Je viens de finir la lecture de ce témoignage avec une curieuse sensation de bien-être. De fait, ce livre se lit d’une traite, comme une histoire qu’on écoute avec beaucoup de plaisir.
D’abord, c’est l’histoire d’un optimisme obstiné. Malgré les multiples adversités et travers de toutes sortes qui jalonnent son parcours, l’auteur ne se départit jamais de sa volonté de bien faire, d’inscrire son action dans le sens du travail bien accompli.
Je retiens particulièrement, parmi une multitude d’autres anecdotes tout aussi expressives, l’histoire de cet étranger venu officiellement pour un travail de la plus haute importance à Nouadhibou et qui ne parvient pas à se faire délivrer un visa d’entrée à l’aéroport. Contournant les pesanteurs de l’administration, l’auteur n’hésite pas à s’envoler avec lui par le même vol UTA vers Dakar où, le temps d’un week-end, il lui obtient le visa, et les revoilà de retour lundi matin à Nouadhibou où le travail est effectué et l’objectif atteint.
Ce livre raconte ensuite l’histoire d’un patriotisme sincère, authentique, qui se vérifie en permanence dans les actes les plus ordinaires, loin des fanfaronnades et des postures politiques de bon aloi.
Ayant pour seul objectif l’accomplissement de l’intérêt général, l’auteur affiche un mépris royal pour les richesses terrestres et les biens de ce monde. La richesse dont il tire sa force, la seule richesse qui compte vraiment à ses yeux, il la possède déjà : c’est lorsque la conscience est tranquille avec le sentiment du devoir accompli.
Au gré de la très riche carrière de son auteur (grandes responsabilités dans l’administration territoriale et centrale, direction de grandes entreprises publiques, etc.), ce livre nous livre une grande sagesse : il ne faut jamais abdiquer face aux adversités.
Mais l’accomplissement individuel de l’auteur, qui se forge à mesure que le personnage avance dans l’âge, s’accompagne paradoxalement, autour de soi, d’un dépérissement collectif. Comme si le destin, par une dérision extrême, sanctionnait la sagesse individuelle qui se forme avec le temps par une montée corrélative de la bêtise collective.
L’auteur assiste, impuissant, à ce paradoxe étrange. D’où la profonde amertume qui se dégage parfois des dernières pages de son livre.
Mais l’auteur n’est pas dupe pour autant.
Lucide, il se garde bien de tomber dans le piège des discours moralisateurs.
Par des clins d’œil subtils, il continue à distiller avec charme et humour sa foi inébranlable dans les vertus du travail, de la rigueur et de l’honnêteté.
Au sortir de cette lecture, c’est ce message d’optimisme que je garde et qui m’enrichit.
Et je me dis que cette sensation de perte de valeurs, de retour en arrière, que je ressentais moi-même n’est pas nouvelle en réalité puisque mes aînés, bien avant moi, l’ont ressentie et décrite.
Et je me dis encore que ce « retour en arrière » ressenti n’est peut-être qu’une impression de perfectionniste et que l’essentiel est de garder son optimisme et sa foi dans les valeurs du travail, autrement dit, de bien assimiler le message de Abdallah Sidiya-Ebnou.
C’est ce qui explique peut-être cette sensation de bien-être agréablement apaisante que je ressens au sortir de cette lecture.
El Yezid YEZID