Rendre un dernier hommage posthume à une personnalité politique ou de surcroit à un compagnon de lutte comme Moustapha Ould Bedreddine est un acte certes louable, en l’occurrence, de la part de Mohamed Yehdhih Ould Breideleil et Moussa Fall.
Entre gens convenables, les hommages ne sont pas de nature à provoquer beaucoup de contestations.
Mais quand on utilise ces hommages pour distiller des attaques à l’encontre du défunt Président Moktar Ould Daddah, alors là, c’est autre chose.
En effet dans Le Calame du 16 décembre 2020, sous le titre, « Souvenirs de Moustapha O. Bedreddine », Mohamed Yehdhih rappelle entre autres, une ancienne émission télévisée de son feu camarade dans laquelle celui-ci dénigrait systématiquement Moktar Ould Daddah.
Je me rappelle justement, ce jour là, avoir reproché dans mon for intérieur, à cet ancien vétéran de la lutte patriotique dans son pays, ces qualifications outrancières à l’égard du 1er et grand bâtisseur de la Mauritanie.
« Moktar Ould DADDAH est un agent du colonialisme, installé au pouvoir par la France. Moktar Ould Daddah était sans doute habile, mais ce n’est pas une qualité morale etc… ».
Par contre je salue au passage l’honnêteté morale de cet autre grand leader des kadihines de l’époque Maître Ould Icheddou qui n’a jamais dit (à ma connaissance) que du bien de Moktar.
Dieu sait pourtantqu’il a connu toutes les affres, des chasses à l’homme, des arrestations et de la prison.
Et maintenant encore, je me suis senti moralement choqué par le caractère à charge de cet article (objet de l’hommage). S’adressant au père de la nation, il n’est pas exagéré de qualifier cet écrit de violence aveugle, proche de l’exécution publique.
D’autre part, ce texte est truffé de contre-vérités. Par exemple, il fait supporter entièrement la responsabilité du déclenchement de la guerre au défunt Président. « En décembre 1975, la décision d’entrer en guerre est prise. ». Alors que tout le monde sait que la guerre nous a été imposée. Les premières attaques en territoire mauritanien, en sont la preuve évidente et réelle.
Moktar est à la fois pacifique et pacifiste. Il n’est pas belliqueux.
Omissions délibérées
Ensuite, cet écrit situe la 2ème attaque de Nouakchott au mois de septembre 1977 alors qu’elle a eu lieu les 3 et 4 juillet 1977.
Serait-ce pour occulter la mort (malheureusement) d’El Wely, fondateur du front Polisario, au même endroit, un an auparavant en 1976 et dont l’auteur ne dit pas un mot de cela dans son intervention ?
La mort de cet homme de valeur (il faut dire la vérité) a été perçue comme un échec définitif des milices Polisario-algérienne.
En parler aurait en effet contredit l’argument de justesse de la guerre en faveur des séparatistes.
On ne pouvait plus mettre en exergue le désarroi des gouvernants de l’époque et des unités mauritaniennes face aux attaques ennemies.
Alors il faut brouiller les cartes par des déformations et des omissions délibérées de certaines informations.
Enfin, tout est dénaturé, uniquement pour justifier l’injustifiable.
« Faut – il comparer Moktar à Boumediene ? », se demande l’auteur dans sa communication. Il ne lui manquait que d’ajouter à sa question : « quel blasphème ! Quel parjure ! »
En effet, pour lui et par lui, Boumediene, ce colonel putschiste et usurpateur est, figurez vous, un véritable héros.
Pourtant ce seigneur de guerre est à l’origine, jusqu’à présent, de tous les maux de l’Algérie et des pays voisins de la région du Maghreb.
Il n’a fait que basculer irrémédiablement son pays dans l’arbitraire et l’illégalité, des galonnés d’Alger et confisqué, de fait, en 1965 l’indépendance de l’Algérie tout entière et le pouvoir politique des mains du 1er Président démocratiquement élu de l’Algérie progressiste et révolutionnaire, en la personne de Ben Bella, grand leader charismatique de tout le tiers monde (comme ça s’est passé chez nous d’ailleurs depuis 1978).
En installant définitivement, le régime militaire d’exception à Alger, Boumediene avait ainsi inscrit au chapitre de l’alternance démocratique en Algérie le mot FIN en lettres noires.
Le régime militaire a continué à se perpétuer sans changements, ni alternance au pouvoir jusqu'à nos jours. Et quand il place un civil à la tête de l’Etat, c’est juste pour la forme.
C’est en renforçant l’institution militaire algérienne dans son statut de rouage essentiel du système de gouvernance qu’il a réussi à accroitre considérablement le rôle de l’armée dans la vie politique, quoi qu’il en coûte à la démocratie et au pays tout entier.
Par conséquent et compte tenu de tout cela, je ne peux m’empêcher d’interpeler l’auteur en question, par la présente objection, sur le non respect du sentiment de toute la Mauritanie qui proclame et appelle Moktar Ould Daddah : « le père fondateur de la patrie mauritanienne ».