La vente et le désintérêt de tout le reste sont deux particulièrement appréciés des Mauritaniens. Surtout par les temps qui courent. Et puis, n’en déplaise à certains, la vente, surtout la vente, est un quelque chose qui ne date pas de longtemps. Ce n’est qu’il y a juste quelques années qu’on a commencé à vendre. Pratiquement tout. Pas la terre. Pas le ciel. Pas les consciences. Enfin, pas seulement... Ah oui, me diriez-vous, on vendait, quand même, les nostalgiques petites cartes nationales d’identité jaunes et les rondelettes licences de pêche. Mais autres temps, autres mœurs. Il faut vendre pour vivre et non pas vivre pour vendre. Vente aux enchères ? Vente sans transparence. Quel est le « péché » des écoles officiellement mises en vente ? Les écoles Marché, Sept et de la Justice : des symboles de cette république. C’est vrai, surtout pour l’école Marché et l’école 7, ça ferait de beaux petits immeubles, en plein centre des affaires de Nouakchott. Ça peut rapporter gros. Pour une fois (qui n’est pas coutume), le gouvernement est inspiré. Il faut vendre les écoles publiques qui ne servent absolument à rien du tout. Elles ne font qu’occuper de grands espaces. Inutilement. Très bonnes idées de remplacer les écoles par des marchés. Vendre vaut mieux qu’apprendre. Les trois écoles qui « ont la corde au cou » ne sont pas plus « aimées » que les Blocs Manivelles. Copieusement vendus et leur argent mangé et digéré. Et si l’on vendait toutes les écoles publiques de Nouakchott, pour acheter du riz mauritanien avec ? Elles auront, au moins, servi à quelque chose. Leurs pensionnaires peuvent aller, d’Octobre à Juin, de chez eux à n’importe où : à la plage, aux marchés, sur la rue d’Aziz ou n’importe où ailleurs dans Nouakchott. Le résultat est le même. Il faut aussi vendre les enseignants aux pays de la sous-région. Ça rapporte, un enseignant. Ils peuvent aller faire le « toujours debout » au Sénégal, en Gambie ou au Soudan du Sud. Rejoindre les prêcheurs, dans les déserts internationaux, ou les pêcheurs en eaux troubles, quelque part au Yémen ou en Syrie. Solution originale à l’échec du système éducatif. Vendre écoles et enseignants. Se « reposer » des ministres et des encadreurs. Une mahadra, pour les juges et les administrateurs, et une académie militaire, pour les généraux. A toutes fins utiles. On ne sait jamais. Oum Tounsi. Oum Lahbal. Oum La’wam. Oum Nour. Des Oum à n’en plus finir. L’essentiel, c’est d’avoir un nom. Chami, Beni Chab, El Asma, qu’importe : un nom, c’est un nom. L’aéroport aurait bien pu s’appeler : L’aéroport international de Toueïla. L’essentiel, c’est l’histoire. La petite histoire de Toueïla. Une manière de ne pas l’oublier. Pour savoir, y a pas mieux que de continuer à chercher dans l’histoire. Ici, c’est un peu comme les autres communautés. Chaque fois que l’une vient, elle maudit sa « sœur ». Mauritaniens, Mauritaniennes, peuple de héros (zéros pour certains) et la suite. Puis encore. Puis encore. Les Moktar ould Daddah, les Sid’El Moktar N’diaye et les autres qui ont porté ce pays sur les fonts baptismaux. Oui, c’est vrai…. mais, vous diront aujourd’hui certains, avec désintérêt, le premier a longtemps vécu en exil ; l’autre est mort hors du pays, dans l’anonymat. Un aéroport Oum… Ç’aurait été au moins un Ould ! Ne serait-ce que pour respecter la tradition. La barbe vient avant la tresse. C’est connu. Le pantalon avant la jupe. Mais, ici, on ne parle que du présent. Le passé est passé. L’avenir n’est pas encore venu. C’est une communauté passée qui a fait ce qu’elle fait et qui répond de ce qu’elle a fait. Nous, c’est nous et maintenant. Pas d’avant. Ni d’après. Ni d’à peu près. C’est l’histoire qui ne laisse pas la Mauritanie avancer. Chaque jour, une histoire. Que les fils du Président aient la nationalité marocaine, ça fait quoi ? Les proches du Président, dans les sphères du pouvoir, les nouveaux riches – sans raison, précisent les petites histoires – c’est le présent. Impossible de vivre en dehors du temps. Du présent. Du passé. De l’avenir. Il faut bien choisir. Vendre. Acheter. Construire. Ainsi va La Mauritanie. Salut.
Sneïba