J’ai mal à la SNIM. Cette mère nourricière pour nombre d’entre nous, Cette formatrice de dizaines de nos cadres les plus performants. Cette source de fierté nationale, dont la nationalisation un certain 28 novembre 1973 a fait l’unité nationale et les premiers jalons de la Mauritanie indépendante avec la création de la monnaie nationale, et le rêve d’une nation prospère.
Aujourd’hui sa situation est difficile, le prix du fer a chuté de plus de 50%, et nos larmes n’y pourront rien changer. Ce prix est fixé loin de nos cieux, loin de nos yeux et de nos vœux. Ceux qui le fixent ne tiennent compte ni de notre de prix de revient, ni des besoins de nos populations. En ce sens les miniers sont un peu comme nos éleveurs et nos paysans. Ils ne savent pas quand est ce qu’il pleuvra, ni combien, ni où. Chaque fois que cela arrive (de pleuvoir), il faut gérer cela au mieux. Constituer des réserves, engraisser les troupeaux et les personnes. Nos miniers ont eu une décennie où les prix ont battu tous les records. Qu’ont-ils fait de cette aubaine ? Ils ont plutôt fait la cigale que la fourmi de la fable de la Fontaine. Que Dieu leur pardonne leur insouciance. Que faire aujourd’hui? Arrêtons de pleurnicher, de ressasser l’imprudence de nos responsables, sur ce qu’ont aurait dû faire. Concentrons-nous sur ce que nous devons (ou pouvons) faire, pour sauver le fleuron de notre industrie, le socle de notre indépendance économique.
Déjà, il y a plus de quarante ans, la SNIM a été attaquée lors de la guerre du Sahara, quand tous les étrangers quittèrent le sol national devant l’insécurité due aux attaques du Front Polisario, tout au long du chemin de fer et des principaux centres d’exploitation. Beaucoup misaient sur la mort de la SNIM et l’effondrement du pays tout entier. Ce fut à la surprise générale que les travailleurs mauritaniens, ces fiers hommes du désert qui ont à peine quitté leurs chameaux et leurs dignes frères cultivateurs ou paysans encore hier, s’unirent dans la besogne pour sauver leur entreprise et gagner le pari et quel pari !
Quelques années plus tard, on souffla et tous se dirent qu’à quelque chose malheur est bon. Ce fut la mauritanisation de la SNIM avec succès et sans coup férir.
Aujourd’hui, encore tout est possible. Seulement il faut le vouloir. Malheureusement c’est toujours à ceux qui ont peu reçu, lorsque les prix étaient au plus haut, qu’on demande le plus d’effort. C’est bien entendu aux travailleurs, qui d’autres pourraient relever encore une fois le défi. Ramener notre prix de revient au niveau le plus bas possible afin que nous survivions à cette crise qui pourra durer de 5 à 10 ans. Mais le jeu en vaut la chandelle et on n’a pas le choix d’ailleurs : survivre ou mourir, telle la loi dans ce terrible monde mondialisé. Mais il ne faut pas que ce plan rugueux, pénible et cruel qui sera nécessairement mis en place soit sur le dos des travailleurs. Ni les salaires, ni les avantages sociaux ne doivent être concernés par la réduction des coûts. Le rendement, la maintenance, la vigilance et la productivité doivent être les maitres mots de ce challenge. Innovons, économisons, dépistons toute idée à même de d’améliorer tant soit peu la production. Une lutte implacable anti gaspillage doit être menée. Zéro déraillement, zéro accident, 100% de disponibilité de nos engins, de notre train et notre chemin de fer. Diminuons notre consommation de carburant, de lubrifiant et de fournitures en tout genre.
Créons des cercles de productivité, des ateliers, des conférences sur ces thèmes. Mettons tout cela en valeur, par des prix, des distinctions, de la saine compétitivité, une saine émulation dans une mobilisation monstre. En sommes-nous capables ? Gageons que oui.
Mais cela nécessite une adhésion sans faille de la masse des travailleurs à ce programme, une confiance absolue qu’une fois encore les travailleurs ne seront pas les dindons de la farce. A mon humble avis, seule une mobilisation de toute la nation autour des travailleurs de la SNIM pourrait avoir cet effet.
(i)En premier lieu le chef de l’Etat rend hommage aux travailleurs de la SNIM et leur présente ses excuses, celles de toute la nation pour les torts et injustices qui ont été commis à leur encontre.
(ii) Il lève immédiatement toute sanction prise suite aux derniers événements et rétablit les travailleurs dans tous dans leurs droits.
(iii) Ensuite il met en place un système qui fait que les travailleurs seront les premiers bénéficiaires de toute amélioration de la situation financière de la société. Ce système fera l’objet d’un contrat programme entre la SNIM et l’Etat et qui sera voté et ratifié.
L’Etat et ses entreprises devront rembourser à la SNIM l’intégralité des sommes empruntées (Aéroport de Nouakchott, Mauritania Airways etc.)
Il fera également un appel à tous nos partenaires au développement pour le financement en priorité des programmes en cours pour doubler la production de la SNIM dans les plus brefs délais.
Les salaires des travailleurs seraient immédiatement indexés sur la production (collecte, concassage, chargement et exportation)
L’Etat doit arrêter tout prélèvement sur la SNIM, il s’est servi pendant les périodes grasses, qu’il rende l’ascenseur aujourd’hui que la SNIM est en difficulté.
J’ai préféré commencer par les mesures en interne liées à la productivité du personnel lui-même, c’est le prix à payer pour convaincre nos partenaires du sérieux de notre engagement à redresser notre compagnie nationale.
GOD SAVE SNIM.
*Ex employé de la SNIM (1983-1989)