La Mauritanie a assisté, le 16 Mars dernier, à la 31ème session du conseil des Nations Unies, pour l’adoption de son rapport sur la situation des droits de l’homme. Le gouvernement y a présenté plusieurs délégations issues de tout ce qui touche, de près ou de loin, au sujet. Responsables du Commissariat des droits de l’homme et du ministère de la Justice, activistes d’organisations de la Société civile proches du pouvoir se sont ainsi donnés la main, pour défendre le point de vue officiel de la Mauritanie sur la très controversée question desdits droits dans le pays. En cela, les autorités n’ont en rien tranché avec les vieilles pratiques des systèmes précédents. Politique de la dénégation et rapports panégyriques, relayés par des cohortes de faux militants des droits humains, constituent toujours le socle sur lequel l’Etat mauritanien et ses institutions bâtissent leur stratégie de défense et leur argumentaire, facilement démontables, à l’ordinaire, par des rapports alternatifs produits par des associations diabolisées. Les mesures trompe-l’œil ne font plus recette. Ce n’est pas en nommant, à Genève, un staff diplomatique composé de Harratines (l’ambassadrice et son premier conseiller) qu’on démontrera, à la Communauté internationale, que l’esclavage est éradiqué. Les substantiels montants qui ont servi à transporter, héberger et corrompre la dizaine de Harratines et « responsables » d’ONG-cartables auraient bien plutôt pu servir à concevoir et mettre en œuvre des programmes et projets structurels qualifiants, au profit des centaines de milliers d’esclaves et anciens esclaves qui vivent dans la misère, aux quatre coins de la Mauritanie. Les solutions à l’emporte-pièces ne serviront à rien, sauf à détourner la problématique de l’esclavage vers d’autres considérations nuisibles à la cohésion sociale. Les signaux précurseurs d’un ras-le-bol généralisé doivent être courageusement décryptés. Les solutions globales capables de les juguler, repensées. Personne ne peut douter de l’importance de tout ce qui a été fait, des indépendances à aujourd’hui, pour contribuer à défaire la Mauritanie de cet abject phénomène. Les dispositions et amendements constitutionnels, les ordonnances, les lois, les tribunaux et, même, les établissements spécifiques, comme le Commissariat aux droits de l’homme ou l’agence Tadamoun, c’est quelque chose, en dépit de toutes leurs insuffisances. Mais il y a autre chose de peut-être plus important.
D’abord, la déconstruction des préjugés, chez les esclaves et les maîtres. La culture de la citoyenneté semble en être le seul efficace outil. A cet égard, les ambassadeurs, les ministres, les généraux et autres hauts commis de l’Etat ne sont ni harratines, ni beïdanes, ni négro-africains : ce sont juste des citoyens de la République islamique de Mauritanie. Naturellement que la citoyenneté ne se décrète pas ! Elle s’acquiert, à travers une accumulation de valeurs et de comportements que raffermissent la force de la loi et l’autorité de l’Etat, d’une part, et que vulgarisent et consolident, d’autre part, les pratiques quotidiennes de tous, dans toute la hiérarchie sociale.
Ensuite, la fin de la politique malveillante de victimisation. L’éradication de l’esclavage est l’affaire de tous les Mauritaniens. Aucune organisation, aucun groupe, aucun homme, quel que soit son charisme, n’en détient le monopole. Mais, autant il est inutile et vain de situer la responsabilité d’un passé révolu, autant est-il inacceptable de l’instrumentaliser ou de s’en servir à n’importe quelle fin. Enfin, et c’est, peut-être là, un des aspects les plus importants de la problématique, l’Etat doit cesser de nier, systématiquement, des faits avérés. C’est ridicule de déclarer, chaque fois, que l’esclavage en Mauritanie, c’est du passé. Alors que ceux qui l’affirment sont les premiers à savoir que, dans les faits et la crudité du quotidien, des centaines de milliers d’esclaves et anciens esclaves souffrent encore de cette horreur. Sans véritable volonté politique, l’éradication définitive de l’esclavage est une illusion. Et, sans cela, deux choses, au moins, sont objectivement impossibles. En un, le développement national. Bloqué, tant que des énergies aussi importantes que celles de ces centaines de milliers de citoyens ne sont pas libérées et mises en valeur. En deux, la cohésion sociale. Irréalisable, tant que d’aussi grosses injustices narguent, au jour le jour, les consciences dont les plus fébriles constituent une terrible menace potentielle. La politique du déni et de la fuite en avant ne paye pas. Impossible de continuer à tromper l’Histoire. Elle rattrape toujours ceux qui usent de subterfuges pour la devancer. Les expériences démontrent que ce n’est pas souvent une bonne chose de se faire rattraper par son histoire. Au cours de sa dernière visite, le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki Moon, aurait entretenu les autorités nationales sur la problématique de l’esclavage et autres violations des droits humains. Lors des examens périodiques universels, la Mauritanie se fait ordinairement tirer les oreilles, par les instances de la Communauté internationale, sur des questions de droits de l’homme, avec force recommandations et graves interpellations. Pourtant, notre pays continue, de sa tête à ses pieds, à « se faire » croire que tout va bien…en tout.