« La presse se meurt, la presse est morte ». Combien de fois aura-t-on entendu cette litanie ? Depuis quelques années, en effet, la presse privée est au bord du gouffre. Si elle n’y est pas déjà. À la baisse des ventes – un phénomène mondial dû à la concurrence d’Internet –, l’absence d’une régie publicitaire capable de lui garantir un minimum de revenus pour faire face à des charges incompressibles, l’insignifiance du fonds d’aide alloué par l’État, la floraison de journaux-cartables encouragée par le pouvoir pour discréditer encore plus ladite presse libre, s’est ajoutée la décision inique concoctée par les âmes damnées du régime d’Ould Abdel Aziz – Ould Djay et Ould Hademine, pour ne pas les nommer – d’interdire à toutes les structures publiques et parapubliques de souscrire le moindre abonnement à celle-là. Une particulièrement cynique façon de les pousser à mettre la clé sous la porte. Et ils ont failli réussir.
N’eût été la volonté de fer affichée par les journaux les plus anciens de son paysage médiatique et grâce au soutien de quelques mécènes, notre pays allait se retrouver sans journaux indépendants, après avoir occupé plusieurs années de suite la première place du classement RSF pour la liberté de presse.
En quoi le changement de régime a-t-il modifié la situation ? En pas grand-chose, serait-on tenté de dire. Certes la presse n’est plus diabolisée mais elle est toujours exclue des déplacements présidentiels et le Fonds d’aide, sur lequel elle fondait beaucoup d’espoirs, n’a pas dérogé à la règle au cours des deux dernières années. 2021 sera-t-elle meilleure ? En tout état de cause, ce ne sont pas les bonnes intentions qui manquent, au moins en paroles. Les actes ne valent que par leur intention, me direz-vous. Bien sûr. Mais que valent les intentions sans les actes ? À paver l’enfer, pour les meilleures d’entre elles ? Cela dit, 2021 n’est pas terminée : il lui reste encore quatre-vingt jours pour boucler son compte. Et l’on sera à mi-parcours du présent mandat présidentiel…
Ahmed Ould Cheikh