demandant, au maire, de « convoquer le conseil municipal, pour l’examen du budget 2016 ».
Le 8 Février, c’est directement au Premier ministre que le président d’El Wiam répondait, pour clarifier la situation, démontant, pièce par pièce, ladite correspondance du wali. Boydiel ould Houmeïd y expliquait, tout d’abord, que ce n’était pas le maire mais, bel et bien, le bureau exécutif du parti qui avait pris les décisions à l’encontre des conseillères, conformément à ses textes réglementaires et aux accords issus du dialogue politique de 2011. Un accord, soulignait-il, signé en présence du président de la République et des membres du corps diplomatique accrédités dans notre pays. « Certaines clauses de cet arrangement bannissent le nomadisme politique », rappelait le président d’El Wiam, reprochant, au wali, de n’avoir pas suivi fidèlement l’esprit de l’accord, pourtant très clair. « La représentation communale, élue à une écrasante majorité de Rossossois, ne peut être désavouée, au non d’une interprétation, douteuse, des textes régissant les rapports entre les dirigeants légitimes de la commune et l’autorité de tutelle ». Et le président Boydiel d’invoquer la loi organique 032-2012 du 12 Avril 2012, modifiant l’ordonnance 87-289 instituant les communes, en vertu de laquelle les conseillers municipaux sont élus, exclusivement, sur des listes présentées par des partis politiques. El Wiam s’est conformé à ces textes qui sont, d’ailleurs, déposés auprès des services du ministère de l’Intérieur.
Le président d’El Wiam accuse formellement le wali de « parti pris », quand il aborde le second point de sa correspondance relatif à la suspension d’indemnité de la première adjointe au maire. Boydiel Ould Houmeïd fait observer qu’en se référant aux articles 40, 44 et 45 de l’ordonnance 87-289, le wali omet, délibérément, d’ajouter l’article 46 qui stipule, tel que cité dans le guide de manuel de gestion des communes, en son article 123 : « Le maire peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer, par arrêté, une partie de ses fonctions à un ou plusieurs adjoints » ; et « Les délégations sont limitées à la durée du mandat du maire et peuvent être retirées à tout moment ». C’est justement ce qui s’est passé, fait remarquer le président d’El Wiam. Le maire a retiré sa confiance à sa première adjointe et l’a déléguée à un autre qui ne bénéficie pourtant pas, à ce jour, de sa légitime indemnité de fonction, à cause de la mauvaise volonté – ou de la complicité – du trésorier.
Abordant le troisième point de la lettre du wali, le président Boydiel s’est demandé si celui-ci ne s’était pas trompé de porte. Quel intérêt le maire aurait-il de diviser ou de miner la majorité pour laquelle il s’est durement battu et avec laquelle il remporta, haut la main, le scrutin ? Pour Boydiel ould Houmeïd, la réponse ne fait, évidemment, aucun doute : ceux qui s’évertuent à « déstabiliser et à diviser le conseil municipal dont El Wiam détient la majorité absolue, sont à rechercher ailleurs ». Et de prévenir : « les acteurs politiques qui s’opposent à la volonté populaire le paient toujours cher ».
Abordant enfin le dernier point de la lettre du wali, relatif à la convocation du conseil municipal pour statuer sur le budget 2016, le président d’El Wiam informe que le maire s’est bien acquitté de son devoir mais c’est plutôt la tutelle qui a reporté la session budgétaire 2016, « pour des raisons qu’ignore le premier magistrat de la ville ». Et le président Boydiel de renvoyer l’exécutif régional et sa tutelle à l’accord politique de 2011 et la loi prise pour son application : « Tout élu, sénateur, député, ou conseiller municipal qui démissionne de sa formation en cours de mandat (nomadisme) perd, automatiquement, son siège ; la procédure de son remplacement est immédiatement engagée ». Il n’est mentionné, nulle part, que cela se fasse par décision ou arrêté du ministère de l’Intérieur, signale Ould Houmeïd qui demande, au pouvoir et à son administration, de « laisser les partis politiques gérer leurs cadres et militants, conformément aux textes réglementaires ». Tout en restant attaché au dialogue et au consensus, le président d’El Wiam conclut : « Vous avez l’administration et les forces de l’ordre pour appliquer la décision que vous voulez, libre à vous. Mais à nous, aussi, de prendre la décision qui nous semble la plus adaptée à la situation ».
Sall Saïdou, le nouveau wali, rompu aux mécanismes de l’administration, pour en avoir gravi les échelons un à un (hakem, wali-adjoint, wali et directeur général des libertés publiques), semble à même de pacifier les relations entre la tutelle qu’il représente et la représentation des citoyens, à savoir le conseil municipal de Rosso… à moins que le gouvernement, voire de plus puissants, ne veuillent en découdre avec le parti de Boydiel ould Houmeïd.
DL