Durant ces dernières années, nous avons assisté au maintien et la nomination de certains officiers, en application de certaines dispositions statutaires modifiées dans la foulée, venues changer de manière cavalière des règles jusqu’ici stables et qui, depuis cinq décades, régissent l’avancement des officiers.
Afin de juger de la légalite de ces nominations, nous allons nous pencher sur les dispositions juridiques relatives au maintien, à la retraite et à l’avancement des officiers.
Du fait de la sensibilité de la question, et malgré les mupltiples demandes soumises à leur approbation, les décideurs ont toujours décliné le maintien des officiers atteints par la limite d’âge de leur grade. Bien que les statuts des différents départements de l’administration et des corps constitués le prévoient, les décideurs se sont toujours abstenus d’ouvrir cette boite de Pandore, jusqu’à ce 19 Septembre 2006, qui voit le maintien du capitaine de frégate Cheikh Ould Ahmed. Cependant, du fait du verrouillage juridique, le capitaine de frégate ne bénéficiera pas de l’avancement au grade de capitaine de corvette durant les quatre années de son maintien. Après le capitaine de frégate Cheikh Ould Ahmed, le medecin-colonel Salikou de la gendarmerie nationale sera maintenu mais ne bénéficiera pas, lui non plus, de l’avancement au grade supérieur.
Avec la modification de l’article 25 bis du décret 64134 fixant l’avancement des officiers de l’armée, le legislateur visait essentiellement à faire sauter le verrou de blocage de l’avancement des officiers de l’armée maintenus au-delà de la limite d’âge de leur grade.
Toutefois, la modification apportée à l’article 25 bis ne semble pas avoir eu raison du verrouillage du dispositif juridique relatif à l’avancement des officiers atteints par la limite d’âge et maintenus en activité, à cause des effets conjugués de deux facteurs: la survenance de la limite d’âge et l’admission à la retraite.
L’article 24 du décret 64134 fixe la limite d'âge des officiers. Par limite d’âge, il faut entendre l’âge après lequel l’officier ne peut plus exercer ses fonctions. L’article 25 bis du même décret stipule que: “Lorsque les besoins de la Défense Nationale l’exigent, les officiers d’active, peuvent, par décret, être maintenus en service pendant une période de deux ans au-delà des limites d’âge précisées”. Cette disposition attenue le caractère général de la règle, en permettant de se fonder sur les besoins de la défense, pour maintenir les officiers au-delà de la limite d’âge de leur grade.
Cependant, une fois accordé, le maintien doit obeir à certaines règles. Tout d’abord, non seulement la durée du maintien doit être définie, mais l’officier à maintenir doit être consentant pour la décision de maintien. Ensuite l’officier, du fait des raisons exceptionnelles de son maintien, ne pourra être affecté sur aucun autre poste pendant cette période.Enfin, la décision de maintien en activité au-delà de la limite d’âge doit être prise avant que l’officier ne soit atteint par cette limite d’âge. La decision, c’est-a-dire la signature du document prononçant le maintien, doit être prise avant la date de la survenance de la limite d’âge de son grade. En effet, la survenance de la limite d’âge constitue la “mort administrative” pour l’officier qui, une fois, cette limite atteinte, ne peut plus bénéficier d’un avancement de grade, ni continuer à exercer sa fonction comme nous l’avons vu précédemment.
Pour contourner cet obstacle, l’article 25 bis modifié a ajouté que: ”L’officier maintenu peut, s’il accomplit des services exceptionnels, être nommé au grade immédiatement supérieur qui constituera, conformément à l’esprit et à la lettre de l’article précité, est une position définitive, c’est-a-dire irreversible. Il s’en suit clairement qu’une fois admis à la retraite, l’officier ne peut plus avancer ni commander des militaires en activité, quels que soient leurs grades.
Toutefois, si les besoins de la défense dictent la nécessite d’une promotion au grade supérieur de l’officier à maintenir, cette promotion ne peut légalement être pronnocée que si certaines dispositions sont prises. Dans ce cas, il est impératif, soit de procéder à une suppression pure et simple de la limite d’âge pour l’officier et le soustraire ainsi aux contraintes de la limite d’âge des personnels de sa categorie, soit d’élever la limite d’âge de sa catégorie. De telles dispositions nécessitent des modifications en profondeur des dispositions statutaires relatives aux positions des officiers et à leur avancement.
Des observations précédentes, on peut donc déduire, considérant les dispositions statutaires actuelles, qu’une fois atteint par la limite d’âge de son grade, un officier peut être maintenu au-delà de la limite d’âge de son grade, sous réserve de remplir les conditions requises et que les dispositions relatives à son maintien soient prises en temps utile, mais ne peut en aucun cas bénéficier d’un avancement de grade. Telle est la loi et tel est son esprit.
Mohamed Lemine Taleb Jeddou