Lorsqu’un individu ouvre le feu sur une foule faisant des dizaines de victimes, ou qu’un individu détourne le budget d’une structure publique, ou dilapide ses ressources, entrainant des milliers de victimes sur le court, le moyen et le long termes, le premier est un dément, le second est un gestionnaire public. Et tous les deux sont des criminels.
Lorsque des personnes se meurent dans les hôpitaux faute de soins, que des automobilistes trouvent la mort sur des routes mal conçues, que des ponts s’effondrent faisant des victimes, que des infrastructures mal conçues prennent des vies aux premières inondations …. Le responsable est unique : le gestionnaire public.
Un criminel peut tuer une fois, un gestionnaire public véreux tue tous les jours
Lorsque le gestionnaire public détourne le budget de son département (santé, transport, équipement…), il est non seulement un délinquant financier, mais aussi un véritable criminel.
Bien plus que celui qui tue, une fois, à bout portant, le gestionnaire public fait, chaque jour, par son acte, des milliers de victimes. Il est alors couvert par une impunité que lui assure souvent la technicité de sa gestion. Et l’impunité lui assurant le statut protégé de serial killer, c’est un voleur d’âmes.
D’autre part, lorsqu’un fonctionnaire, payé sur les ressources publiques, n’assure pas l’emploi qui justifie son existence professionnelle (absence, fainéantise, congés indus, inefficacité, inefficience etc.), il est assimilable à un être qui se nourrit de la vie des autres. En effet, toute allocation de ressources publiques prend son origine dans la confiscation d’une vie.
Le salaire de ce fonctionnaire, étant payé sur des ressources publiques, il provient principalement du prélèvement de l’impôt et de l’endettement (interne et international). Or l’impôt n’est qu’une ponction sur un revenu issu d’un travail auquel le contribuable en activité a consacré une tranche de sa vie et l’endettement n’est que la confiscation des vies de générations futures.
Les ressources publiques (fiscales et d’endettement) ne sont rien d’autre que des tranches de vie confisquées au nom de l’Etat, collectivité nationale. Le fonctionnaire est payé sur des tranches de vie.
C’est autant dire la sacralité de l’emploi qu’il occupe et l’importance du travail qu’il doit réaliser. C’est la raison pour laquelle la rigueur est de mise et l’inexécution du travail public revêt une telle gravité.
La Fonction publique fonctionne sur la saisie de tranches de vies de millions d’âmes. Et la consommation d’une vie en éteignant une autre correspond à la définition même du vampirisme. Vivre en prenant la vie des autres. Le fonctionnaire, incapable, incompétent et improductif est en tant que gestionnaire public, un voleur d’âmes.
Cette approche permet d’appréhender l’acte de gestion publique, sous un éclairage plus à même de livrer sa véritable nature et son impact sur la vie humaine. Un acte que l’on devrait soumettre, non seulement à une simple appréciation financière de sa régularité (juridique) ou opportunité (économique), mais à une analyse de la responsabilité pénale spéciale qui devrait être présente à toutes les étapes du processus de la dépense publique et de la gestion des allocations budgétaires (ordinaires ou en capital/de fonctionnement ou d’investissement).
Ainsi prennent ici de l’importance, les concepts de « faute de gestion », «de responsabilité budgétaire », de « gestion budgétaire », de « gestion comptable », du régime « statutaire et réglementaire » du fonctionnaire public, du « fonctionnariat à vie », du « corporatisme dans la fonction publique », du « copinage des promotions énarques » , « du management public introuvable », « du forfait du politique » , de l’ignorance des « processus financiers » par le juge pénal, de l’absence d’un « droit pénal spécial » à la répression des délits et crimes de gestion des finances publiques , de la nécessité de « juridictions spécialisées de juges experts en finances publiques », « de la révision des peines des délits et crimes » pour s’adapter à l’évolution de la criminalité financière publique, de l’édiction « d’un code de procédures pénales spéciales » pour l’investigation, la preuve et l’inculpation des criminels, eut égard à la technicité de la matière et aux moyens mis en œuvre, de « l’inefficacité des contrôles a priori, concomitant et a posteriori des finances publiques », de l’IGF, de l’IGE, de la Cour des comptes et des structures de contrôles et d’inspections départementales et sectorielles, de « l’inefficience des contrôles politiques » et notamment le contrôle de l’action gouvernementale par le Parlement , de la «complicité » tribale et clanique pour le maintien de l’impunité , de la «solidarité » du fonctionnariat mafieux au sein des structures de l’Etat, du « silence » des Partenaires économiques et financiers (PTF) face à la gestion calamiteuse des ressources publiques, « la complaisance » des bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux, quant à la destination des ressources publiques empruntées et à leur gestion manifestement frauduleuse, la « mainmise » des ONG internationales, sur le pouvoir décisionnel et de gestion effective des ressources publiques et la manipulation des gestionnaires publics, etc.
Passer de « l’avoir » à « l‘être ».
C’est dans le processus de la dépense publique, et ses modes d’allocation et de gestion, aux différents niveaux de la gestion publique que naissent les responsabilités et leur nature. Les voleurs d’âmes bénéficiant, en effet, d’une légalité et d’une légitimité financière qui couvrent leurs forfaits dans les méandres des procédures budgétaires et comptables.
La mauvaise gestion, autant que celle concertée, est aussi criminelle que la malversation financière. Et à ce niveau, le gestionnaire public, véreux, fait bien plus de victimes que le criminel de droit commun.
Il convient de centrer les finances publiques, notamment celles des entités publiques (Etat, collectivités publiques, établissements publics), non pas sur « l’avoir » mais sur « l’être » pour montrer que la matérialité même des finances publiques, que représente cet avoir, soit les deniers publics, est en fait fictive et que cet avoir n’est rien d’autres que des âmes confisquées à travers la confiscation de la vie des individus, agents économiques.
L’aune d’évaluation et de mesure des finances publiques, ne sera plus l’unité monétaire mais l’unité de vie. Cette dernière n’est que traduite en unités monétaires et prélevée d’autorité.
Cette approche des finances publiques les place dans une autre sphère d’analyse qui va accentuer leur dimension humaine et faire apparaitre davantage (et de façon dramatique) comment leur gestion relève de la gestion des âmes humaines, bien plus que du simple maniement de deniers.
Et donc, conséquemment, la mauvaise gestion des finances publiques (détournement de biens publics, concussion, malversation, corruption etc.) constitue non seulement un acte répréhensible et sanctionnable financièrement, mais davantage un acte qui porte atteinte à la vie des personnes. Ainsi un détournement de deniers publics n’est en fait rien d’autre que le détournement de tranches de vie et donc une confiscation du souffle de vie, de l’âme du contribuable.
Cette relation entre la contribution aux ressources publiques et la vie du contribuable porte la gestion des finances publiques à un niveau de répression bien plus élevé que celui préconisé par le droit financier ou par le droit pénal général à travers ses dispositions répressives du maniement des deniers publics.
La législation sur la criminalité financière publique doit, en tous points, être revue pour y introduire une répression assimilable à celle relative aux crimes de sang, aux séquestrations et à tous les actes portant atteinte de façon directe ou indirecte à la vie des personnes.
Deniers publics et vie humaine
Prenons l’exemple, très théorique, d’un individu, employé, qui reçoit un salaire mensuel de 300 unités monétaires (soit 3600 Unités monétaires par an). Si cet individu doit verser, annuellement, au titre de l’Impôt sur le Revenu (IR) 10% de son salaire annuel. Cela signifie qu’il versera à l’Etat chaque année, 360 unités monétaires - [(300 x 12 mois) x 10/100].
Du point de vue de l’approche classique des finances publiques, ces 360 Unités monétaires sont la contribution fiscale au titre d’un impôt direct (IR) déclaré ou retenu à la source. Elles sont enregistrées au titre des recettes fiscales de l’Etat et entrent dans le budget général, comme un flux financier, une masse monétaire, qui sera traduite budgétairement en recettes ordinaires et affectée à des dépenses ordinaires conformément aux dispositions de la loi organique du budget, pour les procédures de forme (élaboration/autorisation) et pour leur exécution (budgétaire et comptable) conformément à la loi sur la comptabilité publique et les lois sur la gestion et le contrôle des finances publiques.
Le plus important c’est que le montant prélevé va se fondre dans tous les autres prélèvements, obéir aux principes budgétaires et couvrir les charges de l’Etat. Ce montant n’est donc perçu que comme une recette, une valeur monétaire, plus ordinairement : de l’argent public.
Cette vision purement fiduciaire (ou scripturale) du prélèvement fiscal qui deviendra en aval une dépense publique, cache la véritable réalité de ce prélèvement et lui enlève une dimension beaucoup plus importante, qui n’est pas immédiatement perceptible, à savoir que ce prélèvement c’est de la vie.
En effet, les 360 unités monétaires prélevées peuvent être converties en mois et en jours de travail. Ainsi cet employé (payé 300 unités monétaires/mois à titre de salaire, donc 10 Unités monétaires /jour), versera donc à l’Etat 36 jours de travail par an ! C’est comme si ce travailleur a « versé » à l’Etat 36 jours de sa propre vie au titre de paiement de l’impôt.
Si l’on extrapole ce raisonnement à tous les impôts payés, directs (sur revenus et bénéfices de personnes physiques et de personnes morales) et indirects (TVA, droits multiples et divers, de la consommation à la production, aux successions….aux valeurs immobilières et mobilières … au capital etc.) versés par les individus à l’Etat, aux collectivités locales, aux établissement publics divers (établissements administratif/Industriel et commercial) et que l’on convertisse la valeur monétaire (unités monétaires) en valeur de vie (temps de vie), on peut, sans possibilité de contradiction, dire que les ressources publiques ne sont pas constituées de deniers publics mais de tranches de vie. Elles sont un prélèvement sur le souffle de l’individu, une ponction sur sa vie, une privation de liberté, une séquestration
La projection d’une telle approche des finances publiques sur le plan des droits humains, sur les libertés et même sur l’esclavage, la détention…etc, est immense. Elle permet avant tout de comprendre que les ressources de l’Etat ne sont en fait que du temps confisqué sur des vies humaines.
La vampirisation des finances publiques
Si, cependant, l’Etat prélève l’impôt, c’est en principe pour l’utiliser au profit de la collectivité. Ainsi on pourra dire que l’individu cède une tranche de sa vie pour permettre de vivre sa vie en bénéficiant de soins (santé publique), d’éducation (écoles, universités...) de sécurité (police, justice, armée) etc. fournis par l’Etat. L’individu serait donc un être qui consent à aliéner une tranche de sa vie en contrepartie d’une vie meilleure, d’un bien-être social.
Sachant, cependant, que le paiement de l’impôt n’est pas laissé au libre arbitre du contribuable mais est obligatoire et prélevé par voie d’autorité, on comprend donc que la tranche de vie versée à l’Etat est en fait ôtée et non pas consentie. Il y a là une forme de violence légitimée par les lois, qui fait que l’Etat « vampirise » ses sujets, comme toute créature de l’ombre qui volerait l’âme humaine.
Cette ponction serait cependant nécessaire, s’il ne devait s’agir que d’une saignée, au sens moyenâgeux de la pratique, qui permettrait à ceux qui la subissent de gagner en bien-être…. En somme, si les deniers publics, tranches de vies, devaient être gérés dans l’intérêt de ceux qui les ont fournis c’est-à-dire "prendre" une tranche de vie, chez chacun, pour que soit meilleure la vie de tous.
Hélas, les deniers publics ne sont pas toujours utilisés dans cet objectif. Ainsi, s’ils sont détournés et mal utilisés, le gestionnaire public peut alors être considéré comme un percepteur d’âmes confisquées. Car, comme démontré plus haut, chaque unité monétaire constitutive des ressources publiques est un souffle de vie.
Si l’on convertit les ressources budgétaires d’un budget donné de l’Etat pour une année, en temps de vie, on pourrait parler en années de vies au lieu d’unités monétaires. Ainsi si un budget d’un ministère est de 10 milliards d’unités monétaires, par exemple, il peut équivaloir (si on rapporte ces unités monétaires au temps de travail pour les gagner), à un budget en années de vies cédées par un nombre déterminé d’individus, de générations de contribuables.
Lorsqu’un ministère utilise les crédits de son budget, pour effectuer une dépense et aussi paradoxal que cela puisse être, il paye en années de vies. Il prélève sur des temps de vies, sur une part de l’existence d’êtres vivants. Rapporté au budget général de l’Etat et des autres entités publiques, cela peut équivaloir à des vies de populations et de générations entières.
Ainsi donc, lorsque le gestionnaire d'un ministère détourne le budget ou qu’il l’utilise de façon frauduleuse (concussion/malversation etc.), il étouffe le souffle des individus, à travers les finances publiques.
La corruption et la fraude sont autant d’actes de ponction, qui aspirent les ressources publiques et donc la vie des citoyens.
Ce livre basé sur cette approche et donnant des exemples concrets, vise à présenter les ressources publiques non plus comme des masses financières, mais comme des sommes de vies, un agrégat de tranches de vies cédées péniblement par l’effort et par le renoncement à la liberté et jette la lumière sur ce que sont véritablement ces ressources et pourquoi leur détournement et leur utilisation frauduleuse constituent un crime qui n’est pas seulement financier mais touche la vie humaine elle-même. Un vol de vies, un vol d’âmes.
La liaison deniers publics/vies humaines, démontre que toute infraction à la gestion et au maniement des deniers publics est une vampirisation du contribuable. Le vol des âmes. Aux décideurs publics d’en tirer conséquence pour le salut de leurs âmes. En rendant compte ici-bas…avant l’au-delà.
Tel est le sens de ce livre, appuyé sur la mal-gouvernance publique mauritanienne, qui, je l’espère, contribuera à rendre justice aux âmes que l’on sacrifie, encore aujourd’hui, sur l’autel de la gestion publique, et que si, par lui, une justice est rendue, permettre à celles, parties en souffrance, de reposer en paix.