M. Youssouf Sylla, sénateur UDP de MBout, membre de la Majorité présidentielle: ‘’Il y a un problème au sein de l’UPR, né des déclarations du président selon lesquelles il se limite aux deux mandats prévus par la constitution’’

1 June, 2017 - 03:23

Le Calame : Quelle lecture vous faites des récentes  déclarations du premier ministre Hademine et du président de l’UPR, ould Maham  qui,  dans le cadre de la campagne du référendum sur les amendements constitutionnels, ont déclaré  que le régime actuel ne quittera pas le pouvoir en 2019, date de la prochaine présidentielle ? Que pensez-vous de cette précampagne  et les initiatives qui fleurissent  un peu partout ?

 

Youssouf Tidjane Sylla : Permettez-moi   d’abord de remercier le Calame pour l’occasion qu’il  m’offre  de m’exprimer dans ses colonnes. Je profite de cette occasion pour souhaiter  bon Ramadan, à la rédaction du journal et  à tous les mauritaniens.

Pour revenir à la question, à  mon avis les déclarations d’Ould Hademine et de Ould Maham ne peuvent pas mettre en cause celles du président de la République qui a clairement exprimé sa volonté de respecter l’article 28 de la Constitution qui stipule que le Président est rééligible une seule fois,  à moins qu’il  ne trouve  un autre article 38.

Il y a certes un problème au sein de l’UPR, né des déclarations du président selon lesquelles il se limite aux deux mandats prévus par la constitution et qu’il ne se présentera pas pour un troisième mandat.

La plupart des cadres et militants de l’UPR ont commencé  à renoncer au  parti , nous savons tous que la plupart des militants des partis au pouvoir soutiennent le Président au pouvoir et non le parti , c’est pourquoi Ould Hademine, Premier ministre et Ould Maham, président de l’UPR cherchent par tous les moyens à faire croire à leurs militants que le Président Aziz ne quittera pas le pouvoir en 2019  pour qu’ils acceptent de rester dans les rangs de l’UPR, sinon je ne doute pas de la volonté du Président de respecter ces engagements devant le peuple Mauritanien et la Communauté internationale .

Donc les initiatives qui fleurissent partout dans le pays rentrent dans le cadre de cette campagne qui vise à mobiliser les militants de l’UPR autour de leur parti.

 

-L’un de vos collègue, le sénateur Ould Ghadda qui a avait été arrêté  suite à un accident de circulation vient de lancer l’idée de commission d’enquête du Sénat sur l’attribution des marchés publics par le gré à gré, des contrats comme celui du nouvel aéroport de Nouakchott. Pensez-vous que celle commission pourrait voir le jour et partant faire son travail sans accrocs ?

-La commission d’enquête est conforme à l’esprit de l’article 72 du chapitre 5 de notre Constitution qui définit les relations entre l’exécutif et le législatif, le Gouvernement est tenu de donner toutes les explications nécessaires au Parlement.

D’autre part, un Gouvernement comme le nôtre qui lutte contrer la gabegie, la corruption et la pauvreté n’a certainement rien à craindre d’une commission d’enquête parlementaire.

 

Les  sénateurs  se sont  fortement mobilisés  pour  dénoncer  l’arrestation de leur homologue, ils ont même activé pour la première fois l’article 50 de la Constitution pour défendre son immunité. Qu’entendent-ils  faire  pendant  la campagne référendaire ?

-Son arrestation est une atteinte grave à l’esprit de l’article 50 de la constitution qui prévoit l’immunité parlementaire et je cite : aucun membre du parlement ne peut pendant la durée de session, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation de l’assemblée dont il fait partie sauf en cas de flagrant délit et un accident de circulation n’a jamais été considéré comme flagrant délit sauf pour le cas de l’honorable sénateur Mohamed Ould Ghadda.

Raison pour laquelle la chambre a fait usage pour la première fois de son histoire de l’article 50 pour imposer la libération immédiate de l’honorable sénateur.

Il est à noter que nous considérons que cette arrestation comme un précédent dangereux pour notre démocratie qui repose sur le droit avant toute autre chose.

 

-Dans la perspective de la présidentielle de 2019, le FNDU  vient de se lancer dans l’élaboration d’un programme commun de gouvernement et partant, un candidat unique à la présidentielle. Qu’en pensez-vous ?

De mon point de vue, le FNDU a le droit et même le devoir d’envisager toute démarche qui soit conforme à nos lois et règlements et qui peut lui permettre d’atteindre ces objectifs politiques. Reste que je suis mal placé pour donner des conseils ou des leçons aux partis constituant le FNDU, vu que je suis sénateur  membre d’un parti de la majorité présidentielle.

 

-Chaque fois qu’il rentre  d’une tournée de l’étranger,  le président d’IRA, Biram Dah Ould Abeid se heurte à des tracasseries  avec les forces de l’ordre et de sécurité. Ce fut le cas récemment quand il a voulu passer par le Guidimakha ; les autorités  administratives et les forces de sécurité se sont mobilisés pour l’empêcher d’entrer en contact avec les populations, les cadres de son mouvement, partis préparer son arrivée  ont même été  priés de quitter la région, comme les journalistes venu couvrir l’évènement.  Comprenez-vous pourquoi  cet homme que vous avez côtoyé agite tant le sommeil de nos gouvernants ?  De quoi a peur ou redoute le  gouvernement ?

 

-Concernant votre dernière question, Biram Dah Abeid est Président d’une organisation reconnue par les Nations Unies et par toute la Communauté internationale, je vois mal le refus de la Mauritanie de reconnaître cette Organisation qui milite pour les droits de l’homme.

Je suis moi-même  chargé de missions politiques à IRA Mauritanie et mon message est clair, l’article 10 de la Constitution garantit  à tous les citoyens les libertés publiques et individuelles qui sont la liberté de circuler et de s’établir dans toutes les parties du territoire de la République, la liberté d’entrer et de sortir du territoire national, la liberté d’opinion ou de pensée, la liberté d’expression, la liberté de réunion, la liberté d’association entre autres et l’Etat Mauritanien refuse de respecter pratiquement toutes les libertés prévues par la Constitution .

  

J’ai un message à tous nos citoyens et à  nos partenaires de la communauté internationale : IRA Mauritanie est une organisation anti-esclavagiste qui milite pour  le respect des Droits de l’Homme, nous sommes contre la violence sous toutes ses formes  et nous n’avons aucun problème avec nos frères de la composante Maure.

Nous avons comme impression que l’Etat cherche par tous les moyens à créer des divergences inexistantes entre les composantes de notre pays (diviser pour régner) alors qu’il n’ya aucun problème entre ces populations qui s’aiment, se respectent  et vivent ensemble depuis des millénaires.

Mais nous restons ouverts à toutes  démarches visant l’enracinement de la paix, de la concorde et de la fraternité sous la seule condition du  respect de nos  droits fondamentaux.

Propos recueillis par DL