La Libye un passé douloureux, un présent chaotique et un futur sombre : le Désastre aux impacts Régionaux et Internationaux

21 July, 2017 - 00:12

Sahel Expertise et Conseil a organisé, le jeudi 13 juillet, en collaboration avec Monsieur Philip KALTENBACH, Sénateur des Hautes-de-Seine, au palais du Luxembourg à Paris, un colloque international sur le thème : La Libye, un passé douloureux, un présent chaotique et un futur sombre : le Désastre aux impacts Régionaux et Internationaux.
Les travaux de ce colloque, qui a été animé par un panel d’experts européens et africains comprenant :
-    Mohamed Ould Rzeizim, ancien  Ministre et Ancien Ambassadeur de la Mauritanie à l’UA et Président du Centre EDDAR
-    Monsieur Mohamed El-Hassen OULD LEBATT, Consultant Sahel-Ec
-    Peer DE JONG spécialiste des questions de sécurité Président de l’Institut THEMIIS
 -   Eric BLANCHOT, Président de PROMEDIATION,
-    Dr ZAHRA MANSOURY ancienne Ministre libyenne
-    Dr Paul KANANAURA, Président de l’institut Mandela
-    MINNI ARKOU MINAWI, Président du Mouvement armé de libération du Soudan.
Les travaux du colloque ont été dirigés par Monsieur Mohamed Ould RZEIZIM. Ils ont été axés entre autres sur les thématiques suivantes :
•    La réalité libyenne avant la crise et perspectives de solutions,
•    La Libye : Stratégies divergentes aux conséquences régionales et internationales,
•    Raisons de l’échec de la proposition africaine de sortie de crise,
•    Impacts de la crise du golfe sur le théâtre libyen et les bouleversements probables.
•    Le chaos Libyen et le repositionnement stratégique des acteurs de la guerre contre le Terrorisme
•    Le totalitarisme et l’impunité et leur rôle dans l’absence de l’Etat et le chaos dans la région
Ouvrant les débats, Monsieur Mohamed Abba OULD SIDI OULD JEILANY a souhaité la bienvenue aux panelistes et aux invités au nom du Sénateur Philip KALTENBACH empêché et au nom de Sahel Expertise et Conseil.
Il a souligné que Sahel Ec a voulu organiser ce colloque pour permettre aux experts composant le panel de partager avec les invités leurs opinions et expériences et d’échanger avec l’assistance sur la problématique libyenne.
Il a en outre exprimé son souhait de voir les travaux du colloque aboutir à des recommandations pertinentes aux acteurs libyens régionaux et internationaux.  Avant de présenter les membres du panel et de décliner le programme du colloque et passer la parole au Président du Colloque Mohamed OULD RZEIZIM.

 

De Serval à Barkhane

 

Mohamed OULD RZEIZIM a, à l’entame de son mot d’ouverture, exprimé ses remerciements à Sahel-Ec pour l’avoir invité au Colloque, au Sénateur Philip KALTENBACH pour leur avoir permis de tenir ce colloque dans ce prestigieux temple du pouvoir qu’est la salle Monnerville du palais du Luxembourg et au public qui a bien voulu honorer le panel par sa présence.
Mohamed OULD RZEIZIM a invité le premier paneliste Mohamed El-Hassen OULD LEBATT spécialiste des questions sécuritaires et consultant de Sahel-Ec.
Prenant la parole Mohamed El-Hassen OULD LEBATT a, après avoir brièvement décrit la réalité libyenne avant et pendant la crise, mis en relief les répercussions de cette crise sur le Sahel notamment le Mali ou des groupes terroristes avaient, à la chute du régime de Kadhafi, occupé le nord du Mali et installé leurs bases arrières et menacé le Sahel.
Ould LEBATT affirme que cela qui a justifié l’opération Serval qui est devenue l’opération BARKHANE. C’est à partir de ce moment que la France s’est engagée militairement au Sahel avec l’autorisation du gouvernement du Mali.
Ould LEBATT a précisé que les acteurs de la crise libyenne avaient pensé à tuer Kadhafi mais ils n’ont pas pensé au peuple libyen.

 

Un pays décomposé

 

Le second Intervenant est Peer de JONG Président de l’Association d’Amitié France-Mauritanie THEMIIS membre du panel. Peer DE JONG a déclaré que la Libye est pays en décomposé. Ce pays a deux gouvernements, plusieurs milices qui ont des rôles importants à jouer. La Libye évolue dans un environnement régional composé de Pays instables (Tchad avec son opposition armée, le Soudan avec la rébellion au Darfour, le Niger avec Aqmi et BOKO HARAM, le Mali avec la contestation du nord). La décomposition de l’Etat libyen, qui jadis était gouverné par un autocrate, a contribué à l’accentuation de l’instabilité de la région.   Sarkozy a donné l’ordre  aux avions français de frapper la Libye et ce fut 

sa plus grande erreur. Cette erreur a engendré le désastre libyen et occasionné une catastrophe humanitaire.

Reprenant la parole en tant d’intervenant Mohamed OULD RZEIZIM a, après avoir décliné la feuille de route africaine de sortie, précisé que l’Union Africaine n’a cessé de prévenir des conséquences incommensurables qui pourront en découler et recommander de les éviter, par la mise en œuvre de la feuille de route africaine qui constitue une solution politique inclusive.
Pour OULD RZEIZIM, les parties Libyennes étaient sur le point de s’y accorder grâce aux efforts du Comité ad hoc, n’eut été l’intervention des parties extérieures, qui voulaient à tout prix, régler leur compte avec KHADDAFI, par son élimination. Parmi ceux-ci, il y avait certes des pays Arabes, mais aussi et surtout des Européens.
Il rajoute que l’Accord donné par KHADDAFI à toutes les dispositions contenues dans la feuille de route et sa disponibilité de s’écarter du pouvoir, jusqu’à la fin du processus, n’ont pas empêché les émissaires de certains pays, d’intervenir ostensiblement auprès du CNT, pour refuser l’offre que son Président avait acceptée, à l’issue des négociations qu’il avait eues avec le Comité ad hoc à BENGHAZI.

 

Ingérences étrangères 

 

Le quatrième intervenant au colloque fut Éric Blanchot, président de PROMEDIATION, une ONG française spécialisée dans la médiation au Sahel et qui intervient en Libye depuis 2014-2015.  Pour lui, « c’est assez compliqué et difficile de mesurer la réalité de  l’implication des pays comme le Qatar, les Émirats Arabes Unis ou l’Arabie Saoudite dans une crise comme la crise libyenne. Le Rapport des nations unies sur l’embargo fait apparaitre que des véhicules blindés achetés par le Qatar et les Emirats arabes unies se retrouvent entre les mains des belligérants en Libye. L'Egypte et le Soudan agissent et interagissent sur la Libye bien avant la crise. Depuis 2011, les voisins sont inquiets de l’installation en Libye d’un gouvernement «non souhaité ».
Des personnalités libyennes se sont rendues aux Emirats arabes pour négocier des soutiens manipulant et instrumentalisant la compétition entre le Qatar et les Emirats arabes Unies.
Le Qatar et les Emirats Arabes Unis se sont engagés l’année dernière à Paris de ne plus interférer dans le conflit libyen. Engagement que les deux pays n’ont pas tenu. »
Le cinquième intervenant était Paul KANANURA, Président de l’Institut Mandela. Pour KANANURA, « la Libye vit un désastre que l’Occident a contribué à produire. Le prétexte invoqué par l’Occident pour provoquer des changements de régime est le droit d’ingérence afin d’instaurer la démocratie ou de protéger les populations civiles. Cela a entraîné des conséquences catastrophiques en Libye, où nous assistons au chaos et l’Etat faillit.
Pour préparer cette guerre, on a pu jouer dans les opinions désinformées sur les sentiments compassionnels qu’avaient éveillés les masses tunisiennes et égyptiennes soulevées contre la pauvreté, l’indignité nationale et la dictature.
Aujourd’hui, le monde se réorganise à grande vitesse et stratégiquement. La Russie de Poutine, ne voulant pas mourir après le coma Eltsine, s’affirme diplomatiquement, politiquement et militairement sur la scène internationale. La doctrine Trump de considérer l’intérêt national américain avant celui des autres pays, impulse la restructuration du Monde concrétisée par la baisse significative de dotations budgétaires des Nations Unies et des ONG de promotion de la démocratie».

 
Problèmes ethniques 

Le Sixième intervenant MINNI ARKOU MINAWI, Président du Mouvement armé de libération du Soudan a déclaré que : « Tout le continent africain, sans exception, est confronté à des problèmes ethniques parce que la structure sociale en Afrique est encore en phase de transition et n’est pas encore passée à une phase d'intégration sociale complète, en raison d'un certain nombre de facteurs, plus particulièrement le niveau bas de l'éducation dans les pays du continent. Ce qui a, à son tour, contribué à l’appui sur un mode de vie tribal ainsi que des moyens de subsistance traditionnels plus proches des divergences et de confrontation, en particulier dans le domaine des activités agricoles et pastorales.
La situation libyenne est certes différente de celle du Soudan, mais le régime de Khartoum est resté un acteur majeur de la crise libyenne, à travers la fourniture d’éléments terroristes pour le combat en Libye. Le régime soudanais a effectivement la haute main dans la formation et la gestion des éléments d’organisations islamistes en Libye. La présence de ces éléments dans le conflit a conduit à l'état de chaos total dans la plupart des endroits contrôlés par ces groupes. Chaque citoyen libyen fuyant l'enfer, a payé le prix fort ; des phénomènes sinistres sont apparus et se sont propagés, en raison du chaos sécuritaire en Libye, chez le peuple du Darfour qui vient en Libye qui sert de point de transit vers l'Europe. »
 

 
Réalités libyennes 

Zahra Mansour, Universitaire Libyenne et membre du panel, a, à l’entame de son intervention, dit qu’elle aurait souhaité la présence de libyens de l’intérieur de de la Libye pour vous présenter les réalités libyennes vues de l’intérieur, mais les problèmes de visas les ont empêchés, bien que les organisateurs avaient adressé des invitations.
Pour DR ZOUHRA, c’est bien cet empêchement des libyens de l’intérieur qui l'amène à parler en leur place. Elle a déclaré que la Libye a été victime d’un complot ayant pour but la spoliation des richesses libyennes et africaines par l’Europe des gouvernants ; considérant quel’Europe ne veut pas que les peuples africains vivent en démocratie, en paix et bénéficient de leurs richesses.
Zahra Mansour a confirmé que les africains cherchent une démocratie qui leur convienne, respectant leurs coutumes et traditions mais pas la démocratie imposée par l’occident et qui a transformé la Libye en milices.
La Libye a vécu depuis 2011 une situation catastrophique. Des milliers de libyens ont péri. Tués par le bombardement de l’aviation française avant la résolution des nations unies.  A la mort de MOUAMAR KADHAFI, l’armada a disparu du ciel de la Libye. Comme si le seul objectif qu’elle avait n’était que l’élimination physique de KADHAFI.  Le peuple libyen a été tué par ceux qui gouvernaient la Libye à l’époque et ceux qui gouvernaient la Tunisie  par une campagne de presse menée par les chaines TV Aljazeera et Arabiya.

A participé à ce colloque, un public composé de diplomates, parlementaires, de chercheurs et de journalistes. A l’issue des débat il a été constaté que :
-    La première victime de la crise libyenne a été le droit international bafoué par l’ensemble des acteurs de la crise et principalement ceux qui avaient pour mission de le rétablir,
-    Les principales victimes sont le peuple libyen dans toutes ces composantes et les migrants traversant le territoire libyen, pour eux la crise a été un désastre,
-    Les pays du Sahel ont été la une victime collatérale puisque la tombée de l’arsenal de l’armée libyenne entre les mains des trafiquants d’armes et des groupes terroristes a contribué à accentuer les facteurs de déstabilisation de ces pays,
-    L’Europe par l’accueil de vagues de migrants qui échouent sur ses côtes paie un lourd tribut qui s’ajoute à la facture abyssale de sa guerre contre KADHAFI.