Régulièrement, chaque fois que l’occasion se présente, les plus hautes autorités nationales prétendent que bien des choses ont été faites au profit des citoyens. C’est presqu’une lapalissade : d’une année sur l’autre, il faut bien, c’est évident, que quelque chose se fasse. Des indépendances à nos jours, chaque système a donc joué sa partition, dans la construction de la Mauritanie. La monnaie nationale, la révision des accords de défense et la nationalisation de la MIFERMA furent les actes les plus emblématiques de l’ère de feu Moktar ould Daddah. Les militaires de 1978 eurent le mérite de mettre fin une guerre injustifiable qui ruinait le pays. Le président Haidalla reste célèbre pour sa rigueur et sa volonté de promouvoir l’autorité de l’Etat. Maouiya ould Sid ‘Ahmed Taya eut sa campagne contre l’analphabétisme, son livre, son semblant de démocratie, ses infrastructures, son intransigeance sur la souveraineté nationale. Ely ould Mohamed Vall demeure, pour les fonctionnaires, l’artisan de le plus substantielle augmentation salariale jamais accordée, à ce jour, et, pour toute la Nation, le passeur de témoin du pouvoir, des militaires aux civils. Sidi ould Cheikh Abdallahi a consacré le principe de la séparation des pouvoirs et de la responsabilisation entière des ministres, à travers des lettres de mission. Mohamed ould Abdel Aziz a construit des goudrons, déclaré une guerre contre la gabegie, poursuivi la mise en place d’un état-civil fiable. Evidemment, la médaille a son revers qu’une seule bonne humeur ne suffirait pas à déclamer. En cette fin d’année 2014, l’administration nationale fonctionne encore très mal. Pas la peine d’évoquer, ici, ses problèmes structurels, très visibles au niveau de tous les départements ministériels. Le propos est juste de dénoncer des faits, vérifiables sur le terrain, par les responsables directs eux-mêmes. Au centre d’enrôlement d’El Mina, les usagers attendent au moins deux semaines pour obtenir une simple attestation d’acte de mariage. Selon les responsables, les formulaires n’existent tout simplement pas. Au centre de Tevragh Zeïna, la machine qui y pourvoie est en panne depuis vendredi. Et, selon l’ancien militaire reconverti en agent de sécurité, « elle en a encore pour longtemps, avant d’être réparée. Ne sommes-nous pas en Mauritanie ? ». A la Polyclinique, une vingtaine de personnes poireautent, devant le bureau du médecin-chef, depuis 7 heures ce lundi 29 décembre 2014, en l’attente d’un certificat médical. Selon des agents de l’établissement, c’est le médecin-chef qui s’en charge, depuis quelques temps, et, selon son habitude, il ne viendra pas avant dix heures. Froid très glacial, ce matin. A neuf heures, aucun responsable n’est encore là. Le premier qui arrive, c’est le technicien de la radio. Le médecin-chef ne viendra, finalement, qu’après dix heures passées. Pour récupérer le précieux document, la procédure consiste à payer deux cents ouguiyas. Une infirmière vous donnera un bout de papier manuscrit et cacheté, portant la mention 200 UM/payé, que vous présentez au médecin-chef qui vous donnera, en contrepartie, ledit certificat. Pas de formulaires. Machine en panne. Médecin absent. Exactement comme les moutons de l’autre. Ainsi va l’administration nationale dans la Mauritanie nouvelle.
Sneïba El Kory