Tournée présidentielle à l’Est : Vendre le référendum aux bastions électoraux ?

19 March, 2015 - 00:54

Le président de la République a entamé, le lundi 16 Mars 2015, une tournée dans deux bastions électoraux et régions pastorales du pays. Officiellement, pour évaluer la situation de leurs populations, en cette année de sécheresse. La Mauritanie a, en effet, enregistré un gros déficit pluviométrique, lors de la dernière saison humide. Mais, pour nombre de Mauritaniens, notamment du camp de l’opposition, cette visite intervient surtout alors que le dialogue, avec celle-ci, peine à se nouer, après les sorties du président de la République sur l’éventualité de modifier la Constitution. D’aucuns y perçoivent un couloir, pour l’actuel locataire du Palais gris, de briguer, d’une part, un troisième mandat et d’organiser, d’autre part, des élections municipales et législatives anticipées.

C’est dire donc que le Président ne manque pas de sujets  à proposer aux populations de ces régions et, à travers elles, l’ensemble du pays, dans la mesure où cette « visitation » sera très médiatisée comme celles qui l’ont précédée en ces terres de Mauritanie. Durant des semaines, les organes de l’Etat – TVM, Radio-Mauritanie, AMI – en mal de matières politiquement correctes, relayeront l’ensemble des étapes et les discours prononcés par « notre guide bien-aimé », selon la célèbre formule de Mamane de RFI. Nous sommes, bel et bien, en République très très démocratique du Gondwana.

 

Plusieurs thèmes à aborder

Comme donc toutes les « visitations », celle dans les deux Hodhs  ne dérogera pas à la règle. Toute la République va s’y déporter. Non seulement, les ressortissants des Hodhs El Charghi et El Gharbi, mais tous ceux nantis de quelque fonction de responsabilité et, même, des plantons. Monsieur Dialogue, l’ex PM docteur Moulaye ould Mohamed Laghdhaf, a séché le dialogue pour aller jouer querelle de leadership avec son successeur, Ould Hademine. Résultats des courses, Nouakchott se vide de ses habitants. Parce que chacun, en particulier, voudra se faire voir, se montrer, serrer la main de notre « cher » Président. Du coup, c’est tout le cœur de la République qui se déplace à l’Est. La Mauritanie ne respirera, durant toute la visite, que depuis les deux Hodhs.

Parmi les thèmes que le président de la République abordera figurent, en vrac, la situation économique du pays et, sur ce point, le président ressassera ce qu’il a déjà déclaré à sa majorité venue lui rendre visite, il y a bientôt un mois. Même si les prix des industries extractives ont baissé, entraînant, du coup, l’augmentation de la TVA sur certains produits et la grève des travailleurs de la SNIM, qui dure depuis un mois et demi – autant de faits, bien réels, pour rappeler la dure réalité du pays – le Rectificateur de celle-ci dira, à ses « écouteurs », que la Mauritanie se porte bien, depuis ce 8 Août 2008 béni, que ses caisses sont pleines, que la gabegie a disparu, que l’esclavage n’existe que dans l’esprit de l’opposition et de quelques associations de défense des droits de l’hommes, IRA et El Hor, notamment. Il dira que les boutiques Emel seront renforcées, pour juguler les conséquences néfastes de la sécheresse, que le blé va couler, à flots, pour alimenter le bétail, que la construction des routes et autres infrastructures se poursuivront sans relâche, comme celle contre la gabegie, résiduelle, comme chacun ne le sait pas.

Puis, le président de la République abordera le plat de résistance : le dialogue politique. Il réitérera  sa « disponibilité au dialogue » avec l’opposition et que rien n’est tabou. Entendez, des amendements constitutionnels. Mais, avant, dira le Président, il revient au peuple de décider si oui ou non, un mauritanien peut briguer le fauteuil de la présidence. Sur ce point, il ne manquera pas de dire que si l’opposition refuse, c’est parce qu’elle sait qu’elle va perdre la bataille dans les urnes. Aussi dois-je vous prendre à témoin, dès à présent, ajoutera Mohamed ould Abdel Aziz, en bon guide de la République très très démocratique du Gondwana. En bons citoyens convaincus, depuis longtemps, qu’en cette république, on n’organise pas des élections qu’on perd, ils plébisciteront la nouvelle Constitution amendée. Vive la République, vive la démocratie ! L’opposition n’aura qu’à s’en prendre à elle-même. Dialogue ou pas dialogue, le référendum passera, comme une lettre à la poste. Nous ne sommes pas différents du Zimbabwe qui nous a succédé à la tête de ce machin d’UA. Et, pendant que le Président est en villégiature aux Hodhs, le FNDU continue à peaufiner sa stratégie, sans toujours pas croire à la « sincérité du pouvoir » de parvenir à un accord, si d’aventure, le dialogue se nouait…

DL