Nouvelles d’ailleurs : Mes 50 ans...

20 August, 2014 - 09:27

J'ai 50 ans aujourd'hui. 50 ans. La bulle qui, symboliquement, représente un passage, une frontière franchie.

Désormais il y aura un avant 50 et un après 50 ans.

J'ai beau me dire que 50 ans ce ne sont que deux foutus chiffres, un 5 et 0, collés côté à côté, qu'ils ne signifient rien, ils existent ces 50 ans qui me sont tombés sur le coin de la figure.

Je me dis aussi que chez nous, les anniversaires et tout le tralala qui va avec ça ne signifie pas encore beaucoup, que ce sont des choses de toubabs, que c'est une mode dans notre bourgeoisie locale que d'acheter des gâteaux ( hors de prix à NKTT), de faire des cadeaux et de chanter « happy birthday » avec la mine joyeuse de gens pour qui ce jour / rappel est le plus beau jour de leur vie...

Bref, je me dis «  cool ma vieille, respire, sois zen... ».

Alors je « cool », je respire, je reste zen et même si ce n'est absolument pas vrai, faites comme si j'étais « cool », « respirante » et zen.

Me voilà donc au premier jour de ma nouvelle vie, au premier jour de mes cinquante ans. Il en reste 364 encore avant qu'un insolent 1 ne vienne remplacer le 0. Puis un 2, puis un 3, etc.... Et, à chaque date fatidique, le gong de fin que l'on entend un peu plus fort, de nouvelles rides, de nouveaux rhumatismes, de nouveaux bobos.....

Alors je m'accoude à ce premier jour de mes 50 ans et je jette un œil derrière moi, de l'autre côté de la barrière.

Et je me dis «  qu'as tu fait de tes 50 ans passés ? Qu'as tu fait de ta vie pendant toutes ces années ? »

Qu'est devenue la petite fille timide et introvertie, ballotée, aimée, apeurée ? Qu'est devenue cette petite fille à la coupe garçonne qui regarde un objectif photo avec un léger sourire ?

A-t-elle accompli ce à quoi elle rêvait ? Entre ce temps des innocences et la quinqua que je suis devenue, combien de chemins a-t-elle empruntés?

Il y eut beaucoup de choses, des milliers de choses... Des enfants, des rires, des larmes, des crises, des colères, des peurs, des bonheurs...

Il y eut des rejets, des amours, des petits trucs qui paraissaient sans importance et qui ont rendu ma vie meilleure ou pire.

Il y eut l'écriture, toujours là, présente, cette écriture qui m'a sauvée la vie dans les moments où je tapais contre les murs, enfermée dans une souffrance invivable.

L'écriture qui m'a fait vous rencontrer, semaine après semaine, cette écriture grâce à laquelle nous avons, vous et moi, lié des liens invisibles.

Il y eut mes garçons, cadeaux magnifiques, ces 2 hommes que j'ai portés dans mon ventre avec joie et gratitude.

Si je devais remercier ma vie, c'est bien pour ces hommes là, ces fils amour, ces fils tendresse, ces fils merveilleux.

Il y eut les départs de ceux que j'aimais, ceux dont j'ai le sang et la mémoire inscrits en moi. Je regarde derrière moi et je vois ces cimetières éparpillés de par le monde et où reposent des hommes et des femmes qui m'ont aimée, qui m'ont élevée, qui ont fait ce que je suis, grâce à leur amour.

Et, en particulier, cette femme extraordinaire, sans qui je ne serai rien, elle qui m'a faite femme, qui m'a faite moi, qui m'a tout appris, ma mère. Je l'ai couchée dans un cimetière du Sud de la France, auprès de ses parents, de son frère, de ses oncles et tantes.

Sa disparition, après des années de souffrances terribles, fut une vraie déchirure. Si je devais désigner un moment particulier où il y a eut un avant et un après, ce fut ce moment là de deuil et de larmes.

Il y eut mes combats, mes engagements, tout ce en quoi je crois. Je les ai menés comme je peux ; j'ai fait de mon mieux. Je me suis trompée parfois...mais je ne regrette rien.

Il y eut ma quête perpétuelle d'une identité qui me serait propre, moi la métisse multiple, fruit de cultures différentes. Cette quête n'est pas terminée. Si jamais elle devait se terminer un jour, ce dont je ne suis pas sûre......

Il y eut les gens dont j'ai croisé la route ; certains m'accompagnent encore, d'autres ont suivi leurs horizons.

Il y eut les larmes, les hauts et les bas, plus de bas que de hauts.

Et les pays rencontrés au gré de ses errances, les gens d'ailleurs qui m'ont ouvert leurs cœurs et leurs portes, qui m'ont offert à manger et à boire et leurs sourires.

Il y eut cette femme que je regarde derrière moi, qui a aimé comme elle vit, passionnément, intensément, qui a pleuré souvent, qui a pris des coups, qui s'est tenue, comme elle a pu, debout face au monde et à ses interrogations.

Cette femme qui fut moi et qui me regarde elle aussi, qui me fait un clin d'œil et un sourire et qui regarde le ciel et dit «  Elhamdoullillah, merci Mon Dieu ».

Cette femme là est la nouvelle cinquantenaire qui vous écrit.

Elle vit le premier jour de ses 50 ans...

Elle est libre......

Salut

Mariem mint DERWICH