Autour d'un thé

8 December, 2016 - 00:45

Qui n’« hypocrise » pas ne plaît pas. Mais ça, c’est trop, a dit le singe, en se regardant un jour dans un miroir. Trop de quoi ? De beauté ou de vilénie ? Moi, je ne sais pas. C’est, en tout cas, un singe. De là à dire s’il est beau ou vilain… Ça dépend de qui il est. Où il est né. Il est fils de qui. Il a quoi. Il est qui. C’est comme ça, ce n’est pas de maintenant que l’hypocrisie a commencé. C’est depuis longtemps. C’est un moyen pour plaire. Si les montagnes de l’Adrar et ses palmeraies pouvaient bouger, elles s’aligneraient sur ces goudrons, tes goudrons, tes beaux goudrons que jamais, oh jamais personne avant toi, n’a eu ni le courage, ni l’idée, ni le génie de construire. Oh que tu es beau ! Que tu es joli. Que tu es adorable, monsieur du Corbeau ! Flatteur, jambon : il faut que les gens vivent. Et puis, l’Adrar, c’est pas loin du Tagant. Wallah et Allah m’est témoin : ya que toi, Seyid Raïs, qui peut nous gouverner, nous prendre, nous diriger, nous éclairer, nous apprendre à marcher, à manger, à boire, à danser, à nager, à sauter. Ya que toi qui donne l’espoir, qui donne la vie, qui prémunit contre les catastrophes les vents et les pluies. C’est toi le rempart, c’est toi le refuge, c’est toi l’idéal. Surtout que tu as été un militaire. Par les temps, pas maintenant. Y a que les militaires dont on a besoin. C’est le symbole de la force, de la droiture, du courage. Moi, je ne veux rien. Je n’ai envie de rien. J’ai juste besoin de toi, Seyid Raïs. Tu connais la vérité, madame, allez, dis la vérité. C’est partout en Mauritanie que les hommes quittent les femmes. Ce n’est pas qu’en Adrar. Les hommes partent, l’hypocrisie reste. N’est pas applaudisseur chevronné qui veut. Il a fallu beaucoup d’intelligence, à celui qui eut l’outrecuidance, à celui qui a réfléchi à offrir, à un certain président, tout un Coran, présenté comme un modeste présent. Ou à cet autre qui lui dit qu’il était, désormais, rassuré sur le sort du pays, après avoir vu de ses yeux, de ses propres prunelles, l’inestimable don d’Allah qu’était son fils. Ce n’est rien de « frapper » son boubou par terre, pour un président, et de lui dire qu’on est prêt à croquer les pierres qu’il nous donnerait. Wallahi, Monsieur Président si toi pas présenté mandat après mandat, moi suicidé ! Ou moi emmener toi prison. Alors, gens du Trarza, vous savez maintenant à quoi vous en tenir. Vous avez tout pour remporter l’une des trois médailles nationales de l’hypocrisie. Vous avez tout pour cela. Une longue expérience. Un fleuve que vous pouvez boire pour plaire au Président. Vous avez R’kiz et Ouad Naga. Le riz et les ognons pousseront sur les traces du Président. Le lit du fleuve reculera, pour laisser la place à son Excellence. La verdure verdira, entre le jour de son arrivée et celui de son départ. Jeûne collectif sans rupture, tant que son Excellence n’annoncera pas la bonne nouvelle. Les arbres de toutes les forêts, les engrais de toutes les coopératives, les intrants agricoles de la SONADER, les magasins à moitié vides ou à moitié pleins, c’est selon la SONIMEX, les pirogues, les monnayeurs du FCFA, les talibés des gamous et autres Magal…tout ça pour rivaliser d’hypocrisie avec les autres. Aucune femme ne prendra la parole. Plus jamais ça. Jamais. La femme, c’est le foyer. Jamais plus que derrière chaque hypocrite, il y ait une grande femme. Surtout pas elle derrière les applaudisseurs. Allah fasse que le ciel pleuve ce jour-là. Comme ça, ce sera la Baraka, les signes annonciateurs de l’espoir, la preuve que ça va. Oui ça va même trop. Ça va, ça suffit ou ça va, ça continue. Ça va tout droit, vers n’importe quoi. Vers n’importe où. L’essentiel est de bien applaudir. Qui n’« hypocrise » pas ne plaît pas. C’est la devise des hommes, au sens genre du terme. C’est un monde de fous que celui de l’hypocrisie. Au point que la sagesse provienne de la bouche de qui vous savez. La célèbre Nana Tupac. Conseil aux gens du Trarza : surtout pas elle là-bas, chez vous. Réédition du scandale d’Atar. Encore une femme dangereuse. Une femme ennemie. De l’hypocrisie et de « l’applaudimétrie ». Salut.