Calamités…. Calamités…. Calamités…

11 February, 2016 - 00:40

La transparence dans la gestion des industries extractives est une bonne chose. Tout comme elle l’est dans la gestion des ressources halieutiques. Mais ce souci doit aussi prévaloir dans les ténébreuses affaires de drogue.

 

 

Les histoires de drogue se suivent et se ressemblent. Avec la dernière affaire autour de laquelle le gouvernement fait grand tapage, il est définitivement clair que la Mauritanie est devenue, depuis belle lurette, une plaque tournante de la criminalité transfrontalière : trafic de drogue, commerce illicite de toutes sortes de marchandises, connexions avec les réseaux terroristes et autre parrainage du banditisme inter-Etats. Depuis plus de dix ans, la Mauritanie regorge de cartels constitués essentiellement de groupes issus de milieux d’intouchables, endossés sur des personnalités influentes des différents systèmes qui se sont succédé, entre la fin des années 80 et aujourd’hui. Epoque où nombre de fortunes ont surgi, en temps record où la probabilité de blanchiments coupables laisse deviner d’obscurs parrains, tapis dans l’ombre. L’opacité qui entoure la gestion des dossiers liés aux affaires de drogue, les fortes pressions que subissent les autorités sécuritaires et judiciaires ayant en charge le traitement de ces dossiers et les hautes interférences qui vont jusqu’à accorder la grâce à des trafiquants accablés de preuves indéniables, prouvent, si besoin était, que des cercles très puissants sont impliqués, lourdement, dans ces incommodités qui rapportent gros. L’argent de la drogue se chiffre à des centaines de milliards. Il est blanchi via de somptueuses villas qui poussent, comme des champignons, dans tous les quartiers de Nouakchott et Nouadhibou. De luxueuses voitures dont le prix unitaire varie entre 28 à 30 millions appartiennent à d’anciens va-nus- pieds devenus du jour au lendemain, de richissimes hommes d’affaires aux activités douteuses,  petits transitaires, commissionnaires de terrains ou propriétaires de petits bureaux de change, autant d’alibis pour couvrir les véritables de beaucoup plus illicites opérations : parrainage de réseaux illégaux d’importation, distribution et vente de grandes quantités de drogue dans toute la sous- région. La transparence dans la gestion des industries extractives est une bonne chose. Tout comme elle l’est dans la gestion des ressources halieutiques. Mais ce souci doit aussi prévaloir dans les ténébreuses affaires de drogue. Une petite enquête, dans les banques primaires nationales, permettra de mesurer l’ampleur des dégâts, au constat des mouvements suspects d’argent, entre comptes de personnalités dont certaines n’avaient, il y a quelques deux ou trois ans, pas le moindre sou. Les nouvelles lois internationales imposent, à chacun, de justifier de la légalité de ses revenus. Les capitalisations made in paradis fiscaux et autres biens mal acquis qui défraient les chroniques, partout dans le Monde, constituent un rempart d’indélicatesses financières contre les biens publics et les politiques de lutte contre le blanchiment d’argent à provenance douteuse, notamment de la drogue ou du banditisme international. Le président Jacob Zuma n’est certainement pas le seul président au Monde à avoir balancé quinze millions d’euros pour la seule réfection de sa résidence personnelle. Le fait est aujourd’hui avéré, puisque Zuma a accepté de rembourser la moitié de l’argent indélicatement subtilisé des caisses publiques. En Afrique, la transparence, dans la gestion des choses publiques, pose problème. En Mauritanie, par exemple, les budgets des ministères, des cabinets, des assemblées populaires ou des grandes entreprises sont abandonnés à la discrétion d’ordonnateurs qui n’ont, généralement, de comptes à rendre à personne. Théoriquement, les  organes de contrôle de l’Etat sont là : Cour des comptes, Inspection Générale d’Etat, Inspection Générale des Finances, Autorité de régulation et autres organes de contrôle et d’inspection interne. Mais ce n’est certainement pas un hasard que les fonctionnaires de ces institutions se retrouvent, généralement, dans des situations particulièrement confortables : villas cossues, voitures dernier cri, comptes bancaires « respectables » et autres grandes faveurs. De là à savoir pourquoi… Travail bien fait ou pas du tout fait ? L’essentiel est que le budget national, qui a dépassé, cette année, les 475 milliards, se gère dans une opacité totale. Mais la normalité démocratique ne devrait-elle pas être, a contrario, que le peuple sache où est passé son argent ? L’argent des contribuables ne doit pas servir à enrichir les perfides. Surtout quand les conditions de vie des populations continuent à se dégrader de jour en jour. Et que le fossé, entre la grande masse des pauvres et la petite poignée de riches, se creuse, de jour en jour. Le peuple affamé se fout des conférences sur la transparence de ceci ou de cela. Les promesses sans lendemain ne lui disent plus rien. Les vœux pieux, les slogans pompeux et les déclarations d’intention ne le galvanisent plus. Ce n’est plus une question d’opposition ou de majorité. Ce n’est même plus une question de politique ou d’économie. C’est une question de survie. Tout simplement.

 

Sneïba El Kory