Depuis le malheureux coup d’Etat contre Sidi Ould Cheikh Abdallahi et sa honteuse gestion par la communauté internationale, nous avons appris ce que signifie « le retour à l’ordre constitutionnel », que la CEDEAO et l’UA brandissent contre les changements anticonstitutionnels dans nos fragiles Etats d’Afrique, lorsqu’ils sont surtout et seulement conduits par des militaires. Il ne s’agit jamais de revenir à l’ordre constitutionnel qui prévalait avant le coup de force. C’est-à-dire que le régime antérieur, en tout cas son président, est définitivement et à jamais écarté de l’exercice du pouvoir.
En Mauritanie, on sait qu’il a pris la forme de pressions exercées sur le président déchu pour obtenir sa démission et ouvrir ainsi la voie à une «élection légale » à laquelle pourra se présenter le chef de file des putschistes, après avoir renoncé- nominalement- à sa fonction militaire.
Au Mali et au Tchad, où les processus de transition sont en cours, il est question d’obtenir l’engagement des deux juntes de s’engager formellement pour former un gouvernement civil ou mixte, qui aura la charge d’organiser des élections présidentielles, d’où les auteurs du coup d’Etat seront exclus.
Mais certains intellectuels pensent que, dans ces deux pays, ce sera au final, même si officiellement on soutient le contraire, le « paradigme » mauritanien qui prévaudra. Ils estiment que cela s’inscrit dans une nouvelle dynamique imposée par la déstabilisation de nos Etats sahéliens, confrontés au terrorisme islamiste et au banditisme organisé autour du trafic de la drogue et de toutes sortes de contrebandes. Des pouvoirs militaires forts seraient, d’après eux, plus efficaces pour combattre ces différentes menaces et susciteraient davantage plus de confiance auprès de la communauté internationale et chez la majorité des peuples de la sous-région.
Ce « nouveau paradigme politico- sécuritaire » rendrait l’esprit de la Baule caduc, puisqu’il aurait « fait son temps » et les revendications démocratiques seraient renvoyés aux calendes grecques.
Pourtant, il n’est pas démontré que les régimes militaires aient géré avec plus d’efficacité que les civils les pays en état de guerre. Les militaires, dans les Etats modernes s’occupent de la sécurité des unités politiques, sous les ordres, dans une République démocratique, d’un pouvoir civil légalement et régulièrement élu.
En tout cas, la démocratie, n’est ni un don du ciel, encore moins celui de l’histoire. Autrement dit aucune nécessité divine ou historique ne nous oblige de passer par l’étape du « dictateur libérateur » pour réaliser notre vocation démocratique. La démocratie est une conquête intellectuelle et politique, pour laquelle les hommes ont versé beaucoup de sang et de sueur. C’est l’idéal qui transforme le réel, lequel, en tant que tel, ne satisfait pas toujours toutes les aspirations de l’homme.
R’chid Ould Mohamed