Notre Mauritanie est malade. Elle est malade de ses mentalités. Notre société, comme toutes les sociétés humaines, a été façonnée par la géographie, l'histoire et le climat. Nous tendons à l'oublier souvent mais nous n’en vivons pas moins en bordure du plus grand désert chaud de la planète. Le mythique Sahara ! Notre peuple a été façonné par sa géographie et son climat. Dans le désert, le mode de vie le plus adéquat est la nomadisation. On ne se fixe pas à la terre. On ne gère pas les ressources du lieu : on épuise ces ressources, on salit l'endroit... Et quand c'est trop sale et que les pâturages sont épuisés, on s'en va ailleurs. Et on recommence la même chose!
Ce diagnostic est peut-être amer mais il est nécessaire. Si nous voulons construire un État moderne nous devons savoir d’où l'on vient! Quelle sont les briques de cet édifice? Avec quoi devons-nous travailler? Nous devons travailler avec un peuple divisé en classes sociales, en ethnies et en tribus. Nous devons travailler avec un peuple non habitué à la vie sédentaire et à ses contraintes. Une population jeune, certes, mais peu éduquée, en particulier en ce qui concerne les sciences modernes et la technologie. Nous devons bâtir notre État sur un sol aride et pauvre. Un sol qui ne permet l'agriculture que sur une infime partie du territoire national. Or nous entendons toujours dire et répéter « ad nauseam » que la Mauritanie est riche. Riche de ses minerais. Riche de ses côtes poissonneuses. Riche, ou en tous cas bientôt riche, de son gaz !
Le docteur Farouk Al-Kasim, cet irakien génie de la maîtrise publique du pétrole en Norvège, l'a dit mieux que quiconque. La richesse en ressources naturelles n'est pas une richesse. La vraie richesse, ce sont les femmes et les hommes, jeunes et moins jeunes, qui constituent une société. Et celle-ci ne constitue une richesse que si ses membres s'entendent entre eux, évitant les conflits ouverts ou larvés. Que si ses membres sont éduqués. Que si la justice et l'équité constituent le socle du vivre ensemble.
Léon Tolstoï a dit que toutes les familles heureuses se ressemblent, tandis que les malheureuses le sont chacune à sa façon. Il en va de même pour les sociétés. Toutes les sociétés développées, prospères et heureuses partagent un certain nombre de traits en commun. Le premier est qu'elles investissent dans « l'Homme » : son éducation, sa santé, son bien-être, le respect de sa personne et de ses biens. L'égalité entre les citoyens devant la force publique et devant la loi. L'égalité des chances et des opportunités pour tous.
Alors, de grâce, cesser de nous rabattre les oreilles avec les richesses naturelles de notre pays ! Des richesses que nous sommes incapables de valoriser nous-mêmes, faute de capital, bien sûr, mais aussi et surtout, faute de ressources humaines compétentes. Et qu'on ne nous dise pas que la SNIM démontre le contraire. La SNIM ne fait que broyer des « cailloux » et les exporter tels quels. La nature des marchés mondiaux est telle que c'est la valeur ajoutée qui compte. Il ne suffit pas d'exporter du minerai de fer brut, ou du cuivre brut, ou du poisson « brut ». Il faut transformer la matière première. Que cette matière première se trouve sur notre sol ou ailleurs est, à la limite, inconséquent.