Casting gouvernemental : Un grand parcours du combattant

21 August, 2014 - 12:31

La constitution d’un gouvernement  est, de l’avis des experts, un  parcours du combattant. Le premier des ministres chargé de le constituer  fait la course contre la montre pour être au rendez-vous que le président  lui a fixé.  Il doit consulter  les personnes ciblées et/ou désignées par le  même président  ou  d’autres  bouche-trous. Pourtant la  Mauritanie se veut un Etat moderne, un pays  sur la voie  d’émergence.  Résultat de cette situation: des gouvernements  à l’emporte-pièce, composé parfois de gens venus de nulle part. Et dans le meilleur des cas, des profils qui n’ont rien à avoir avec les départements qu’ils occupent. On n’a jamais vu un mauritanien refuser  un département ministériel parce qu’il n’a pas de compétences requises ou renvoyé, comme au Sénégal  parce qu’il n’a pas de qualification. C’est dire dans la majorité des cas, les cadres sollicités ne se soucient que du profit qu’ils peuvent, ou que leurs proches peuvent tirer  des postes  qui leur sont confiés. C’est la raison pour laquelle la Mauritanie, avec  près de 3 millions d’habitants  et  d’énormes ressources, peine à sortir de la pauvreté, en dépit des milliards injectés, on ne sait comment dans le monde rural. Et cette situation ne fait que perdurer.

Pourquoi cette situation ? Parce que tout simplement nos partis  politiques et  nos gouvernants  ne se sont pas acquittés de leurs missions, dans  le domaine crucial de  la gestion des ressources humaines. En effet, un Etat moderne doit  s’offrir les moyens  pour opérer des choix stratégiques. Les partis politiques, qui doivent servir de viviers  et donc  fournir les hommes  pour  assumer de hautes fonctions, ne disposent  d’aucune  banque des données sur leurs  ressources humaines, sur le profil de leurs militants. C’est d’ailleurs pourquoi, quand on leur demande de proposer des hommes pour un poste de responsabilités, ils peinent à dénicher la bonne graine et ce sont les facteurs subjectifs qui  dictent le choix.  Parce que les partis politiques sont plus soucieux,  hélas,  des voix  lors des élections que des compétences et des bons  profils  de leurs militants.

Mais parce qu’aussi l’Etat n’accorde presque pas  d’importance à la gestion des ressources humaines (Personnel).  Selon un ancien ministre, la présidence ne dispose d’aucune banque de données pour les hautes charges qu’il doit pourvoir.  Or,  pour un État moderne ou qui se voudrait comme tel,  cette  banque des données  doit être  le kit essentiel de son  président de la République et donc  de l’ensemble de son gouvernement  et des  décideurs. C’est dire que nos partis politiques et nos gouvernants seraient bien inspirés de connaître les hommes qu’ils peuvent proposer ou choisir pour  de  hautes responsabilités. L’avenir du pays en dépend fortement.

Vers la fin de son règne, le président Ould Taya avait commandité auprès d’un ancien directeur du budget  le recensement des  hauts cadres  de ce pays.  L’intéressé  avait concocté  une liste de 52 hauts cadres, ceci au bout de plusieurs semaines d’enquête et parfois d’entrevues. Un premier ministre et un gouverneur de la BCM sont sortis de cette liste. Cette  banque  des données,  qui devrait être actualisée régulièrement  et objectivement,  sert  de tableau de bord pour les présidents de la République et leurs  gouvernements. Aujourd’hui, cela ne semble pas être le cas, les nominations sont  plus surprenantes les unes que les autres. Celle du nouveau premier ministre  pourrait être classée dans cette logique. L’homme se contentera très certainement de « consulter » des hommes que le Palais aura tout  bonnement désignés, dans une moindre mesure, il se souviendra peut-être d’un cadre qu’il aura rencontré à l’ATTM, à la SAFA ou  au ministère qu’il vient de quitter.