Les acteurs politiques n’ont pas toujours le sens de leurs responsabilités historiques. L’opposition au régime n’a pas d’autre programme politique que le « Pousse-toi de là que je m’y mette ! ». Elle manque souvent de maturité et d’expérience. Elle n’arrive pas à dépasser le stade crypto-personnel ou les divergences idéologiques pour une capacité d’anticipation et d’adaptation aux évènements. De manière générale, les classes moyennes vivent une période d’incertitudes et de précarité. Et les méfaits des ajustements structurels sur l’emploi, leurs conditions de vie, leur statut social ont été si déstructurants qu’elles vivent constamment dans la peur de perdre le peu de prestige et de moyens qu’elles ont préservés. Alors, c’est la course effrénée vers le pouvoir, non pas pour mettre en œuvre une vision, un engagement ou une ambition mais, seulement, obtenir les privilèges qui permettent d’assurer un standing, un rang social. Aujourd’hui, tout le monde veut être ministre, voire Président. Pourquoi ? Personne ne le dit. L’un croit qu’il tient légitimité de son statut religieux, l’autre se croit un destin national parce qu’il a eu une position de pouvoir, etc. La position de ministre ou de son entourage ne sert, désormais, qu’à s’enrichir vite, avant que le bateau ne coule. C’est ainsi que l’image des politiciens s’est détériorée de manière cruciale, ces dernières années. Les citoyens n’ont plus confiance en ces « grandes gueules » qui, au lieu d’être la voix des sans voix et de servir la cause du peuple, SE servent outrancièrement. Cela pose des problèmes car il est difficile de demander aux populations de se sacrifier et de participer à l’effort de développement, alors que, sous leurs yeux, au premier plan, ce sont que nuls et médiocres, opportunistes, transhumants et flatteurs, tous ceux qui ont tourné le dos à la saine compétition, à l’émulation, au culte du travail et de l’excellence, ceux qui fuiront, au premier coup de semonce, vers des pâturages plus verts. La démocratie est un objectif dont le chemin est pavé d’embûches. Elle exige un long apprentissage durant lequel on intériorise ses principes et on en fait une culture, c'est-à-dire une seconde nature. « On ne naît pas démocrate, on le devient ! » La Mauritanie va donc devoir trouver les voies qui vont faire, de la discipline et de la rigueur, les armes de la réussite économique et de l’expression démocratique. Les tâtonnements actuels sont le fruit de l’absence de voie claire. Certes, il y a des hommes courageux, désireux de hisser le pays au niveau le plus élevé. Il y a des femmes et des jeunes pleins de créativité et d’énergie, il y a des sages, pour nous rappeler nos racines et donner un soubassement culturel à nos actes. Mais il n’y a pas encore une pensée politique qui puisse ramasser les problèmes du pays en une formule, une doctrine capable mobiliser tous les secteurs sociaux dans leur diversité, vers un but commun. Or, sans un sursaut commun, il est presque impossible, dans la phase que nous vivons, de relever le défi de la pauvreté. Il va falloir trouver les moyens de booster la productivité et la croissance, tout en répartissant leurs fruits de la manière la plus judicieuse, surtout aux plus démunis. Comment réaliser une telle ambition ? Voilà la question à laquelle les intellectuels, les politiciens, le secteur privé, les syndicats, doivent répondre. Alors, ils n’auront plus le temps de se quereller, ni de chicaner : car maintenant, nous sommes fatigués. Pouce !
Ahmed Bezeid ould Beyrouck
Je ne suis ni de l’opposition,
ni de la majorité présidentielle :
Je suis ailleurs.