La scène politiquemauritanienne a connu en moins de vingt-cinq ans cinq dialogues politiques prenant fin tous dans une ambiance conviviale bon enfant mettant tout en rose ayant pour résultats perceptibles sur le terrain quelques villas, quelques grosses cylindrées et quelque têtes de bétail promptement acquis par les principaux meneurs de dialogues, alors que les problèmes économiques et sociaux continuent de peser lourd sur le vécu quotidien du citoyen. Sitôt que la sécheresse des comptes se fait sentir, les mêmes voix d'hier se lèvent pour convaincre l'opinion nationale de l'extrême nécessité et l'urgence d'un nouveau dialogue politique plus politique que le précédent pour aboutir toujours aux mêmes résultats. Il s'agit d'un cycle vicieux de dialogues politiques qui revêt un caractère national sans jamais solutionner le moindre problème national ou régional. Aujourd'hui, il nous faut plutôt un dialogue exclusivement économique, un forum économique dirigé par nos éminents économistes et experts en vue de mettre sur pied une feuille de route ou une stratégie économique qui apporte des solutions adéquates pour tirer notre économie de la léthargie dans laquelle elle se trouve depuis plusieurs années. Selon la maxime l'économie sauve la politique, là où il y a prospérité économique, les gens n'ont pas le temps de la politique, là plutôt où l'économie a des difficultés, les gens font de la politique leur gagne-pain. La ruée vers la politique déprime la politique, fragilise l'économie et détruit les valeurs de la société.
Si l'engouement politique des mauritaniens est orienté vers l'économie, ils auront du boulot puisque le développement économique et social du pays est conditionné par l'engagement résolu de tous dans le sens de la transformation graduelle de nos ressources pour la création de la valeur ajoutée et de la richesse, le cas échéant d'autres continuent à en profiter, à moindre coût.
Mais tant que la gestion des ressources humaines est marquée par l'absence de critères objectifs dans le recrutement et les promotions, tant que les interventions peuvent conférer le titre de diplomate ou de haut responsable dans une institution publique à des personnes de la rue avec ou sans diplômes, tant que les fonctionnaires qui ne font la politique partisane ou qui n'ont pas d' appui sont privés des nominations, quelle que soit leur compétence et tant que la transhumance des cadres de leur département d'origine vers les départements techniques qui ne correspondent pas à leur profil existe, il ne faut pas s'attendre à une performance économique.
Ce genre de gestion des ressources humaines a fait de notre administration un fourre-tout inactif dont les bureaux servent d'arbres à palabre où les gens vaquent non pas à leur travail, mais plutôt à des discussions marathons sur les mêmes sujets, l'appartenance tribale ou régional de tel ou tel responsable et son parcours professionnel et les rumeurs. Les vedettes de ces discutions sont toujours les enseignants et les sans diplômes.
Il est temps, surtout en cette période de rapprochement entre les acteurs politiques de mettre l'éthique dans la gestion des ressources humaines par l'application stricte de l'adéquation profil emploi en vue de faire de notre administration un véritable outil de développement capable de relever les énormes défis pour pouvoir assurer un développement économique harmonieux et inclusif, seule voie d'immunité contre les dérives sociaux.
Mohamed Ahmed Cheikh
Ingénieur de pêche