Festival de brassage culturel : clôture en beauté

4 May, 2018 - 03:09

Une soirée culturelle riche en couleurs,  animée par les troupes artistiques de la région, magnifiant la diversité et le vivre-ensemble, a clos en apothéose la première édition du  Festival de brassage culturel, tard dans la nuit du dimanche 29 Avril au lundi 30. Au terme de l’événement, l’organisateur de la rencontre, Modou Niang, dresse un bilan satisfaisant : « Nous pouvons affirmer que les objectifs visés ont été atteints à 85%.C’est déjà un motif de satisfaction. Il n’était pas évident qu’on puisse atteindre, pour une Première, un tel taux de réussite ». S’inscrivant dans l’appui aux Initiatives de brassage et d’inter-culturalité  de la wilaya du Trarza, le Festival visait, officiellement, «  un meilleur ancrage local, régional et une plus grande proximité envers les jeunes dans leurs terroirs ».

L’activité-phare du samedi avait été l’exposé présenté, par Aziz Wane, instructeur CAF et cadre à la FFRIM, sur « L’historique du sport mauritanien, en général, et du football, en particulier, de l’ère coloniale à nos jours, avec comme acquis, la constitution du premier club à Rosso ». Il en a retracé une chronologie des différentes péripéties. Suivant une méthodologie pédagogique, Wane a abordé, tour à tour, la pratique sportive avant l’indépendance, l’apparition du « clubisme », les premiers pratiquants, la filiation à la FIFA, la législation sportive, avec l’élaboration de premiers textes réglementant la pratique ; puis l’embrigadement de la jeunesse au sein du Parti du Peuple Mauritanien (PPM). Le conférencier a également abordé les hauts et bas du sport mauritanien, suscitant l’intérêt des jeunes dont la fréquence et la pertinence des questions ont largement illustré leur participation active.

Plus de détails, maintenant, sur la soirée culturelle grandeur nature offerte par les groupes musicaux, humoristes et rappeurs. Chacun dans son registre (Sneybiyatt, Rosso boys, Rosso dance, troupe de Keur Mour, troupe Sakou xamxam, Ramlé, Abda Sarr en Pekane, Talibé, Mohamed Hacen et Joe Keïta) a magnifié le brassage et l’interculturalité. Longuement ovationnés, ils ont fait vibrer le public venu en masse et resté tard la nuit avec la même ardeur.

Autre conférence, le dimanche, sur « La donne du brassage (intérêts, enjeux et menaces) », présentée par Wade Idrissa, journaliste. À l’entame de son exposé, Wade aborda le volet historique, rappelant que  la wilaya du Trarza est la première wilaya de toute la Mauritanie qui refusa la colonisation française du territoire mauritanien. Jusqu'à nos jours, le Trarza reste la capitale de la culture et du savoir de la Mauritanie. Abordant le brassage des hommes et des cultures, Wade estime que le  « brassage ethnique, important et signifiant, des Walo-walo, des Maures, des Peulhs, des Sérères, des Arabes, des communautés caravanières, autochtones et étrangères, a généré une richesse incomparable : brassage des mahadras, des champs et des boutiques, brassage du désert et du Fleuve, brassé lui-même en ces deux rives… ».

 

Diversité culturelle mal exploitée

« Mais », tempère Wade, « ces brassages ont connu un bouillonnement et des effervescences historiques. Ils ont besoin, aujourd’hui, d’être ravivés, aux yeux des membres des différentes communautés qui, sous l’influence de nouvelles perceptions et enjeux, ne s’astreignent qu’au vivre-ensemble, peu à peu réduit à leur seul groupe. […] Dans de nombreux pays comme la Mauritanie, la donne de la diversité culturelle reste mal exploitée, en tant qu’atout et richesse », déplore le conférencier. «  Si le vivre-ensemble est encore accepté et vécu, l’agir-ensemble a cessé de se développer en nos communautés, depuis quelque temps déjà. Conscients de ces blocages, nous ne devrons pas manquer d’augmenter la force des lois et de renforcer la cohésion sociale, entre les communautés, en plus des actions institutionnelles en ce domaine. Ce dynamique élan de consolidation doit être porté par une nouvelle génération de jeunes, fortifiée de valeurs de fraternité, d’entente et d’unité ». Pour Wade, « le brassage interculturel au Trarza Rosso est  un  tremplin de cohésion sociale et d’unité nationale ».

« Les ethnies  du Trarza ne sont ni données ni figées », précise le conférencier. « Elles sont des constructions identitaires. Leur construction peut s'appuyer sur une histoire mais elles sont, surtout, des entités mobilisées à des fins politiques. D'autre part, les frontières sociales, entre ethnies dans la zone sahélienne, sont plutôt à considérer comme des gradients, lorsqu'elles sont liées entre elles par certaines formes de clientèle et de parenté contractuelle ».

« La promotion de la diversité culturelle au Trarza nous a été imposée par une cohabitation ethnique de grande marque, compte tenu des brassages multiples que nous avons démontrés. Cette diversité culturelle doit  favoriser l’inclusion et l’équité sociale de nos populations. Nos peuples doivent prendre  conscience de ses enjeux à même de donner des résultats équitables et de permettre l’implication de tous. La société riche d’une diversité culturelle a la charge de démontrer son efficacité, pour remédier à la violence, notamment chez les jeunes ». Et de plaider : « L’importance de la collaboration des ethnies au Trarza passe par le multiculturalisme ».

« Celui-ci doit maintenir, au Trarza, le caractère distinctif des cultures multiples, au sein de la société mauritanienne, et s’opposer à d'autres politiques comme l'intégration sociale, l'assimilation culturelle ou la ségrégation raciale. C’est ainsi qu’au Trarza, les migrants ou leurs descendants participent à l’ensemble des activités. Une intégration culturelle donc très réussie qui nécessite, parfois, l’abandon d’une partie de la culture d’origine mais jamais incompatible avec ses valeurs », conclut le conférencier.

Organisé, rappelons notre article de la semaine dernière, par Toldo Nasr Sport Management, avec le soutien du  ministère de la Jeunesse et des Sports et le projet « Prévention de conflits et de promotion du dialogue interculturel », le premier Festival de brassage culturel du Trarza aura bien été le tremplin de brassage, entre les hommes et les cultures de cette wiliya.

Thiam Mamadou