Dès sa prise de fonction, le nouveau gouvernement avait promis une réforme totale du secteur éducatif. Et de scinder, tout d’abord, le ministère de l'Éducation : fondamental et réforme du secteur en un département ; secondaire, technique et professionnel en un second. Les deux ministres passèrent quelques mois à travailler ensemble, quasiment dans le même bureau. Chacun élabora un organigramme en bonne et du forme. On attendait le début de l'année 2020 pour la séparation effective des deux ministères. On s'aperçut avec le temps de l'impossibilité d’une telle manœuvre. Deux expériences en ce sens – l'une en 2005 et la seconde en 2011 – n’avaient-elles pas déjà échoué ?
Vint la pandémie Covid 19 qui perturba nombre de programmes. Entretemps, le ministre de l'Enseignement secondaire, Melaïnine ould Eyih, avait transféré son cabinet dans un immeuble de Tevragh Zeïna conventionné au frais du contribuable... Vint ensuite la démission du gouvernement et la réunion des deux ministères confiés à ce même Ould Eyih. Rappelons que celui-ci avait passé des dizaines d'années à la direction d'un programme au ministère de l'Enseignement technique et professionnel, avant de partir travailler à l’étranger dans un bureau d'études.
Les deux organigrammes dont l'élaboration avait coûté une bagatelle furent tout simplement rejetés. En avant donc pour un nouveau ! Celui-ci a fondé de nouvelles directions générales englobant plusieurs anciennes sous leur direction et dissolvant un certain nombre de l'ancien organigramme. Mais, si le ministre déclare dans les media que la réforme est déjà acquise à plus de 70%, c’est pourtant toujours le statu quo sur le terrain. La seule nouveauté, c'est la plateforme du fameux Momme : elle n'a malheureusement fait qu'entraver le travail du ministère. Ce jeune homme titulaire d'un petit diplôme en informatique gère désormais tout le secteur. On lui a même donné le sobriquet de « ministre-bis ». Les directeurs de l'Enseignement secondaire et du Fondamental ainsi que les chefs de service déclarent à qui veut les entendre qu'ils n'ont plus de compétence depuis l'arrivée de « l’agent de bureau d'études », une promotion que les mauvaises langues attribuent à une « grande personnalité ».
À ce jour, aucune liste d'élèves n'a été envoyée aux établissements scolaires. C’était auparavant accompli dès Octobre... Aucun transfert d'élèves n'a pu s’effectuer car Momme accapare la base de données naguère en les seules mains du service concerné. Les rares listes qu'il a déjà envoyées sont truffées d'erreurs : « Les élèves de quatrième s’y voient inscrits en deuxième année », se plaint un chef d'établissement. Et la grogne s’étend aux enseignants qui menacent d'arrêter les cours. S’il reste irrésolu, le problème des prestataires de services sera lui aussi délicat...
Nominations globalement décevantes
Quant aux dernières nominations, c’est la grande déception qui prévaut pour la majeure partie des cadres et techniciens du ministère. D’autant plus grande qu’ils avaient entretenu grand espoir, croyant au changement qui mettrait en avant « l'homme qu'il faut à la place qu’il faut ». Plusieurs d'entre eux attendaient depuis quinze ans d'être promus. Des dizaines de professeurs et autres diplômés accomplissant de lourdes tâches au ministère sont ainsi plus que déçus : découragés. Après « la décennie infernale », ils croyaient voir le bout du tunnel avec le nouveau régime et sa politique d’équité et de justice, affichée en cheval de bataille.
Les voilà rendus à qualifier les nouvelles nominations de « clientélistes politiques », d'un côté, et « tribalistes régionalistes », de l’autre. Ils y voient partout les marques du parti au pouvoir et de personnes haut placées. Selon eux, chacune des parties déjà citées a obtenu son quota, en plus du ministre, du leader du mouvement IRA, des syndicats de l'éducation et autres. Pourtant certaines de ces nominations sont qualifiées par les observateurs de logiques. Premier en ce classement, le conseiller chargé de la communication. On y nommait naguère des enseignants unilingues, à capacité de communication donc réduite. Le nouveau promu, El Kory ould Sneïba, est un inspecteur de l'Enseignement fondamental bilingue, expérimenté et brillant écrivain-journaliste. La promotion de Betta mint Cheikh au poste de directrice générale de la Réforme et de la rétrospective est ordinairement considérée comme méritée. Mohamed ould El Yass et Mohamedou ould Abderrahmane sont aussi des cadres compétents, affirme-t-on.
Les nominations sont divisées en trois catégories. Tout d’abord, les confirmations en poste : à l’instar des conseillers Cheikh Ahmed ould Elban, Mohammed Mahmoud Yahya, Isselmou Rabah, Soumaré, Mohamed Cheikhna, Idoumou, Ahmed Mezid, Ahmed Ba et Mohamed Mona ; des chargés de mission Sidi Mohamed Sidi, Zeïnabou Abderrahmane (parente du ministre alors qu'ils ne sont pas de la même région), Mariem Sidina et Fatimetou Cheikh Samba ; des directeurs Sid'Ahmed ould Eyouh ou Vali Nagi Dom.
En deux, les mutations, voire dégradations : Dacia Bamba, directeur de l’Enseignement fondamental ; Mohamed Mahmoud Essiadi, ancien IGEN dont les inspecteurs ne regrettent guère le limogeage ; Ba Dadié, ex-DRH que certains qualifient de ‘’poids mort’’. Les voilà tous deux chargés de mission. Kehle Agjeil et Mohamed ould Mohamed Louleid sont passés de chargés de mission à conseillers. Ex-inspecteur général du Secondaire, Mohamed ould Mohamed Denebja se retrouve conseiller. Anciennement conseillers, Elemine Khattri et Mahmouden Ghadi sont devenus directeurs généraux adjoints. Lui aussi ex-conseiller, Cheikh Sidi Mohamed est devenu directeur des Réformes. Mohamed Lemine En Weli, ancien DREN est relégué au rang de directeur adjoint de l'ENI d'Aïoun.
Enfin, les promotions : Hamady Lehbous, militant IRA et enseignant, se voit chargé de mission ; Mohamed Mahmoud Mohamed Lemine, maître d'éducation physique natif de Boumdeïd, est promu conseiller ; tout comme Mahfoud ould Abderrahmane, professeur au CSET ; fédéral de l’UPR, Salek ould Jiddou est désigné directeur général des Ressources ; ex-formateur à l'ENI, Traoré Mody devient directeur-adjoint.
Ben Abdalla