Ecrire aux mauritaniens

1 March, 2018 - 02:25

Il me semble que je m’y consacre entièrement, guettant toute occasion de le faire, luttant contre l’indifférence, provoquant les sceptiques « à quoi bon ? », la conviction d’hommes sincères, efficaces qui osent écrire et dire : « effort de chacun, démocratie vivante. » Seule, en effet, la volonté des Mauritaniens permettra qu’il y ait ou non une communauté nationale. En démocratie réelle, tous les citoyens participent effectivement aux affaires publiques. Le pouvoir émane de la volonté de tous. Je respecte  trop le peuple pour accepter qu’il soit privé de sa liberté d’expression et sa participation aux affaires de l’Etat. A chacun sa conscience, à chacun sa conception du Bien et du Mal. J’ai souvent tenté de leur rendre espoir en évoquant les vers si actuels de Victor Hugo : Nous avons tous deux au front une couronne… Vous  des fleurs de lys d’or et moi de cheveux blancs. Roi, quand un sacrilège ose insulter la vôtre, c’est vous qui la vengez, C’est Dieu qui vengera l’autre. (Le roi s’amuse.) Je voudrais que mes compatriotes en portent témoignage. Je ne suis ni fanatique, ni rétrograde, ni intégriste. Je suis pour un Islam ouvert à la science, à la technique moderne, ouvert sur le monde extérieur, sur les autres civilisations et les autres croyances. Un Islam dont les premières vertus sont la générosité du cœur et la tolérance. « Les créatures humaines sont la famille de Dieu et celle d’entre elles qui est la plus chère au Seigneur est celle qui est la plus utile à la famille. » Cet humanisme exprimé par notre Prophète (PSSL) a valeur universelle. Le savant Pasteur, par exemple, ne l’a pas oublié quand il s’est écrié : « Je ne te demande pas quelle est ta race, ta nationalité ou ta religion mais quelle est ta souffrance. » C’est dire que nous pouvons adopter la voie du progrès, sans renier notre origine et nos sages traditions, sans abandonner notre style de vie. C’est dans notre passé que nous devons puiser notre force et notre raison d’être. TOUJOURS LA pour montrer que démocratie ne peut vivre que par l’effort du citoyen et qu’elle ne sera qu’une molle tyrannie, promise à la catastrophe si elle se méfie de lui ou manque à sa seule vérité : éveiller le sens de la responsabilité au cœur de chaque homme et l’aider à épanouir la vie collective, de son imagination et de son active présence. TOUJOURS LA pour dénoncer les dangers des choix politiques préfabriqués, qu’on impose par le slogan ; l’idéologie, par la peur ou la haine à des individus perdus dans la société de l’uniformité, du gaspillage et de l’indécision. Si les Mauritaniens comprennent que leur démocratie est à faire, que la réussite n’en est pas difficile, ils seront alors assez grands pour aller d’eux-mêmes sur les canaux multiples de leur diversité et tailler une vie collective, locale et nationale, à leur convenance. Pour moi, la seule récompense d’avoir fait comprendre que le morne aujourd’hui n’est pas une fatalité sera une immense récompense. Ecrire aux Mauritaniens : mais il me semble que je m’y suis consacré entièrement. Il parait, en revanche, qu’écrire comme je fais dérange. « Soyons l’idée qui dérange ! » Toujours là pour refuser le comportement traditionnel et les analyses paralysantes des fatalistes. Toujours là, mais ailleurs que dans le morne échange de médiocrités qui fait aujourd’hui notre  vie publique et dont je n’avais cessé d’écrire aux Mauritaniens qu’il ne pouvait tenir lieu de perspective nationale ni leur donner la moindre sécurité ! Pour moi, la seule récompense d’avoir fait comprendre que le morne aujourd’hui n’est pas une fatalité sera une immense récompense. Le citoyen, hier mouton, exploité par ses bergers, demain devenu adulte, n’aura pas besoin de mentors. Il peut être son propre maître à penser, dans la vie démocratique. Aujourd’hui, je mesure cette témérité et cet effort qui furent miens. Ces phrases écrites aussi au travers  de tant d’articles dispersés parmi tant de lecteurs, ceux qui me soutiennent. Leur choix est sans doute plus judicieux que le mien ne l’aurait été. Nous acceptons d’entendre qu’il suffit de gérer l’imprévisible, comme si nous avions perdu la vertu de volonté qui seule rend la certitude à un peuple. Nous acceptons d’écouter des langages soigneusement codés pour que l’inquiétude ne s’éveille pas. Pourquoi ces programmes mirobolants que l’on nous propose ne s’accompliraient-ils pas, eux aussi ? Et nous voilà, captifs de notre propre aveuglement, dociles à ne pas vouloir, rassurés d’entendre les phrases habituelles, gonflées, redondantes, creuses, hélas ! Avec le ton acharné et plein, qui font ensemble tout le discours politique que nous supportons, alors que nous le savons médiocre et qu’il nous fait médiocres. Si nous nous comportons en hommes libres et responsables, si nous rejetons les élémentaires complicités de la vie politique, si nous proposons et exigeons la simplification de la machinerie d’administration, si nous acceptons de témoigner de notre volonté d’animer la vie collective hors des routines et des mécanismes habituels, mieux gardés qu’une chasse, si nous nous efforçons d’éveiller et de rapprocher des réflexions et des dévouements sur des réalités comme l’impôt, l’épargne, la sécurité sociale, l’eau, l’urbanisme, l’énergie, le gaspillage, les enfants et la ville. Cette attitude, cet engagement, neufs, inattendus dans un monde de conventions, surveillé et verrouillé, auront un écho que l’on imagine à peine. Toujours là, mais ailleurs que dans le morne échange de médiocrités que fait aujourd’hui notre vie publique et dont nous n’avons cessé de dire aux Mauritaniens qu’il ne pouvait tenir lieu de perspective nationale ni leur donner la moindre sécurité ! Le Verbe, c’est l’étincelle d’où jaillissent la lumière et la Vérité. La parole porte en elle des forces insondables. Sans liberté de parole, un peuple ne vit pas. Je crois personnellement que le droit de critiquer et de dénoncer l’injustice est un droit imprescriptible et immuable. Certes au crépuscule de la vie, nos forces diminuent et nous ne pouvons plus agir comme au temps de la jeunesse. Mais nous pouvons toujours témoigner. L’Islam le  recommande : NE CACHEZ PAS VOTRE TEMOIGNAGE. QUICONQUE LE FAIT SE REND COUPABLE A L’EGARD DE DIEU. (LE CORAN, SOURATE 2, « LA VACHE ». V.283. )

A l’instar de beaucoup de nos amis (es) lecteurs et lectrices avec qui par le biais de ce journal que vous tenez entre les mains, j’ai établi un contact hebdomadaire, me demande souvent pourquoi je suis AILLEURS ? Je n’ai jamais été l’inconditionnel de personne ; le terme même me choque. Je n’avais pas une âme de militant. Je naquis à ATAR (Adrar). Du côté de mon père, sa famille paternelle EHEL BEYROUCK la famille Caïdale de Oued-Noun « sud-marocain » « le nom de BEYROUCK devient l’appellation désormais classique de cette maison princière ». Paul Marty. Du côté de ma mère ; les ascendances étaient des Idawâ-Eli de Chinguitti. Je suis dans l'ordre, un Atarois, un homme libre, je suis aussi un libéral, un conservateur, un contribuable, un consommateur. Un père, un électeur, pas aussi jeune que j’ai été, ni aussi vieux que j'espère le devenir et tant que cela je le suis, indistinctement et sans ordre de préférence. Je suis tout entier dans ce que je fais et chaque minute pour moi possède un sens propre. La vie m'a enseigné que notre philosophie politique est la somme de nos expériences vécues. L'homme que Dieu a créé n'est pas si simple, ni sa vie si stérile au point qu'un adjectif puisse le résumer. Ma propre philosophie consiste pour une part à considérer l'individualité de la philosophie politique comme la pierre angulaire de la liberté mauritanienne. Ceci m'amène à établir une liste des principes qui régissent mes convictions personnelles, des principes qui gouvernent ma philosophie propre, je les définirai ainsi : PREMIEREMENT, je crois que tout mauritanien a quelque chose à dire et qu'au sein de notre système, il a le droit d'être entendu. Lorsque je dis, par exemple, que tout Mauritanien a quelque chose à dire et qu’il a le droit de se faire entendre, je sais que cela peut paraître trop idéaliste. Or, je ne pense pas qu’il en soit ainsi, ni en principe ni en pratique. DEUXIEMEMENT, je crois qu'il existe une réponse nationale à tout problème national et je ne crois pas par conséquent, que chaque question ait nécessairement deux aspects. TROISIEMEMENT, je considère que le gaspillage est l'ennemi constant de notre société et que la prévention du gaspillage des ressources de vie et des chances est le plus pressant des devoirs d'un gouvernement. Mes principes, j'en conviens, sont simples. Ce sont plutôt des idées que je nourris depuis plus de soixante cinq ans et qui sont le fruit de mon expérience. Quant à être quoi que ce soit d'autre, je laisse à chacun le soin de définir à son gré, car je me garde bien de faire moi ces distinctions. Je crois que l’Ailleurs est très précis dans l’esprit de beaucoup de gens et surtout à mesure qu’on s’éloigne des cercles enchantés de la politique. Les gens comprennent très bien que l’on puisse ne pas désirer se situer dans ce qui est aujourd’hui le panorama politique mauritanien. C’est-à-dire L’AFFRONTEMENT OU LA COMPROMISSION. Si, vous arrivez à me dire qu’il n’y a pas une autre solution que l’affrontement ou la compromission, je réviserais toutes mes données politiques ! Ailleurs que dans les luttes politiques traditionnelles, par delà les groupes qui aujourd’hui s’affrontent ou s’associent, il faut la claire conscience de l’avenir et c’est à cet effet que je milite. Il est vrai qu’il y a aujourd’hui deux Mauritanie, une qui a élu  Mohamed Ould Abdel Aziz et l’autre qui espère d’autres solutions que celles que Monsieur Aziz proposait jusqu’ici. Comme toutes les nations, la nôtre possède des ressources : ressources naturelles, ressources de position, ressources intellectuelles. Sans conquêtes ni agrandissement, nous ne pouvons rien ajouter à ces éléments fondamentaux. Or nous devons construire en partant de ce que nous avons, et nous satisfaire de réalisations inférieures à celles qui sont possibles, serait trahir notre héritage et nos devoirs.

 

 

PS.

Je ne suis ni de l’opposition,

ni de la majorité présidentielle.

Je suis Ailleurs.

« A bon entendeur, salut »

 

 

 

 

AHMED BEZEID OULD BEYROUCK

e-mail: chroniqueurbeyrouck@gmail.com