Rien ne va plus à la Mauritanienne de Sécurité Privée (MSP). Cette société, dirigée par l’ancien colonel Sidi Ould Riha et dont le conseil d’administration est présidé par le tout aussi ancien colonel Cheikh ould Baya, actuel maire de Zouérate, s’apprête, en effet, à licencier pas moins de cent seize de ses employés, au motif des plus bizarres : « limite d’âge ». Un préavis de licenciement d’un mois, expirant le 30 Mars, leur a été notifié. Une seconde vague de compression est sur les tablettes de l’entreprise.
Pourtant, ces employés, qui ont, effectivement, atteint la soixantaine si rarement synonyme, en Mauritanie, de cessation d’activités professionnelles, sont majoritairement des retraités des forces armées et de sécurité. Une situation d’autant plus ubuesque que les sociétés de sécurité sont censées être mises en place à leur profit, dans le cadre d’une reconversion, sans que, bien évidemment, la moindre « limite d’âge » n’ait été fixée. Les seules conditions de recrutement requises, au départ, étaient d’être retraité ou ancien élément des forces armées et de sécurité, âgé de plus de vingt ans. Faut-il s’étonner que certains directeurs de cette société ayant allègrement dépassé la soixantaine n’aient pas été frappés par cette mesure singulièrement inique ?
Ahmed Salem ould Kabbach, secrétaire général du Syndicat des Agents et Professionnels de la Sécurité Privée (SAPSP), un regroupement qui compte près mille adhérents sur les trois mille employés que compte de la société, s’étonne d’une telle décision qui plombera davantage la situation, déjà misérabiliste, des licenciés. Les responsables de la MSP campent, quant à eux, sur leurs positions. « Ils restent intransigeants, en dépit de nos démarches visant à annuler cette décision injustifiée et injustifiable? », se désole Ahmed Salem.
Le SAPSP entend défendre, jusqu’au bout, les droits des personnes licenciées. Mais son champ d’actions reste limité par le refus des inspections du Travail à recevoir et enregistrer les plaintes des victimes, ne statuant plus sur les litiges concernant les sociétés de sécurité dirigées par des anciens officiers des forces armées et de sécurité. Depuis la marche des employés de la MSP, de Zouérate à Nouakchott, les tribunaux du travail ne sont, en effet, plus habilités à suivre les contentieux impliquant les entreprises de sécurité. Désormais officialisées en marge du Code du travail, ces sociétés paraissent bien évoluer hors la loi. Une situation probablement en germe dès la fondation de ces groupes financés, à hauteur de 400 millions d’ouguiyas, par l’Etat, et développée par le verrouillage de leur capital dont les actions, détenues par les puissants directeurs, tous hauts gradés de l’armée, n’ont jamais été libérées…
« C’est maladroit de licencier des anciens des forces armées évoluant dans la misère. Compte-tenu, surtout, de la conjoncture actuelle où le terrorisme reste une préoccupation. C’est une bombe à retardement qui devrait d’autant plus préoccuper les autorités que ces sociétés avaient été fondées pour réinsérer ces retraités », précise Ould Kabbach. La MSP avait déjà licencié, en Novembre 2014, plusieurs de ses employés à Zouérate, prétextant l'absence de couverture financière pour assurer un paiement régulier des travailleurs, en raison du renoncement de la SNIM à ses prestations, suite à la grève des miniers, lancée un mois plus tôt. Les agents de sécurité avaient organisé, le mois précédant, une marche de plus de sept cents kilomètres, jusqu’à l’entrée de Nouakchott où ils avaient campé plusieurs semaines, avant qu’une issue ne soit trouvée, par les hautes autorités, à leurs revendications axées sur l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail. On voit, un an après, ce que cette « issue » concoctait…