Autour d'un thé: Union contre la République

22 March, 2018 - 01:00

Communiqué urgent : toute la République Islamique de Mauritanie est en vacances, pendant toute la campagne de l’Union Pour la République dont les ministres, les directeurs généraux et les conseillers de tout poil sont partis s’expliquer avec les populations de l’intérieur du pays. Normalement, si les estimations des toutes premières années de la Rectification Bénie du six Août 2008 sont vraies, sept cent mille adhérents en 2009/2010, elles devraient, maintenant, avoir largement dépassé les quatre ou cinq millions (diables, moutons, arbres et défunts compris). Seuls : le président, pour présider ; le ministre des Finances, pour financer ; le ministre des Affaires étrangères pour s’affairer au dehors ; le ministre de l’Intérieur pour faire attention au-dedans ; le ministre de la Défense pour défendre ; et le ministre porte-parole pour porter la parole ; doivent rester sur place, histoire de synchroniser les affaires courantes. Heureusement, d’ailleurs, qu’ils étaient là, sinon le gaz et ses bonbonnes n’allaient plus revenir sur terre et le bateau à l’origine de la catastrophe n’allait pas accoster. « Le mensonge est un bâtard », dit-on, et si l’« on ment avec les gens, ne mentons pas seuls ». Wallahi, si la crise du gaz n’avait pas été rapidement maîtrisée, sur instructions, hyper-promptes, de la Direction nationale très éclairée, les commerçants auraient, définitivement pour le moment, achevé de tuer les citoyens, en leur vendant le gaz au double, voire triple, de son prix habituel. Dix mille au lieu de trois mille. Quatre mille cinq cents au lieu de mille huit cents. Deux mille au lieu de neuf cents. Comme aux élections : de la fraude à ciel ouvert. Comme si les walis, les hakems, les commissaires de police et autres responsables vendaient eux-mêmes le gaz. Tellement ils ont laissé faire des commerçants sans scrupules. Mais, bon, c’est quand même normal, dans un pays qui a libéralisé le commerce. Tu achètes ce que tu veux d’où tu veux et tu vends comme tu veux, où tu veux, à combien tu veux et à qui tu veux. Veux quand même est là-bas, c’est l’essentiel. Tu peux aller à Djigueni, Bengou ou Toueïla (ce nom me rappelle quelque chose mais ma mémoire me trahit) ou encore à Tintane, pour monter une usine de fabrication de médicaments ; passer par n’importe quelle mahadra des environs, pour te faire apposer une AMM (autorisation de mise sur le marché) ; avant n’importe quel imprimeur, pour y tamponner « fabriqué en France » ; puis recruter n’importe quel berger, pour jouer au pharmacien  et vendre la mort aux pauvres citoyens dont les petites maladies, ordinairement très bénignes, se transformeront en cancers foudroyants ou en complications implacables. C’est le destin, c’était écrit. Défaitisme. Fatalité. Résignation. Et les sérials killers aux forts mollets rééditent leurs crimes, cyniquement, comme qui rigole. Alors, passons aux choses sérieuses. Nous, on parle de troisième mandat. Alors que les autres, comme les Chinois qui sont beaucoup plus nombreux que nous, plus instruits que nous et, je suppose, plus intelligents que nous – et aussi, j’allais oublier, qui ont plus de députés que nous (trois mille représentants du peuple, contre cent cinquante-quatre qui deviendront cent cinquante-sept représentants d’eux-mêmes), plus de ministres, je suppose encore, et plus, je suppose toujours, de télévisions, de radios et de généraux que nous – ces Chinois en sont, au cinquième mandat qui va les amener, directement, à la présidence à vie pour un second Grand Timonier probable. Voilà un bon argument, pour le gouvernement de chez nous, son porte-parole et son Sidi Mohamed ould Maham qui aurait dit, en s’exprimant sur cette énième histoire d’adduction d’eau au Dhar, qu’enfin, pour la première fois (depuis le 15 Mars 2018), l’argent public a été utilisé pour les intérêts du peuple. Où allait donc cet argent, des indépendances au 14 Mars 2018 ? Ha que voilà une bonne question pour le président du Conseil d’administration d’une société dont les responsables se sucrent, depuis des années, alors que l’établissement n’avait même pas encore commencé à fonctionner. Nous ne sommes pas, non plus, les champions de « T’lahlil ». Nous arrivons bien loin derrière les Égyptiens. N’est-il pas écrit, sur leur porte d’entrée : « Ô toi qui arrive, il y en a mille comme toi ici » ? Alors, les applaudisseurs, sachez à qui et à quoi vous en tenir, avant d’aller chez Essissi et son ministre de la Défense, qui seraient des providentiels prophètes, comme Moussa et Haroun dont Allah dota l’Égypte. Comme quoi,  « pas de force qui ne soit supplantée par une autre »... Salut.

Sneiba El Kory