Samedi 2 Avril 2016, Rosso a connu un événement sans précédent. Tout commence par un grand meeting d’El Wiam. La veille, l'UPR (parti au pouvoir) s’est mobilisé pour faire diversion, exercer des pressions sur les notables, histoire de dissuader leurs familiers, d’aller au meeting, rumeur d'un éventuel report au risque de bagarres, etc. Lors de la passation de service entre le wali sortant et le nouveau, Sall Saïdou, l’ancien député Mohamed Vall ould Teyfour donne le ton : « Vous arrivez à un moment où la ville connaît une certaine agitation mais nous ne laisserons pas faire ». Bref, une certaine fébrilité, pour ne pas dire une fébrilité certaine.
Le meeting est un succès populaire : El Wiam est encore puissant et le démontre, avec des milliers de militants et sympathisants accourus de tout le département. Les orateurs mettent tous l'accent sur le harcèlement que subit l’équipe municipale. Sow Deïna, ancien maire et ancien ministre, fustige ces manœuvres antidémocratiques et dénonce la situation, Dah ould Dembé, coordinateur départemental d’El Wiam en fait de même.
Le maire Sidi Mohamed Diarra paraît serein et détendu. On le voit discuter et rire, çà et là. Personne ne peut imaginer que cette apparente quiétude cache une décision qui va surprendre tout le monde.
Il prend enfin la parole et c'est tout le monde qui l'ovationne, avec le « V » de la victoire. A n’en point douter et au grand dam de ceux qui pensaient Sidi fini, le maire jouit encore d'une très grande popularité. Le voilà à énumérer toutes ses réalisations, dans les domaines sanitaires, scolaires et sociaux, notamment l’eau potable accessible à tous, les dettes de la commune, héritées des gestions précédentes, épongées, l’excédent financier actuel… avant que, soudain, tombe l’annonce de sa démission avec toute son équipe !
Consternation et hystérie générale. Les uns pleurent, les autres n’en croient pas leurs oreilles. Non, non, non ! scande spontanément la foule. Le maire doit interrompre son discours pendant cinq bonnes minutes, tant l'émotion est à son comble. Puis l’on se ressaisit et les discussions vont bon train. Pour certains, Sidi a raison de démissionner : cela met l'Etat face à ses responsabilités ; pour d'autres, il doit se battre jusqu'au bout car il a la légitimité du peuple, ceux qui, tapis dans l'ombre, tirent les ficelles ne cherchent, eux, que leurs bas intérêts personnels...
Boydiel intervient et prône, comme à son habitude, la responsabilité et la patience. « L'objectif de ce meeting », dit-il, « est de faire part au peuple de la réalité de ce qui se passe en ville ». Et d’ajouter : « Nous avons usé de tous les moyens légaux et nous ne lâcherons pas. Cette situation, j'en ai fait part au président de la République qui m’a promis de faire le nécessaire mais rien, jusqu'à présent, n’a été fait ». Quoiqu’il advienne, Sidi Diarra et tous ses colistiers au conseil municipal ont officiellement remis leur démission au chef d’El Wiam et « c’est au parti de l’accepter ou non ».
En tout cas, démonstration est bel et bien faite, avec ce meeting populaire de grande affluence, que, loin d’être affaiblie, la popularité de Sidi Diarra s’est fortement accrue. Au détriment d’un pouvoir qui sanctionnerait Rosso d’avoir élu un opposant, ainsi que le pensent nombre de partisans et d’adversaires de l’actuelle équipe municipale ?
Jiddou Hamoud