Les agriculteurs du département de M’Bagne ont enregistré, il y a quelques semaines, une invasion de leurs cultures par des bandes d’oiseaux granivores dont les plus redoutés sont les thiabi, de leur nom local. Du coup, les paysans ont décidé d’entamer les récoltes avant l’heure. Tous les épis mûrs sont systématiquement coupés et rangés aux greniers parce que tout simplement les thiabi ne les ’épargnent pas et les efforts seront concentrés sur le reste des cultures (petit mil et sorgho) en phase de maturation avancé et partant soulager, en partie, les chasseurs d’oiseaux. Les agricultures du village de M’Botto de la commune de Niabina Garlol ont été les premiers à entamer le travail. Selon l’un d’eux, rencontré de retour des champs, il ne faut pas laisser perdre une partie de la récolte, ces épis déjà mûrs ne peuvent pas attendre le reste en phase de maturation.
Chasser les oiseaux granivores est une épreuve très rude et redoutée des paysans, ces ennemis des cultures peuvent compromettre des récoltes et partant anéantir leur labeur. Le combat se fait à la fronde traditionnelle, les cris et les sons de différents ustensiles. Une battue menée de l’aurore au crépuscule par les femmes et les enfants. Les oiseaux guettaient tout relâchement des chasseurs pour commettre leur forfait. Dans cette zone, l’usage des dynamites pour détruire les dortoirs d’oiseaux est interdit depuis les années 89. Les paysans n’ont comme seule parade que leurs frondes ou leurs voix. Le gros mil et le riz dont la maturation se poursuit pourraient être eux aussi affectés par cette invasion des oiseaux granivores. Les paysans de M’Botto sont obligés de franchir chaque matin d’énormes étendues d’eau pour aller chasser les mange-mils qui infectent la rizière de Thieguelel, située sur la rive du fleuve (6km environ). Dans ces conditions, il est très difficile pour les paysans d’atteindre l’autosuffisance alimentaire préconisée par le gouvernement.
La pratique des cultures sous pluies (Diery) est en train de reprendre de plus belle, même si, il faut le signaler, les pratiques alimentaires évoluent, les paysans préfèrent beaucoup plus le riz et les pâtes aux variétés traditionnelles (mil, mais, haricot…). Elle avait été presque abandonnée à cause des sécheresses récurrentes, les agriculteurs avaient opté pour les cultures de décrues (Walo), jugées plus sûres et rentables. Mais le retour des pluies dues probablement aux changements climatiques, a poussé les paysans à renouer avec le Diery, ce qui n’exclut pas l’autre variété. Sans l’invasion des oiseaux granivores, les récoltes du Diery allaient être très abondantes dans les zones agricoles du sud du pays.
Par rapport aux cultures de décrue, il faut souligner que toutes les plaines du Walo sont inondées cette année. De partout, on aperçoit des étendues d’eau qui viennent, par endroit, tutoyer même certaines maisons bâties sur des zones inondables. Mais, depuis quelques jours, on note comme un reflux des eaux. Les yeux avertis parlent de stabilisation des eaux, non de retrait. Les plluies qui continuent à tomber dans la zone pourraient retarder la décrue. Du coup, certains agriculteurs commencent, malgré les étendues d’eau, à prospecter les champs du Walo. Comme on le sait dans la zone, dès que les eaux du fleuve amorcent leur retrait, les agriculteurs plantent quelques variétés de tomates, de pastèques et de patates etc.
Malgré les fortes inondations et la montée des eaux du fleuve, il n’y a pas de poissons d’eau douce. Le partage collectif des repas de midi (Tumbudu) dans les villages le montre aisément ; rares sont des plats avec du poisson d’eau douce, celui qu’on en voit sont de très petite taille. Les pêcheurs traditionnels espèrent en récolter beaucoup plus pendant le retrait des eaux, avec la construction des pièges traditionnels, appelés « M’Bargu », installés avec le retrait des eaux des plaines.