Saisissantes, les images parlent d’elles-mêmes. Saisissantes... et désespérantes, pour reprendre le qualificatif du professeur Lô Gourmo. La dernière visite du président de la République au Hodh Charghi a dévoilé une nouvelle fois le visage hideux d’un pays qui n’arrive toujours pas à se départir du carcan du tribalisme, dans toute sa laideur. Des banderoles affichant ouvertement les noms des tribus et/ou des familles, le long du parcours présidentiel souhaitaient la bienvenue à l’illustre hôte. Alors qu’on croyait la tribu, cette entité abstraite, en net recul, là voilà qui s’affiche à nouveau sans vergogne. Pour faire valoir ses valeurs morales, dans une saine compétition avec ses consœurs ? Loin de là, hélas ! Comme le dit si bien Lô Gourmo, la tribu est ici réduite à « un lobby, un groupe de pression, une force de frappe qui dérègle le fonctionnement normal de l'État et alimente les mécanismes des exclusions (des autres "tribus", ethnies et races) autant que ceux des usurpations (d'argent, de compétences, de titres, etc.) ». Est-ce de n’avoir su lui donner un statut cohérent et lisible, dans le développement de la modernité, l’abandonnant ainsi à ses pires dévoiements ? Ou de n’avoir pu lui substituer un contrat social assez conséquent pour convaincre les porteurs de pancartes et de banderoles de l’attrape-nigauds où les confinent les sangsues de la chose publique ? Toujours est-il qu’en cette période de vaches faméliques, la tribu a pignon sur rue. Et il y a sans doute mieux à faire qu’à jouer aux Cassandres ou aux autruches…
Ahmed ould Cheikh