Autour d'un thé

30 March, 2017 - 01:14

Le hors-sujet, c’est très peu recommandé. Même si les Mauritaniens lui ont trouvé au moins une excellente vertu. Vous savez, l’homme ne vit pas seulement de pain. Et, dans la vie, il n’y a pas que la politique. Le million de poètes qui composaient, avant, notre pays, ne comptez surtout pas sur eux pour se développer. De qui sont ces provocantes paroles ? Allez savoir… Pas de moi, en tout cas. Nous sommes, aujourd’hui, le pays des deux millions à trois millions de politiques. Nous sommes, aussi, celui des deux à trois millions d’érudits. Nous sommes, en plus, le pays des deux à trois millions de fils de martyrs tombés au champ d’honneur de la résistance contre les colons. Nous sommes, encore, le pays des deux millions et plus de spécialistes en droit constitutionnel. Nous sommes, enfin, le pays des deux millions ou trois de moi-savoir-tout. Mais ce n’est pas en déclamant, à tout va, des vers kilométriques en arabe ou en récitant, à tue-tête, des « tavelwitt » à faire pleurer les dunes, oueds ou lointaines contrées désertes du Tagant ou de l’Iguidi, que les prix des denrées de première nécessité vont diminuer ou que le pays va avancer. Bon, soit, pas de hors sujet ! Nous sommes dans la conférence de presse du Président. Et pour longtemps encore. C’est quoi, trente-trois contre quatre millions d’habitants ? Il faut être mathématiquement logique. Etre Président, c’est quelque chose. La démonstration par l’absurde, ça existe, en maths ! Cent vingt-et-un, là-bas, contre trente-trois, ici, regardez-vous vous-mêmes : si celui qui parle est fou, celui qui entend se doit d’être raisonnable. En arabe : vision et rêve peuvent se confondre dans la tête de Président-fondateur. Surtout s’il est un peu fâché contre une partie de lui-même. Allah ! Protège-moi de mes amis, mes ennemis, je m’en charge !  Moi, je suis « Le » Président. Le Chef. Le Constitutionnaliste. Le Calculateur. Qui sait faire des opérations et des manœuvres. Normal, puisqu’après tout, opération et manœuvre sont, d’abord, des concepts militaires. Et ce n’est pas, non plus, à un vieux singe qu’on apprend à faire des grimaces. Quand même ! Démission et échec ne sont pas français. Y a que les faibles qui y recourent. C’est quand on n’a plus là où aller qu’on démissionne, quand on n’a rien compris qu’on échoue, Moi, je suis Moi. Ego ergo sum. Cogito pas nécessaire, sinon chouïa. Je sais qu’avant d’aller aussi loin que l’article quatre-vingt-dix-neuf, cent ou cent-un, il faut, d’abord, s’arrêter à l’article trente-huit. C’est une affaire de logique et de bon sens. C’est comme à la boutique : un produit coûte trente-huit ; un autre, quatre-vingt-dix-neuf ; je prends, évidemment, celui à trente-huit. Surtout quand c’est la même chose. Le même effet. Le même résultat. Vous voulez dépenser l’argent ? Vous voulez fatiguer le peuple ? Allez-y, on ne montre pas à un fou comment jeter les pierres. Moi, je suis un homme fort. France, wakhyert ! Mais, attention, qu’elle ne me parle pas de mes affaires ! Touche pas à ma nationalité (pardon) à ma souveraineté et à mon indépendance ! Les Nations Unies, les Européens, wakhyert ! Sont venus me féliciter pour avoir exfiltré mon ami Jammeh, avec armes, bagages et biens mal acquis de la Gambie. Ni la France ni les autres ne peuvent me dire que le sucre est « sucré », ni où je suis  allé passer mes dernières vacances, ni pourquoi Madame mon épouse était à la conférence de presse, pour s’interposer (hazzazze) entre mon ex et mon actuel Premier ministre. Tous deux (soit dit en passant, du Charg et donc) capables d’exploser à tout instant. Avant d’aller voir leurs vaches. Une première dame peut jouer le rôle de pompier, l’espace d’une conférence de presse. La pauvre presse : HHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHahaaaaaaaaaaaaaaaaaa ! Les journalistes ? Pauvres d’eux ! C’est combien qu’on leur donne ? Débrouillez-vous avec. Vous êtes des entreprises. Haaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah ! Bon, attendez le gaz : comme ça, l’Etat va vous gazéifier, pour se débarrasser de vous une fois pour toutes. Machiavel ne disait-il pas que les hommes politiques ont le droit de mentir, oui, mais avec « crédibilité ». Salut.

Sneiba El Kory