Répression d’une marche pacifique d’IRA : Le bâton, toujours le bâton

19 January, 2018 - 00:50

Lundi 15 Janvier,  les forces de police ont procédé à une violente répression de la marche pacifique organisée, en fin de matinée à Nouakchott, par les militants du mouvement abolitionniste IRA qui réclamaient l’instauration d’une citoyenneté juste et égalitaire, la libération des détenus d'opinion, notamment Moussa Bilal Biram dit Pape, Abdallahi Matalla Saleck dit Vieux, l’ex-sénateur Mohamed Ould Ghadde, le poète Abdallahi ould Bouna et l'homme d'affaires Moussa ould Mkhaitrat. Les manifestants exigeaient, également, la traduction en justice des personnes impliquées dans les crimes de génocide, durant les années de braise 1989/1990. La marche entendait « attirer l'attention de l'opinion publique nationale et internationale », communique IRA, «  en Mauritanie, les victimes des crimes d'État ne sont pas oubliés et l'exigence de la libération, immédiate et sans condition des détenus d'opinion, reste une priorité et une préoccupation nationale ».

Très tôt le matin, les unités des corps sécuritaires quadrillaient les rues de Nouakchott et procédaient à plusieurs arrestations, dans les rangs des activistes du mouvement abolitionniste. Lourdement armées, les forces de police prenaient position aux abords de la Polyclinique d’où devait s’ébranler la marche, en direction du siège des Nations Unies à Nouakchott. Elles n’ont pas fait dans la dentelle : « Armée de matraques et de gourdins, la police a utilisé une indicible violence contre les manifestants pacifiques », s’insurge le mouvement abolitionniste. Des arrestations en nombre indéterminé ont été orchestrées, une quinzaine est toujours retenue arbitrairement dans les locaux de la police. Gravement blessés, des militantes et des militants ont été admis aux services des urgences de l'hôpital de Nouakchott.

Les manifestants qui ont pu contourner les barrages ont été repoussés aux abords de  la commune de Tevragh Zeïna. Ils arboraient les photos des victimes d'exécutions racistes, à Inal et ailleurs sur le territoire national, celles des militants d'IRA incarcérés à Bir Mogreïn, du sénateur Mohamed ould Ghadda et de son codétenu, Mohamed ould Mohamed Mbareck, ainsi que celles du poète Abdallahi ould Bouna et de l'homme d'affaires Moussa ould Mkhaitrat. Scandant des slogans hostiles au pouvoir, les militants ont rivalisé d’ardentes protestations contre les arrestations qu’ils jugent arbitraires et exigé, en conséquence, leur libération immédiate.

Voici le nom des militants d'IRA-Mauritanie toujours en garde-à-vue injustifiée, suite à la marche du 15 Janvier 2018, contre l'impunité et les détentions arbitraires : Samba Sidi, Youssouf Mohamed, Sabbar Moussa, Mama Ahmed, Lalla Kory, Aicha Biram, Cheikh Samba, Sidi Mohamed Salem, Mohamed Hamidine, Abdallahi Abou Diop, Abdallahi Hemmett, Abbass Ely et Mohamed Lemine Rabi.

 

La fin de l’impunité ?

IRA-Mauritanie s’est élevée contre la brutale répression d’une marche pacifique de protestation contre l'impunité des crimes de sang et les disparitions forcées qui prolonge le deuil de centaines de mauritaniennes et de mauritaniens, veuves, mères ou orphelins, et contre les poursuites judiciaires à caractère politique et la détention arbitraire. Et de déplorer « la violence gratuite, disproportionnée et indicible des bataillons de la police, très nombreux et lourdement armés, avec à leur tête, un tortionnaire notoire, l’inspecteur Mohamed Lemine ould Sidi. Bilan : de très nombreux blessés, dont deux très gravement, Abdallahi Abou Diop (section IRA de Riyadh) et Abdallahi Hemmet (section IRA de Arafat), et transportés aux urgences du Centre Hospitalier National (CHN) de Nouakchott. Mais ils se sont vus refuser la délivrance, par la police, de la réquisition sanitaire qui leur permet d’être aussitôt soignés et de s'en prévaloir devant la justice. Cette obstruction à un droit élémentaire relève de la pratique hors-la-loi des éléments tortionnaires qui gangrènent les différents corps sécuritaires en Mauritanie ».

En conséquence, IRA-Mauritanie se réserve le droit de poursuivre, devant les juridictions nationales et internationales, toutes les personnes impliquées dans ces crimes et délits. L’association réitère, aux tenants du régime, sa ferme détermination à continuer la lutte pour le défaire, obliger Mohamed ould Abdelaziz à respecter la loi et à céder le pouvoir à la date constitutionnelle de 2019. Occasion encore de convier la société civile et politique mauritanienne à rompre avec la résignation, la peur et la démission, pour inaugurer des actions militantes, légales et pacifiques, à l'image d’IRA-Mauritanie. « Seule cette option pourra redonner l'initiative au peuple, face à un pouvoir qui prospère sur le silence, la peur et l’inertie des élites et des populations », rappelle le communiqué, avant d’interpeler la Communauté internationale pour qu'elle « observe, minutieusement, les comportements, les pratiques et les moyens, illégaux et prohibés, mis en œuvre, par le régime de Mohamed ould Abdelaziz, en vue de réduire les tentatives d'expression légale et pacifique et le droit de manifester, de s'associer ou de s'exprimer. L’organisation abolitionniste conclue en conviant toutes ses militantes et ses militants à rester mobilisés, dans l’expression de leur solidarité avec les détenus, pour démystifier le pouvoir de l'oppression et de la contrefaçon.

 

BDA menace

Lors d’une conférence de presse tenue, mardi 16 Janvier, Biram Dah Abeid, a prévenu les autorités de ne pas s’entêter à réprimer les manifestations organisées par son mouvement, affirmant que cette attitude ne fait qu’augmenter l’insistance des militants à lutter contre ce qu’il appelle le « système raciste et dictateur ». Le leader abolitionniste  a assuré que son organisation avait décidé « d’aller de l’avant, contre le régime du président sortant Mohamed ould Abdel Aziz, appelant les forces politiques et syndicales du pays, à participer au mouvement, afin de forcer Ould Abdel Aziz à quitter le pouvoir, après les élections de 2019 ».

Biram multiplie, ces derniers temps, les rencontres avec les responsables des organisations de la Société civile, les hommes de media et les leaders de l’opposition et de la majorité. « IRA-Mauritanie », dit-il, « est déterminée à jouer pleinement son rôle d'organisation généraliste des droits humains et avant-gardiste ». Et de scander : « la répression de la police » aux manifestations du mouvement hier, « n’était pas justifiée », signalant le « devoir de soutien aux détenus d’opinion, soumis à l’arbitraire dans les prisons, aux veuves et orphelins, victimes des exécutions extrajudiciaires d’officiers et soldats mauritaniens ». Il appelle la Communauté internationale à condamner les « violations, violences et tortures perpétrées par le régime et à situer les responsabilités des personnes impliquées, pour les juger ».

Il annonce  enfin que le mouvement a décidé de poursuivre les personnes impliquées dans la répression de la manifestation d’hier, ajoutant que la police, lors de la dispersion des manifestants, a, non seulement, arrêté beaucoup de gens mais aussi laissé sur la place de nombreux blessés, dont deux grièvement.

Thiam