On ne sait jamais de quoi demain sera fait. Une totale évidence. Ni qui sera quoi demain. Cela va sans dire. Ni comment le monde sera une fois que le coronavirus aura démontré que tous les pays – grands, gros, moyens, petits, minuscules, majuscules et même trois points de suspension – sont tous soumis à un même énorme point d’interrogation. Qu’entre la Chine et Madagascar, il n’y a pas vraiment grande différence. Et que, comme disait une vieille sagesse arabe, les humains sont des malles hermétiquement closes. Tu vois l’homme chétif et tu le minimises. Avec le coronavirus, cette histoire de Tiers-monde, Superpuissance, pays émergent ou en train de se noyer, G20, G7, G5 ou de je ne sais quelle autre lettre de l’alphabet associée à je ne sais quel autre chiffre, cette histoire, dis-je, des clivages inter-Etats est tout simplement tombée à l’eau. Coronavirus a démasqué le Monde. Il a démasqué les hommes. Il a démontré comment la justice et l’équité doivent se concevoir. Il a mis l’ordre mondial établi sens dessus dessous. Avec sa quarantaine de milliers de morts, les puissants États-Unis d’Amérique sont de loin en tête du peloton macabre engendré par la pandémie. Une maladie qui a donné une leçon au Monde. Pas de grand. Pas de petit. Pas de blanc. Pas de noir. Pas de rien. Chaque pays peut souffrir. Chaque homme peut mourir. Président. Premier ministre. Sportif de renom. Riche homme d’affaires. Ministre de la République. Général chef de corps d’armée ou d’état-major, vendeur ou vendeuse de légumes, journaliste, magistrat ou, même, médecin, infirmier, imam ou prêtre, émir, prince, premier Monsieur ou première Dame. De tout ça, le coronavirus s’en fiche copieusement. Tous égaux devant le virus. Tous égaux devant le risque. C’était « Page spéciale coronavirus » : restez à la maison, nous, on vous donne la bonne information. Cela fait quarante ans que l’on redresse. Ça a commencé avec le Comité Militaire de Redressement National (CMRN). La République faillit tomber. Puis l’on pensa encore la sauver à travers un Comité Militaire de Salut National (CMSN). Et, l’on n’a jamais fini, depuis, de tout réformer. Une frénésie de réformes. Comme si tout était totalement tordu. Réforme de l’institution militaire. Réforme de la presse. Réforme du secteur de la pêche. Réforme de celui du tourisme. De l’emploi. De l’éducation. De la santé. Des mines. De la fonction publique. De la police. De l’administration, la justice, les affaires. Réforme foncière. Réforme d’en haut. D’en bas. Transversale. Horizontale. Réforme dans tous les sens. Refondation totale. Comme si rien n’était jamais allé. Avant de l’oublier, félicitations au passage à la direction générale de la SNIM qui vient de procéder à son redressement « spectaculaire », la faisant passer, en quelques mois, du statut d’entreprise moribonde en phase terminale de faillite à celui d’une société complètement régénérée, capable de distribuer des milliards de gratification à ses milliers d‘employés. Eywe ! Les miracles (El Karamatt) existent donc. Pendant que nous y sommes, pensons à réformer le peuple. La politique. La majorité. Les oppositions. Allez, hop ! Il faut réformer tout ! Les idées surtout… Remarquez que l’assassinat de George Floyd a coïncidé avec celui d’Abbas Diallo. Œuvre, là-bas, de la police. Ici, des militaires. Mais c’est tout comme. Sauf que, là-bas, un peuple s’est uni. Ici, un peuple s’est divisé. Sur tout : points cardinaux, préjugés de tous ordres, selon que la victime de la bavure, de l’injustice sociale historique, de la préméditation ou du crime organisé est de la dune, des plateaux, du fleuve, de la mer, de l’océan, du ciel ou de la terre… du Diable ou de Satan. Il faut nous réformer. Réformons-nous nous-mêmes ! Il est vraiment grand temps. Salut.
Sneiba El Kory