Me Ahmed Salem Ould Bouhoubeyni, Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme : « Mon combat pour une justice indépendante est une question de principe, pas de circonstances, ce qui coûte parfois cher mais j’assume. »

16 October, 2024 - 09:57

Le Calame : Lors de votre récente déclaration, vous avez dénoncé des irrégularités dans la procédure du procès de l’ancien président Aziz. Pouvez-vous préciser votre position ?

Me Ahmed Salem Ould Bouhoubeyni: Absolument. Ma déclaration visait à pointer les problèmes techniques et les irrégularités procédurales que j’ai observés dans ce procès. Il ne s’agit pas de défendre la culpabilité ou l’innocence de Mohamed Ould Abdel Aziz, mais de souligner que les conditions d’un procès équitable n’étaient pas réunies. En tant que défenseur des droits de l’homme, il est primordial pour moi que toutes les parties bénéficient des mêmes droits dans une procédure judiciaire, et ce, quelle que soit leur affiliation politique.

Certains ont perçu cette déclaration comme un soutien indirect à l’ancien président Aziz et vous l’ont reproché. Que répondez-vous à ces critiques?

Je comprends que certains aient pu mal interpréter ma déclaration. Cependant, mon engagement est resté constant, indépendamment des personnes concernées. Lorsque Aziz était au pouvoir, j’ai dénoncé les mêmes irrégularités de procédure et les injustices dont certaines personnalités étaient victimes. Aujourd’hui, j’agis de la même manière, non pas pour Aziz en tant que personne, mais par principe. Toute personne, qu’elle soit proche du pouvoir ou opposée, mérite un procès équitable. C’est une question de justice, et je continuerai à dénoncer ces irrégularités où qu’elles se trouvent car le salut du pays passe par une justice indépendante, des juges libres et des ministres de la justice qui ne sont pas des régisseurs de prison.
Mon combat pour une justice indépendante est une question de principe, pas de circonstances, ce qui coûte parfois cher mais j’assume.

Vous insistez beaucoup sur l’équité des procédures judiciaires. Pourquoi est-ce si important pour vous, surtout dans le contexte mauritanien ?

 La justice est l’un des piliers fondamentaux d’un État de droit. Pour que la Mauritanie progresse en tant que nation démocratique, il est crucial que nos tribunaux fonctionnent de manière impartiale et indépendante, sans influence politique. Quand les procédures ne respectent pas les normes d’équité, cela compromet la confiance du peuple dans les institutions. Mon combat pour une justice équitable est constant, car je crois que tous les Mauritaniens, quels que soient leur statut ou leur position politique, doivent être traités de manière égale devant la loi.

Est-ce que cette démarche est quelque chose que vous envisagez de poursuivre dans d’autres affaires ?

Absolument. Ce n’est pas un combat isolé ou ponctuel. Que ce soit pour Aziz, ses coaccusés ou pour d’autres personnes incarcérées aujourd’hui ou demain, je continuerai à dénoncer toute procédure qui ne respecte pas les droits fondamentaux des accusés. Mon objectif est que la justice mauritanienne se renforce, qu’elle soit un rempart contre l’injustice et qu’elle assure des procès transparents et équitables pour tous. Ce principe est au cœur de ma démarche, et je ne compte pas y renoncer.

 

                                           Propos recueillis par Ahmed Ould Cheikh