En mettant en place un recensement biométrique, les autorités mauritaniennes ont choisi de nuire, volontairement ou involontairement ; en tout cas, maladroitement ; à leurs compatriotes établis à l’étranger, notamment en Europe. Beaucoup de ces migrants ont pris la nationalité de leur pays d’accueil. Pour des raisons liées à des professions valorisantes, la préparation de l’avenir de leurs enfants dans des écoles de qualité ou autres intérêts non moins importants, pour des gens en quête de bonheur… Un choix cependant fort utile à leur pays d’origine, quand celui-ci se trouve aussi sous-développé que peut l’être la Mauritanie, peinant à donner de l'emploi à tous ses fils et veiller à l'égalité des chances entre tous. Car ces Mauritaniens de la diaspora se battent, bec et ongles, pour des réalisations importantes au pays : mosquées, écoles, dispensaires, mahadras, puits, etc. Ils sont énormes – pour ne pas dire irremplaçables, face à un Etat démissionnaire sur tous les plans – les apports de ces migrants, établis en Europe occidentale et aux Etats-Unis mais toujours au soutien de leurs familles restées en Mauritanie.
Malheureusement, ces hommes, ces femmes et leurs enfants se voient traqués, en leur pays natal, empêchés de recensement, voire de voyager, avec leurs enfants binationaux mineurs, vers leur pays d’émigration, sous prétexte de la nationalité mauritanienne des enfants que la loi mauritanienne protège jusqu’à leur majorité. Résultat des courses : la rentrée scolaire, en France, est effective depuis le 2 Septembre 2015 mais beaucoup de familles, toutes du Sud mauritanien, notamment du Guidimakha, sont actuellement bloqués à Nouakchott, à cause de toutes sortes de complications administratives et autre gestion déplorable de dossiers. Faute à des hommes sans scrupules, sans considération aucune pour la souffrance des enfants et de leurs familles. Celles-ci n’ont que le tort de rester attachées à leur terroir, la Mauritanie, malgré la mauvaise gouvernance et le racisme dont elles sont victimes, jusque dans les vacances. El les voilà à galérer à Nouakchott, sans que notre administration ne donne le moindre signe de bonne volonté !
Poudre aux yeux, vraiment, que cette tournée du président Mohamed ould Abdel Aziz dans les régions ! Qu’a-t-il donc retenu des véritables préoccupations des populations du Guidimakha, si clairement énoncées, pourtant, lors de son passage ? Combien de fois aura-t-il été question des souffrances de ces mauritaniens de l’étranger, mis hors-jeu par un recensement sélectif, qui handicape, lourdement, leurs enfants, en les empêchant de venir s’installer chez eux et de s’investir avec leurs connaissances et savoir-faire ? Que reste-t-il des beaux discours du Président et de ses proches ? Ah, qu’il est triste de devoir constater que le navire mauritanien n'a pas de pilote !
Quand certains dénoncent, avec courage et virulence, l’esclavage et le racisme, ils sont traités d’extrémistes, traqués comme de vulgaires trafiquants et jetés en prison, comme des chiens. Quant à ceux qui manifestent leur appartenance à la patrie, ils sont, non seulement, déclarés indésirables mais privés de voyages, condamnés à sacrifier l’éducation de leurs enfants et leur travail, au nom de lois scélérates dont le seul but se révèle de nuire à une communauté, à certaines régions, à des hommes et des femmes bien identifiés. Quelle honte pour ce pays ! Quelle lâcheté ! Mais, morts ou vivants, nous restons mauritaniens et l’exil ne fera jamais, de nos frères et sœurs de la diaspora, des monstres. « Quelle que soit la durée du tronc d’arbre dans l’eau, il ne se transformera jamais en caïman », dit le vieux proverbe soninké. Et soyons clairs : mon désarroi n'a rien d'un racisme grégaire, c’est une juste dénonciation de faits avérés et dûment vérifiés.
Cheikhna D. Tandia