La CENI sur la sellette
La Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) se retrouve au centre d’une vive polémique. Plusieurs voix se sont élevées pour protester contre ce qu’elles qualifient de « recrutements clientélistes » entachés d'irrégularités qui ont prévalu lors de la sélection du personnel de la CENI estimant que celle-ci a privilégié des « pratiques courantes » dans l’administration mauritanienne. « Le népotisme et le trafic d’influence ont fortement marqué les résultats du concours », ont déploré les protestataires.
La publication de la liste des chargés de mission, de conseillers techniques et directeurs a suscité de vives réactions. « Le moins qu'on puisse dire est qu'elle est loin de refléter la diversité de notre pays », s’indigne notamment l’Union des Forces de Progrès (UFP). Étant donné le rôle déterminant que la CENI doit jouer dans les prochains jours et semaines, ces nominations manifestement orientées et discriminatoires effectuées par son comité directeur suscitent, selon l’UFP, « beaucoup d'inquiétude et ne rassurent pas quant à son impartialité et à son sens des responsabilités. »
L'UFP déplore ces désignations qui « ne sont pas de nature à participer à la cohésion nationale » et demande à cette instance nationale de veiller à « appliquer rigoureusement les principes d'égalité, d'équité et de justice dans toutes ses décisions ». Ces récriminations interviennent après une première polémique dont la CENI aurait pu bien se passer relative à l’avis d’appel d’offres pour la location de véhicules attribués à deux agences. Celles-ci se partagent un demi-milliard d'ouguiyas.
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Ibrahima Sarr : « Les Négro-africains ne gèrent même plus les deniers publics pour pouvoir les détourner »
Pour le président de l’AJD/MR Ibrahima Moctar Sarr, « l'exclusion et l'oppression ont atteint un niveau inédit. Les Négro-africains sont dans la situation d’un mourant qui n’a plus faim ni soif ». S’adressant aux congressistes venus prendre part au premier congrès ordinaire de l’Alliance pour la Justice et la Démocratie/Mouvement pour la Rénovation (AJD/MR), leur leader a affirmé qu’on « reproche à l’AJD/MR de ne s’intéresser qu’à des questions relatives aux Negro-africains : l’exclusion, l’état-civil, le passif humanitaire et ses corolaires, le foncier dans la Vallée, etc. En vérité, nous estimons que les Négro-africains veulent avant tout être considérés comme des citoyens à part entière ».
« S’ils partagent avec la grande masse des autres mauritaniens le lot des déshérités du système », a-t-il en suivant soutenu, « ils sont les seuls à vivre l’exclusion au plan culturel voire médiatique, la déportation et le bannissement dans leur propre pays. […] Lorsque l’économie du pays est florissante, ils n’en bénéficient pas, l’école est le lieu où leur exclusion a été programmée. Pour preuve, la dernière loi sur l’éducation nationale où l’on prétend utiliser les langues nationales sans les officialiser : c’est un leurre. Les Négro-africains ne gèrent même plus les deniers publics pour pouvoir les détourner. […] Ils ne pensent pas aux plaisirs de la vie, ils veulent simplement ne pas mourir bêtement en tant qu’individu, en tant que communauté, en tant que peuple fort d’une histoire multiséculaire et qui veut sauvegarder son droit à la différence », a-t-il tonné.
Sarr a appelé la jeunesse du parti à prendre l'initiative, exprimant son regret de l'incapacité de celui-ci à réaliser toutes les aspirations et tous les objectifs fondés par les jeunes. Face à cet état de fait, Sarr a invité « les justes des autres communautés [à monter] en première ligne avec nous, comme le firent les blancs sud-africains contre l’Apartheid, les blancs américains contre la ségrégation raciale et certains blancs européens contre la colonisation ».
Et de déplorer dans la foulée n’avoir pas avoir réussi à régler le problème de la coexistence et à réunir les conditions propices à l’avènement d’un État démocratique où toutes les communautés puissent cohabiter. « Nous nous étions fixés comme objectifs la déconstruction du système en place et l’apurement du passif humanitaire pour susciter l’avènement d’un régime démocratique et égalitaire où tous les fils de ce pays auront les mêmes chances de s’épanouir. Nous ne nous sommes pas trompés d’objectifs mais », reconnaît-il, « les moyens et les méthodes que nous avons utilisés jusqu’ici ne sont pas efficaces. J’invite donc la jeunesse qui doit prendre la relève à être plus imaginative et plus audacieuse car il n’y a pas d’alternative entre exister et ne pas exister. […] Enfin, la situation actuelle dans le pays est caractérisée par la neutralisation de l'opposition et le rétrécissement des marges de liberté. »