L’on peut se demander si la Commission en charge de la crise du coronavirus prend toute la mesure des drames humains qui sont en train de se nouer au niveau de nos compatriote contraints à l’exil par le fait qu’on leur interdit de revenir.
De même qu’on peut se demander si le fait que le ministre en charge des Mauritaniens à l’étranger, qui ne parle que d’une seule catégorie, à savoir les malades, n’est pas carrément expéditif, les autres catégories étant ignorées, passées d’un trait par pertes et profits à l’occasion d’une brève et laconique apparition à la télévision.
Et pourtant, les malades ne sont pas la majorité.
D’ailleurs la question du retour des malades encore sous traitement ne se pose réellement pas, étant donné qu’ils sont allés chercher des soins médicaux non disponibles ici. Pour ces malades, la solution consistant à les aider matériellement est adaptée à leur situation. Mais pour une partie seulement des malades encore sous traitement. Car il n’y a pas que le Sénégal, la Tunisie et le Maroc. Et il n’y a pas que les malades évacués par la Cnam ou le Ministère des Affaires sociales.
Et maintenant, quid de tous les autres ? Ceux qui suivent des traitements dans d’autres pays, ceux qui ont achevé leurs soins, ceux qui étaient à l’étranger pour des raisons professionnelles, ceux qui se sont trouvés bloqués en transit sur le chemin du retour, les étudiants privés de campus, et enfin ceux qui étaient à l’étranger pour de multiples autres raisons, et ils représentent le plus gros, souvent des familles entières.
A part donc ceux qui étaient en mission (fonctionnaires, hommes d’affaires etc.) dont la situation économique n’inquiète pas étant donné qu’ils perçoivent très probablement des frais de mission leur permettant de couvrir les frais de leur séjour, il reste donc tous les autres.
Et ils représentent la majorité.
Ces citoyens que le gouvernement ignore dans ses plans, et abandonne à leur propre sort. Au nom d’une prétendue protection de l’espace national. Discutable. Discutable, parce que lorsqu’on lit que des infiltrés seraient parvenus jusqu’à Nouakchott en provenance du Sénégal, et même du Mali, on peut imaginer les dégâts.
Alors que le fait d’organiser le rapatriement de ces citoyens, en les soumettant à quarantaine, offre tous les gages de sécurité.
Et ce faisant, l’Etat, les Ministres, le Gouvernement n’auront fait qu’accomplir leur devoir et remplir leurs obligations constitutionnelles vis-à-vis de leurs citoyens : parce que l’Etat a exactement la même responsabilité vis-à-vis des populations du pays, qu’il doit protéger, que vis-à-vis de tout citoyen qui se trouve hors des frontières, quel qu’en soit la raison et la cause.
Et c’est à cette valeur portée à tout citoyen, ici ou ailleurs, qu’on reconnait le sens de responsabilité des dirigeants, et la grandeur d’une nation.
Quant à la question de développement de la pandémie autour de nous, là aussi il faut faire preuve de discernement. Car si dans certains pays la courbe est encore ascendante, d’autres sont en phase de dé-confinement, et on peut objectivement organiser l’ordre des rapatriements sur la base de ce critère.
Mais il faut agir, s’employer réellement à résoudre cette situation.
Car l’attentisme est ici dangereux, la situation de ces citoyens se dégrade rapidement, au rythme du tarissement de leurs ressources, et de celles et ceux qui pouvaient encore les aider…et c’est là que de véritables drames humains sont en train de se nouer.
Abdel Wedoud Tibari