Si la commission qui enquête veut enquêter sérieusement, ah là, elle va vraiment se fatiguer ! Pourquoi ? Parce que… ou pourtant. Quel temps ? Le temps de casser tes dents. Ndeyssane, c’était la vieille belle époque de notre jeunesse et de l’école continue, jamais perturbée par rien. Ni choléra. Ni typhoïde. Ni rougeole. Ni paludisme. Ni par rien, vous dis-je. Pas besoin d’arrêter les cours ni d’entreprendre un quelconque apprentissage à distance. Qui ne peut donner le moins ne peut pas donner le plus. C'est-à-dire : qui ne peut enseigner de près ne peut pas enseigner de loin. Voilà de quoi revenir à la commission qui enquête. Normalement, c’est tout le monde qui doit y passer, du Président au planton. Chacun répondra de sa gestion. Nous sommes tous comme nous-mêmes. C'est-à-dire que nous sommes tous certainement, à quelques exceptions près qui ne font que confirmer la règle, des prédateurs réels ou potentiels. Qui mange dévore et qui attend son tour se tord d’impatience pour emporter son « gâteau », comme dans la fameuse histoire d’« un vautour est venu, a pris son gâteau et est parti ; deux vautours sont venus, ont pris deux gâteaux et sont partis comme un vautour est venu, a pris son gâteau et est parti ; trois vautours sont venus… etc. » Et comme les absents ont toujours tort, on les accuse. De tout. On leur fait porter le turban. Feu Ould Daddah : Ah, c’est lui qui a fait la guerre du Sahara ! Une guerre fratricide qui a eu des conséquences désastreuses sur l’économie nationale. Oh, nous n’avions pas d’armée ni d’équipements militaires, justes quelques MAS 36 et une poignée de vieilles Land Rover dont la plupart ne démarraient pas. Qu’Allah ait son âme ! Puis il y eut le chapelet de militaires qui sont venus, ont mangé leur gâteau, etc. Les sérails des uns accusant les entourages des autres. De tout : du crash tragique de Mai 1979 qui coûta la vie à des mauritaniens dont un brillant officier supérieur ; de la décision d’exécuter les responsables de la tentative de putsch du 16 Mars 1981… Tout ça, c’était le Président et personne d’autre ! Puis encore des vingt-et-un ans de Maouiya au cours desquels le pays fut complètement « dévalisé » par quasiment tout le monde : ministres, fonctionnaires de toutes catégories (poids lourds, poids légers et même poids plumes), journalistes, notables et chefs tribaux, femmes de bonnes et de mauvaises mœurs, les « qui ont des pères » et ceusses qui n’en ont pas… Mais, à l’arrivée, toutes les fautes commises pendant vingt-et-un ans, y compris les fraudes massives aux élections (à Kobéni par exemple), les assassinats extrajudiciaires des années de braise, les emprisonnements des opposants, la dépréciation de la monnaie et tout le tintouin, tout ça, c’est lui, c’est Maouiya qui a tout fait seul. Sans conseillers. Sans ministres. Sans parti. Sans soutiens. Sans applaudisseurs. C’est lui qui partit à Kobéni remplir les urnes jusqu’à que le nombre de votants dépassa le nombre des inscrits. C’est encore lui qui prit en filature les membres du jury jusqu’à Boghé pour y vendre les sujets de sciences du Baccalauréat 2000. C’est lui qui creusa de ses propres mains les fosses communes de Sory Malé, Azlat et d’Inal. C’est lui qui vola l’argent de tous les projets, de la BCM, du Trésor public, pour construire des milliers de villas cossues à Tevragh Zeina et ailleurs, constituer des cheptels par dizaines de milliers de têtes et renflouer les comptes de banques nationales et étrangères. Chers amis de la Commission d’enquête, la décennie ou même les onze ans dans la gestion dans lesquels vous voulez fouiner, ne cherchez pas : c’est Aziz. Tout simplement. C’est lui qui a tout fait. Tout seul. C’est lui qui voulait un troisième mandat au mépris des dispositions on ne peut plus claires de la Constitution. Les députés dont certains sont aujourd’hui membres de votre commission étaient en vacances. C’est lui qui percevait les gros salaires et avantages indus de sociétés-fantômes comme l’usine de sucre. C’est l’ex-Président qui a tout emporté de la SNIM, des ports nationaux, des commissions de marchés ! C’est lui qui ordonna la vente des édifices publics, légitimée par délibération de comités techniques. Même les Premiers ministres n’en savaient rien. C’est lui seul, oui, lui seul ! Le ridicule ne tue pas, dit-on, mais n’empêche : c’est bigrement ridicule, ce complaisant et puéril amalgame… Salut.
Sneiba El Kory