Dans un hadith rapporté par Ibn Omar, un homme vint demander au Prophète (PBL) de lui indiquer les actions que Dieu aime le mieux. « Les gens les plus aimés de Dieu », répondit Mohamed (PBL),« sont ceux qui sont les plus utiles aux autres et les actions qu’Il préfère sont celles qui participent à donner la joie à un musulman, soit en le délivrant d’une détresse, en remboursant une dette à sa place ou en soulageant sa faim. En fait, si je marche avec un frère en quelque affaire qui le préoccupe, cela m’est plus souhaitable que d’accomplir une retraite spirituelle en cette mosquée » [celle de Médine, ndr].
Comme le préconisent les préceptes de la religion, la Communauté doit rester une et indivisible pour ne laisser place à aucune dissension ni schisme. En ce cadre unifié, « l’appartenance individuelle ou collective se réalise uniquement en référence aux droits de Dieu (huqûq Allah) et non pas en vertu du groupe, du clan, de la tribu ou de l’individu. » C’est une communauté du « juste milieu », reposant sur l’équilibre, la justice et l’équité. Dans l’organisation de la société, l’islam tient à la fois compte des nécessités matérielles, de celles du cœur et de la raison. L’ordre social qu’il préconise se fonde sur la solidarité sociale et la distribution équitable de la richesse, à partir d’un certain nombre de règles sur la base desquelles la communauté devra être bâtie.
C’est ainsi qu’il admet le droit de propriété, reconnaît l’égalité de tous les êtres humains devant la richesse matérielle, à condition qu’elle ait été acquise honnêtement, ainsi que la différence des revenus ; il rejette le gaspillage et l’avarice, invite à une gestion rationnelle des biens dans l’intérêt de la Communauté, tolère l’existence d’une minorité de riches mais impose l’impôt légal (zakat), interdit les immorales pratiques d’exploitation, de thésaurisation et d’acquisition illicite de la richesse. Dans la même logique, il prône un partage équitable de celle-là qui doit profiter à tous ceux qui y ont contribué par le travail, son unique source licite. La richesse est cependant génératrice de corruption et doit être humanisée, organisée, légitimée pour remplir sa fonction sociale et morale.
La science au service de l’harmonie
Les progrès économiques, scientifiques et techniques ne peuvent donc jamais se réaliser au détriment de la dimension morale, spirituelle et sociale de la Communauté. Pour accomplir ces avancées et l’épanouissement auxquels celle-ci aspire, l’islam assume à la quête du savoir un rôle essentiel : il en fait même une obligation. Le Saint Coran dit ainsi : « Dieu élève de plusieurs rangs ceux d’entre vous qui ont la foi et ceux qui ont reçu la science. » Après s’être acquitté de ses obligations, le fidèle doit se lancer dans la recherche du savoir car, outre le fait que celui-ci constitue la meilleure adoration, il en tire lui-même profit et en fait profiter les autres.
« Lorsque le fils d’Adam meurt », disait encore le Prophète (PBL), « ses œuvres cessent, à l’exception de trois d’entre elles : une aumône dont les effets se perpétuent, une science dont on tire profit et un enfant vertueux qui prie en sa faveur » ; et, dans un autre hadith : « Transmettez de moi ne fût-ce qu’une parole » ; ou encore : « Allez chercher la science jusqu’en Chine s’il le faut. »
Le domaine du savoir est large : il regroupe les sciences religieuses, à la tête desquelles se situent la connaissance de Dieu et de Ses Attributs, les sciences du Coran, du Hadith, de la Sunna et du fiqh (jurisprudence islamique) ainsi que les sciences de la Charia (maqassid ou finalités de la Charia). Les savoirs profanes concernent les autres disciplines. Al Ghazali en a cité un certain nombre : la philosophie, les sciences de la Vie et de la Terre, les sciences humaines, les mathématiques, la physique, la chimie, les sciences économiques et sociales... Occupant une place prépondérante, deux autres types de savoir complètent cette énumération : le savoir-faire et le savoir-être. L’explicitation de l’apport de toutes ces disciplines à la civilisation islamique et, par son intermédiaire, aux autres civilisations demande de longs développements qui ne sauraient trouver place en cette note sommaire.
De la mesure en toute relation
En d’autres domaines comme la guerre et la paix, le règlement des conflits et les traités ; d’une manière plus générale : les relations internationales ; l’islam ne laisse pas la Communauté dans l’expectative. Il met à sa disposition tout un arsenal de lois et règlements pour affronter ces situations. En l’absence de dispositions explicites dans le Coran, la Sunna ou les traces des khalifes Bien-guidés, les savants ont le plus souvent recouru, pour régler ces problèmes, à l’ijma des ulémas (consensus unanime des savants) et au qiyas, un raisonnement par analogie ou déduction. Il s’y ajoute les fatwas, commentaires et jugements formulés par des érudits musulmans qui ont mis au point un Droit international islamique (siyar) pour réglementer les rapports avec les non-musulmans.
En cas de conflit, l’islam autorise l’autodéfense, tout en imposant des règles en temps de guerre afin d’en atténuer les effets. Le Saint Coran précise à ce sujet : « Combattez dans la voie de Dieu ceux qui vous combattent, sans jamais outrepasser les limites permises car Dieu n’aime pas ceux qui les transgressent. »
De fait, les actions et déclarations du Prophète (PBL) et des premiers khalifes illustrent la place importante accordée aux considérations humanitaires et le concept de djihad a donné lieu à plusieurs interprétations évolutives. L’une des plus récentes est celle formulée par Al Qardawi dans son ouvrage Fiqh al-Jihad : « L’islam ne justifie le combat qu’à l’encontre de ceux qui affrontent les musulmans, portent atteinte à leur honneur, cherchent à les troubler ou diviser d’un point de vue religieux, les chassent de chez eux, entravent la mission islamique (da’wa) et violent leur droit à protéger l’islam en apportant des preuves, des arguments et des clarifications ou tuent leurs missionnaires. »Selon un hadith rapporté par Anas ibn Malick cités par Al Bayhaghi et Ibn Al Khatib, le Prophète (PBL) s’adressa dans les termes suivants à des combattants revenus d’une bataille : « Vous êtes revenus du djihad mineur pour vous livrer au djihad majeur ». Et de présenter celui-ci comme la lutte contre les démons intérieurs altérant l’ego de chacun.
Un projet toujours d’actualité
Vue de l’intérieur et non pas à partir de quelque de ses manifestations extérieures revêtue de son manteau pour en donner une fausse image, l’islam est un système de valeurs reposant sur des principes immuables, équitables et justes dont l’application est salutaire pour l’Humanité. À partir de ces principes, le Prophète (PBL) et ses compagnons qui en ont compris le sens et la portée, ont pu faire émerger, d’un désert aride, une communauté forte et soudée dont les ramifications se sont étendues pour gagner les quatre coins du Monde ou presque. À cette fin, l’islam n’a pas eu besoin de secours extérieur : il tient en lui-même sa propre substance et énergie nécessaire. Ainsi conservé, Il demeure toujours le même. Toujours prêt à bâtir, comme par le passé, sur la base de son enseignement purifié et grâce à la bonne compréhension et la ferme volonté de ceux qui sont chargés de mettre ses objectifs en pratique, un modèle de société plus ou moins proche de celui enseigné par le Seigneur des mondes, Dieu l’Omniscient et Tout Miséricordieux.