Calamités

14 October, 2020 - 23:37

Après avoir observé un report imposé de plus de cinq mois, le ministère de l’Éducation nationale, de la formation professionnelle et de la réforme a organisé, dans un contexte très particulier, les concours nationaux, notamment le baccalauréat, le BEPC et l’entrée au collège. Un véritable défi que le département aurait parfaitement relevé, n’eut été la malencontreuse fuite de l’un des sujets destinés à la centaine de mille de petits candidats du Fondamental. Après la confusion qui a suivi cette grave faute, le ministère a décidé de reprendre la composition d’arabe, le vendredi 9 Octobre sur l’ensemble du territoire national, et désigné une commission pour situer les responsabilités de cette bavure assimilée, sous d’autres cieux, à de la haute trahison dont les auteurs sont passibles des plus lourdes peines. En Mauritanie, l’histoire n’est pas inédite. Loin s’en faut. Il ya juste cinq ans, le sujet de physique-chimie destiné aux candidats du baccalauréat fuita sans que cela n’émeuve presque personne. Après les premières petites récriminations et accusations mutuelles des uns et des autres, les choses passèrent sous silence et nul ne fut en rien inquiété. En 2000, un président de centre à l’intérieur du pays vendit le sujet de sciences naturelles à un directeur général d’établissement privé pour la modique somme de deux cents mille ouguiyas ! Comme d’habitude, ni le ministre de l’Éducation, ni le directeur des examens, ni aucun autre responsable n’eurent le courage de prendre leurs responsabilités, alors qu’ailleurs, la moindre suspicion d’implication dans une affaire scandaleuse entraîne systématiquement la démission du ou des mis en cause. En 2000, les deux principaux auteurs de l’arnaque furent sanctionnés : révocation de l’un et l’interdiction à l’autre d’exercer dans l’enseignement privé. Mais, sept à huit ans plus tard, au temps du Comité Militaire Pour la Justice et la Démocratie, alors qu’un certain puissant général faisait la pluie et le beau temps, les deux faussaires furent malheureusement à ce point réhabilités que l’un d’eux fut hautement nommé, en conseil des ministres, directeur général d’une grande institution nationale. Ne cherchez pas à en savoir plus, vous n’y comprendrez rien. Certainement que cette fois encore on n’en parlera plus d’ici quelques jours. Or la réforme de l’éducation commence par moraliser ses premiers responsables et leur inculquer le sens de la responsabilité et du dévouement sans lesquels aucune perspective de refondation n’est envisageable. Le tentaculaire ministère de l’Éducation nationale vient de se doter d’un nouvel organigramme qui devrait contribuer à la mise en œuvre de la feuille de route visant à restructurer un système éducatif déliquescent depuis plusieurs décennies. C’est l’occasion de coopter toutes les compétences dont recèle le département afin de les placer suivant des critères très objectifs aux postes qu’il faut. C’est une des exigences fondamentales de la réforme maintes fois promise par le président de la République, de son discours de déclaration de candidature à celui de la politique générale de son nouveau Premier ministre devant l’Assemblée nationale, il y a quelques semaines. C’est aussi l’une des conditions fondatrices de cette volonté officielle et du projet très ambitieux d’un retour annoncé à une école républicaine où se côtoieraient fièrement tous les enfants mauritaniens. Plus que tout autre département, le ministère de l’Éducation nationale a souffert des mauvaises pratiques antinomiques à la bonne gouvernance des ressources matérielles et humaines. C’est pourquoi le secteur « fait tant pitié », bien qu’il dispose d’un des plus importants budgets ministériels que plusieurs milliers de ses fonctionnaires, notamment enseignants (professeurs, instituteurs et même inspecteurs) ont préféré tout simplement le fuir vers l’on ne sait trop où !

El Kory Sneiba