Le braqueur de Toujounine
Bouhdida, Elevage, Mbeyet Achra, Axe Aziz : quatre quartiers en insécurité permanente, ces derniers temps. Des riverains ont mis en place des comités de vigilance qui patrouillent tout au long de la nuit, en certaines zones. Résultat : un calme relatif règne, ponctué, de loin en loin, de rares cambriolages. Mais voici qu’est apparu, au quartier nord de Mbeïyet Achra, il y a une quinzaine, un gaillard de teint foncé, maniant une langue inconnue et une plus compréhensible machette. Il cible les jeunes filles qui s’isolent la nuit pour passer des coups de fil, les menace, les déleste de leur portable et disparaît. Les victimes transies d’effroi se comptent par dizaines.
Jeudi 21 Mai, vers vingt-deux heures, une jeune fille téléphone, assise devant chez elle. Soudain, une énorme silhouette sort de l’obscurité, tout près d’elle. Elle n’y fait guère attention, croyant qu’il s’agit d’un passant. Cependant, une odeur, forte, de transpiration masculine lui signale l’excessive et inquiétante proximité de l’homme. Elle veut crier mais la machette est déjà sur sa gorge. Désignant le portable, il marmonne des mots qu’elle ne comprend pas. Elle le lui tend, effrayée ; il s’en saisit et disparaît. Aussitôt alertée, la famille entreprend de rechercher le malfaiteur. En vain. On téléphone alors à un ami douanier qui alerte à son tour des gendarmes qui patrouillent dans la zone. Ils rappliquent dare-dare et cernent le quartier. Puis on commence à cribler les rues au peigne fin, pour essayer de coincer le bandit qui ne devrait pas avoir eu le temps de fuir bien loin. Les gendarmes fouillent en compagnie de jeunes volontaires. Après une heure de méticuleuses mais vaines investigations, un gendarme remarque quelque chose qui bouge sous une table installée en plein air, par le boucher du coin. On encercle aussitôt le lieu, les pandores braquent leurs armes : « Sors delà ! Tu es cerné ! ». Un colosse apparaît, les mains en l’air. On le fouille illico, pour retrouver le valeureux portable qu’on remet à sa propriétaire, avant de dénicher la machette du bandit sous la table du boucher. Il s’agit d’un ressortissant ghanéen qui ne parle que la langue ashanti et des bribes d’anglais. On lui passe les menottes et l’on part le confier à la police.
La bande des charretiers
On craint les petits charretiers qui se proposent à évacuer les ordures des foyers. Ces jeunes ouvriers sont réputés pour leur vivacité à dérober tout ce qui tombe sous leurs yeux. Dernièrement, quatre de ces gosses ont dévalisé, vers neuf heures du matin, une maison dont les occupants dormaient encore. Ils ont subtilisé plusieurs téléphones portables, des habits et de l’argent. Heureusement, le fils de cette famille, un policier, a pu les arrêter plus tard, un à un.
Nouvelle stratégie, ces derniers temps. Un éclaireur repère un commerçant seul dans sa boutique. Deux autres gamins s‘emparent de marchandises à l’étal extérieur et s’enfuient en courant. Tandis que le vendeur se lance à leur poursuite, des complices pénètrent dans la boutique, vident les tiroirs et disparaissent. Une tactique utilisée dans une quincaillerie près de la clinique Nejah. Malheureusement pour ces jeunes délinquants, un blanchisseur a compris leur manège et est intervenu pour les empêcher de dévaliser la boutique pendant que le boutiquier poursuivait leurs camarades. Trois éléments de la bande ont été arrêtés.
La majorité des pensionnaires de la maison d’arrêt des mineurs est constituée de ces petits charretiers voyous. Au lieu de les rééduquer, la prison les abandonne entre eux, les formant, ainsi, à devenir de véritables délinquants. Ils y découvrent, notamment, la consommation de poudre blanche et autres stupéfiants.
Le phénomène « Gouggouh »
Gouggouh est un mot lié à la frayeur, dans l’inconscient de nos enfants. Il incarne la peur et fait trembler notre pauvre progéniture. C’est comme l’ogre des Français. Une légende réputée assurer la tranquillité des parents. Sauf quand elle devient vivante. Samba ould Bilal, âgé de trente-deux ans, est ainsi surnommé Gouggouh et, du haut de son mètre quatre-vingt-huit enrobé de quatre-vingt-huit kilos de muscles, il ne fait pas trembler seulement les enfants de Nouakchott. Déféré plus de vingt fois au Parquet, il a connu les cachots de Nouakchott et Kaédi mais n’a été condamné qu’à deux reprises. Violent, il n’a cependant jamais commis de meurtre. C’est un spécialiste des braquages, agressions et vols à main armée.
En 2004, Gouggouh avait élu domicile aux jardins maraichers. Il y sema la terreur pendant trois mois, braquant tout passant. Arrêté et confondu par l’immense butin accumulé, il fut pourtant bientôt relâché. Après plusieurs séjours en prison, il était, dernièrement, en liberté et fréquentait, la nuit, divers quartiers d’Arafat. On prétend qu’il se met aux aguets dès vingt-deux heures. Une fois ses proies saisies, il leur enserre le cou avec une longue chaîne et les délestent de tout. Quiconque s’enhardit à faire le héros sera battu sans ménagement. Samba Gouggouh dispose également d’une longue machette qu’il utilise, parfois, pour intimider ses victimes.
Mosy