La lutte contre la gabegie poursuit son petit bout de chemin en dents de scie. Depuis son commencement qui a coïncidé avec l’arrivée au pouvoir par la force de son promoteur, le président Mohamed Ould Abdel Aziz, cette campagne a eu ses hauts et ses bas. Certains en ont pâti à travers des remboursements et même l’emprisonnement si ce n’est les deux à la fois. D’autres y ont échappé paradoxalement pour des montants parfois plusieurs fois plus importants que ceux pour lesquels les premiers ont été déshonorés au point d’être cités publiquement par le président comme des exemples. Il y a deux jours, la Cour des comptes a fait une mise en demeure à la commission électorale nationale indépendante (CENI) pour procéder au remboursement de trente six millions d’ouguiyas dont la dépense serait injustifiée. Elle a également demandé au coordinateur du projet de lutte contre la pauvreté rurale dépendant du ministère de l’agriculture de reverser au trésor public onze millions d’ouguiyas "engagés illégalement." Les scandales des trésoreries régionales (NDB, Guérou, Rosso, Magta Lehjar, R’kiz…), de la SOMELEC, des ministères de la jeunesse et des sports (affaire du stade de Nouadhibou) et autres ont défrayé la chronique. Tout cela constitue effectivement de réels efforts quoiqu’on dise pour promouvoir l’assainissement de la gestion de la chose publique. Mais d’autres manifestations flagrantes de la gabegie méritent elles aussi d’être combattues puisqu’elles sont beaucoup plus dangereuses que la dilapidation sonnante et trébuchante de l’argent public. Les promotions imméritées et systématiques des fils et proches d’anciens ministres ou dignitaires d‘une certaine époque sur base d’interventions de hautes personnalités civiles et militaires du système sont un secret de Polichinelle. Que des jeunes (27 à 28 ans) encore sans aucune expérience, fraîchement sortis d’écoles supérieures soient bombardés directement directeurs centraux dans des ministères comme celui des affaires économiques ou inspecteur général d’Etat parce que fils d’ancien titulaire de ce ministère ou d’ancien secrétaire général de l’UTM est de la vraie gabegie. Que des retraités continuent à coordonner abusivement de grands projets comme le Programme du Développement Urbain (PDU) ou l’Agence pour le Développement de l’Electrification Urbaine (ADER) est de la vraie gabegie. Rien, même l’activisme politique au profit du parti de l’Etat ne peut justifier de telles incommodités. Que deux frères soient ambassadeurs dans deux importants pays comme la Turquie et l’Arabie Saoudite est inédit dans les annales de la diplomatie mauritanienne, surtout quand des dizaines de diplomates de formation encore en fonction traînent la bride dans le pays. Des exemples loin d’être exhaustifs qui ne sont que la partie apparente d’un iceberg de pratiques «gabégistes » dont la dilapidation d’argent n’est que la manifestation la plus bénigne.
Faites un petit tour à Nouakchott : allez de la plage des pêcheurs au Port de l’Amitié ou de cette infrastructure vers le carrefour dit Bamako ; partez d’Atak El Kheir 2 en direction de l’Est ; promenez-vous en divers quartiers de la capitale… Rassurez-vous, il ne s’agit pas de villégiature !