Suite à la formation, en Janvier dernier, d'un bureau exécutif de l'Union Nationale du Patronat Mauritanien (UNPM) excluant totalement les femmes, et à la vague d'indignation soulevée par ce scandaleux déni d'existence de plus de la moitié de notre population, certains dirigeants de l'UNPM ont pris la décision de fonder une fédération dite des femmes, et de la coopter à la Confédération générale.
Censée réparer une grave injustice et une atteinte manifeste tant à la lettre qu'à l'esprit des lois en vigueur, notamment la Loi Fondamentale, ainsi qu'à nos traditions d'équité, de tolérance et de respect des femmes, la décision était en principe bienvenue. Mais force a été de constater, dès sa présentation, qu'elle était entachée de nombreux vices quasiment rédhibitoires.
En premier lieu, elle fut prise sans la moindre concertation avec les femmes qui sont, on l'a peut-être oublié, les premières concernées. En second lieu, la décision s'est basée sur une conception organisationnelle à l'évidence erronée et inusitée. Il est en effet inhabituel et illogique de fonder la distinction entre les regroupements à caractère syndical ou corporatiste sur d'autres critères que ceux relatifs aux domaines d'activités et aux identités professionnelles. Il est du reste facile de comprendre que les femmes et les hommes opérant dans le même secteur d'activités rencontrent les mêmes problèmes, font face aux mêmes difficultés, partagent les mêmes doléances et que ces opérateurs ne connaissent pas nécessairement les réalités d'un autre secteur d'activités.
Et si l'on allait au bout de la logique qui sous-tend la décision prise par la direction de l'UNPM, il s'en suivrait que nous aurions, par exemple, un syndicat des enseignants, un syndicat des médecins, un syndicat du personnel et employés de bureaux, un syndicat du personnel navigant aéronautique, un syndicat des avocats et...un syndicat des femmes !
Vices évidents
Cependant et nonobstant les vices évidents dont est entachée ladite décision, les femmes l'ont acceptée, exprimant leur disponibilité à sa réalisation conjointement avec la direction du Patronat, prouvant ainsi leur bonne volonté, leur esprit de responsabilités et leur souhait de faire prévaloir la recherche du consensus sur les postures conflictuelles qui ne servent ni le pays, ni les opérateurs économiques, ni le citoyen mauritanien. C'est dans ces dispositions d'esprit que les femmes ont bien voulu collaborer avec la direction du Patronat et se sont engagées dans le processus de fondation et gestion d'une fédération des femmes opérant dans les divers domaines économiques.
Mais combien fut grande leur déception quand il s'est avéré que la décision émanant de la direction de l'UNPM n'était, en réalité, qu'un stratagème déloyal délibérément planifié pour atteindre un double objectif :désamorcer à moindres frais pour eux la colère unanime provoquée par le déni d'existence des femmes mis en évidence lors de la constitution du nouveau bureau exécutif de l'organisation patronale, et renforcer les positions d'une coterie particulière au sein de l'UNMP par la cooptation d'une « fédération féminine » qu'ils n'imaginent pas être autre chose qu'une simple marionnette entre leurs mains.
Fortement empreintes d'hypocrisie et de cynisme, ces velléités se sont clairement révélées dans de multiples agissements dont, en particulier, le refus par les responsables de l'UNPM de toute concertation avec les femmes dans la préparation du congrès constitutif de la nouvelle fédération, pourtant dite des femmes; l'entêtement de ces mêmes responsables dans leur refus à définir, conjointement avec les femmes, les modalités essentielles comme les conditions d'adhésion, la composition des dossiers, la disponibilisation des moyens ; l'apparition soudaine de « femmes d'affaires » totalement inconnues et leur adhésion à la fédération en cours de fondation dans des conditions pour le moins douteuses; l'absence de contrôle et de critères d'authentification des pièces du dossier, contrôle pourtant indispensable pour conjurer les velléités de complaisance et de fraude ; la manipulation à volonté du calendrier initialement retenu, se manifestant dans le report injustifié de la date de tenue du congrès constitutif de la fédération, ainsi que dans la prolongation tout aussi injustifiée des délais d'adhésion... C'est ainsi qu’initialement fixée au 28 Février 2022, la date-butoir pour la fin des adhésions fut curieusement reportée sans justification aucune et c'est ainsi que la date de tenue du congrès initialement prévue pour les 4 et du 5 Février a été reportée dans les mêmes conditions d'opacité...
Autant d'agissements qui violent ouvertement les lois et règlements en vigueur, sapent la confiance et ôtent toute légitimité et toute crédibilité à la prétendue fédération des femmes...Face à ces manœuvres et ruses malsaines visant à annihiler la ferme et légitime volonté des femmes d'accéder effectivement à leurs droits et de contribuer pleinement à l'œuvre collective d'édification nationale pour l'émergence d'une Mauritanie développée, juste et épanouie, nous, femmes organisées au sein de l'Union Mauritanienne des Femmes Chefs d'Entreprises et Commerçantes (UMAFEC), dénonçons les procédés et les manœuvres par lesquels une coterie tente de nous exclure totalement ou de nous transformer en poupées marionnettes; exigeons une concertation réelle et transparente dans toutes les prises de mesures ou de décisions qui nous concernent, en particulier dans la fondation et la gestion de la fédération dite des femmes; démissionnons individuellement et collectivement de toute structure en rapport avec la fédération et retirons nos candidatures à quelque responsabilité que ce soit en son sein ;considérons nulles et non-avenues toute mesure ou décision prise en notre nom et néanmoins à notre insu ;lançons un appel aux autorités nationales à tous les niveaux pour qu'elles interviennent et mettent un terme aux dérapages et à l'arbitraire dont sont victimes les femmes opératrices économiques, qui n'aspirent qu'à être utiles et à exercer leur métier dans la dignité et l'équité.
Pour l'UMAFEC, sa présidente Lemmat mint Mégueya