À la Jedida, il y avait aussi la famille d’Ehel Pedro, un vieux maçon espagnol venu s’installer définitivement à Aleg lors du règne du roi Franco. Musulman accompli, Abderrahmane Pedro faisait partie de l’équipe qui construisit des dizaines de ponts dans les wilayas du Brakna et du Tagant. La vieille Power de Pedro était connue de tous les Alégois. Dans ses moments libres, le vieil espagnol reconverti mauritanien s’adonnait aux activités ordinaires des gens de son terroir. Son fils aîné Hademine, qui deviendra, adulte, officier de la Garde nationale, entra à l’école en l’année scolaire 72/73 le même jour que moi. Il y avait aussi la famille de Mama Cissé, un vieux chauffeur aux origines soninkées et au hassaniya approximatif, dont deux des fils, Maloum et feu Daouda Cissé étaient de notre génération. À ceux-là s’ajoutent les familles Traoré (Ehel Magha Traoré et Ehel Bakri Traoré) du quartier Liberté : feu Magha Traoré était un garde qui servit beaucoup à l’Est, surtout à Timbédra ; feu Bakary Traoré, le père de Moustapha et Mohamed – Hamet pour les intimes – était un burkinabé né à Ouagadougou et devenu pur alégois. Un homme très calme, extraordinairement courtois et jovial. La famille War, autour des frères feus Thierno Silèye et Adama War, originaires de Bababé, était une des familles les plus originales de la Jedida. Avec les Ehel Lopez dont nous admirions tous les tenues impeccables et le chapeau toujours très bien ajusté sur la tête de leur père. Je me souviens particulièrement de trois de ses enfants : Dewfa Lopez, futur haut responsable de la sécurité civile ; Mohamed Lopez, plus tard adjudant-chef de la Garde et international de football, et Sidi Lopez qui accomplit avec moi ses trois années de collège entre 1972 et 1975 à Aleg, sous l’encadrement des professeurs Koné Saidou Fansory, en histoire-géographie ; Limam ould Mohamed Vall, en mathématiques ; Mohamed M’barek, en arabe ; Birame ould Ebeïdy, en sciences naturelles ; monsieur Sy Alpha, en éducation physique ; Sow Pathé (malheureusement décédé aux États-Unis), en français, et de Mohamed ould Sidi Oumar, professeur de français reconverti en instructeur de morale civique et religieuse (IMCR). Dirigé par Sow Mamadou, un professeur de technologie originaire de Maghama, l’établissement ne comptait que six classes, flanquées de quelques bureaux administratifs. La ville d’Aleg était ainsi un lieu de rencontre où vivaient en toute symbiose des hommes et des femmes venus de tous les horizons, nationaux et étrangers. Certaines familles originaires d’autres régions du pays sont considérées comme authentiquement alégoises. C’est le cas, parmi tant d’autres, des Ehel Mokhtar ould Khoubah, des Ehel Khalil, Ehel Beibacar, Ehel Boubou, Ehel Amad Djiby – originaire de Touldé Doubango et vieil employé du dispensaire – Mbèye Diangou (Ndiong), employé lui aussi du dispensaire et originaire de Boghé, Ehel Bass, Ehel Bah Modi, Ehel Mohamed Bachir Bâ, alias Modi Chari’a car leur père était un érudit en sciences islamiques… Pendant les grandes vacances, le retour de beaucoup de ses fils étudiants à Rosso, Kaédi ou Nouakchott, animait singulièrement la ville. Certaines familles revenaient entièrement pour l’hivernage. La scène sportive prenait vigueur avec les tournois de football et d’athlétisme. Enfant, je connus ainsi de fameux sportifs, comme feu Sabar ould Sleimane, très petit de taille mais grand virtuose de la balle au panier, Sy Baba, Petit Soumaré de Boghé, Dicko Mohamed dit Hugue (passe, non, je dribble), Kalala de Rosso, les Aboubecrine ould Oumarou et Abdallahi ould Bouhoum de Boutilimit, en plus de nos grands frères d’Aleg qui étaient loin d’être en reste par leur génie et leur polyvalence, à l’instar, entre autres, de Birama Dembélé, Moustapha ould Mohamed Vall, feu Diallo Mohamed Lemine, dit Djigo, ou son frère, l’emblématique gardien de but feu Hacen Diallo… ou encore les grands volleyeurs feu Mohamed Mahmoud ould M’Reizig, Bah ould Ndergui et tant d’autres. J’ai encore en souvenir les dures empoignades entre les équipes d’Aleg, Rosso, Boghé ou Kaédi, en football, basketball et athlétisme. Mes amis ne doivent certainement pas avoir oublié Mogbé, cet arbitre de basket béninois tout petit : peine 1m 60 ; qui jugeait les matchs, haut perché sur un fût avec son sifflet accroché au cou. Les vacances, c’était aussi le temps des séances théâtrales de l’extraordinaire animateur Yahya ould Youssouf, un grand artiste qui forma beaucoup de générations. Les techniques des ballets, chœurs et autres pièces de théâtre n’avaient aucun secret pour lui. Les répétitions se déroulaient à la Maison des jeunes ou dans une des écoles de la ville. La troupe était constituée de garçons et filles accourus de tous les quartiers. Le maestro Yahya ould Youssouf les préparait pour participer aux diverses compétitions interrégionales ou nationales. C’est à ce titre que nous nous présentâmes au Compact de Kaédi en 1982, avec une troupe composée d’acteurs d’âge très varié. Il y avait, par exemple, Mohamed Yahya ould M’reizig, aujourd’hui professeur, et ses amis Saidou Oumar et Alioune ould Lekhzine, dit Alwa ; l’actuel directeur régional de l’Éducation du Tagant, Mohamed Lemine ould Abdel Kérim ould Tey, par ailleurs excellent gardien de buts ; Brahim ould Ahmed, qui devint docteur et aujourd’hui directeur adjoint du Centre national d’hépato-virologie, M’hani mint Samba, Toutou mint Vih El Barke et son frère Ndiaye ; Zeineb Dembélé, Feitita mint Mohamed, Zeineb mint Belkhair… (À suivre).
Soucieux de moderniser Nouakchott et d’en faire une ville un tant soit peu viable, le gouvernement a décidé de débloquer cinquante milliards d’ouguiyas MRO. Plusieurs départements ministériels sont concernés par cette mise à niveau dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle a tardé.