En gestation depuis quelque temps, un dialogue social pourrait se tenir sous peu, à l’initiative du gouvernement. Le président de la République, qui a réussi à obtenir un consensus autour de sa gouvernance avait laissé entendre, au cours des audiences accordés aux acteurs politiques de l’opposition et de la majorité, que le dialogue politique qu’ils réclamaient tous n’était pas à l’ordre du jour, du moins sous son format jusque-là connu. Il souhaitait des concertations au Palais et des palabres, ce qui avaient poussé certains de ses invités à désapprouver une telle approche pour débattre de questions aussi graves et toujours pendantes que sont l’unité nationale (cohabitation et passif humanitaire) et l’esclavage, la gestion et le partage équitables des ressources du pays, la discrimination positive, etc. Des thèmes chassés et rechassés depuis l’Indépendance, exacerbés surtout sous le magistère d’Ould Taya avec des arrestations, crimes de sang et déportations à caractère ethnique. Le vivre ensemble, dans un pays à 100% musulman, avait pris de sérieuses balafres, sans que les dirigeants n’aient pour autant le courage d’en débattre sérieusement. Les séminaires, ateliers et conférences et forums organisés par les partis politiques de la majorité sont tous passés à côté de l’essentiel… et la volonté politique avec. Le dialogue politique inclusif attendait et attend… Attendra ?
Le président Ghazwani avait pourtant promis à plusieurs acteurs décidés à le soutenir pendant la présidentielle, comme le président d’APP Messaoud ould Boulkheïr, l’organisation d’un tel dialogue pour débattre surtout des questions parasitant l’unité nationale et le vivre ensemble. Mais, en dépit des appels répétés à sa tenue, le président Ghazwani, engagé dans une rude bataille contre son prédécesseur et confident pendant dix ans, a choisi de concentrer d’abord ses efforts sur ce dernier front ouvert en Novembre 2019 et consolider ainsi son pouvoir ; puis sur celui de la pandémie COVID 19. Le dialogue politique ne semblait quasiment plus l’intéresser. Il aura fallu attendre le mois d’Août dernier et l’organisation, par l’UPR, principal parti de la majorité présidentielle, d’un atelier portant sur le « la cohésion, le renforcement de l’unité nationale et l’éradication des séquelles de l’esclavage » pour que des cadres dudit parti remettent sur le tapis ces questions à l’ordre du jour. Un de ses hauts responsables suggérait la tenue d’un dialogue franc et inclusif pour parvenir à une « plateforme de convergences » sur toutes ces questions. Il faut dépasser, disait-il en substance avec d’autres, le stade des conciliabules qui ramènent le pays en arrière, au lieu de nous faire avancer. Plus récemment, lors d’un débat sur le bilan du gouvernement organisé par la TVM, à l’occasion de la célébration de la Fête du 28 Novembre, un autre responsable du parti réitérait la nécessité d’un dialogue « national » pour débattre de l’unité du pays. Réelle volonté politique de régler la question ? Avec un dialogue « social »en place de son homologue politique ? Serait-ce la panacée ?
De toutes les façons, la tenue d’un dialogue politique inclusif est plus que nécessaire pour le pays. Le mal du vivre ensemble est réel et le pouvoir serait bien inspiré de profiter du consensus qui prévaut depuis le départ d’Ould Abdel Aziz. Il ne doit pas craindre une quelconque remise en cause de sa légitimité mais penser plutôt à la renforcer, avec des journées nationales de concertations, comme celles organisées par le CMJD au lendemain du coup d’État perpétré, en Août 2005, contre Ould Taya. Des recommandations pertinentes avaient été formulées mais beaucoup restèrent dans les tiroirs et la tentative du président élu Sidi ould Cheikh Abdallahi d’en mettre certaines en œuvre lui coûta son fauteuil, moins de deux ans après son investiture.
Nous apprenons cependant que l’UPR, dont le président avait convoqué ses adjoints il y a quelques jours pour les entretenir de ce dialogue social, a démenti par communiqué les informations données par la presse évoquant cette information. À en croire ce communiqué, elles sont « dénuées de tout fondement ». Est-ce à dire que la réunion des hauts responsables de ce parti n’a pas évoqué untel dialogue ou en aurait discuté sans en référer au Palais ? Bref, à qui donc profite le « crime » ?
Dalay Lam