Mono-dialogue politique : Jusqu’où ira le pouvoir ?

8 October, 2015 - 01:16

Après la tenue, sans l’opposition, des journées préliminaires  de concertations sur le « dialogue » politique inclusif, le gouvernement a dépêché, à l’intérieur du pays, des missions de sensibilisation. Tous membres du gouvernement, ces représentants ont à charge d’expliquer, aux populations, la décision du gouvernement de tenir, début-Octobre, un « dialogue » national, afin de débattre des recommandations des journées de concertations. Et de s’efforcer à démontrer que le président de la République, en convoquant les Mauritaniens à débattre, entre eux, des problèmes de leurs pays, a pris une  « sage décision ». Les missionnaires exhortent donc les populations à soutenir l’initiative du président de la République, en vue de « trouver des  solutions » à tous ces problèmes. Or le pouvoir nous avait habitués à un discours selon lequel, au plan macroéconomique, voire économique tout court,  notre pays se portait très bien ; en somme,  tout « baignerait dans l’huile ». Tandis qu’au plan politique, l’opposition  fut toujours – et demeure – qualifiée d’« insignifiante ».  Allez comprendre !

Les missionnaires ont clamé, à tue-tête, que le dialogue se tiendrait, vaille que vaille – sans l’opposition, donc, puisque les deux pôles (FNDU et CUPAD) de celle-ci ont décidé de « bouder » le processus en gestation. Et de décocher flèche sur flèche, sur ceux-ci. Jusqu’où ira le gouvernement dans sa démarche quasiment « unilatérale » ? Que peut faire  l’opposition ? D’abord, pour contrer sa marginalisation ; puis contraindre, tant se faire que peut, le gouvernement à surseoir  à son agenda. La première interrogation en appelle immédiatement une autre : quel profit pourrait tirer le gouvernement d’un tel processus ? Certains observateurs croient savoir que le Raïs voudrait accréditer, aux yeux de l’opinion nationale mais, aussi, internationale, que c’est l’opposition mauritanienne qui refuse le  dialogue, pour donner l’impression que le pays est bloqué. De fait, Ould Abdel Aziz n’a cessé, depuis son arrivée au pouvoir, de se prétendre disposé au dialogue mais un dialogue « à pas forcés », pour ne pas dire « à sa botte », que l’opposition rejette, depuis celui de Dakar, en 2009. En quoi forcer à nouveau le pas serait-il profitable au pays ? En quoi les recommandations des journées de concertations sans l’opposition le feraient-elles avancer ? Qu’est-ce qui empêche le Président de gouverner, avec une majorité réputée si « confortable », depuis 2009 ? Quel profit, au plan diplomatique, le pouvoir pourrait-il tirer, dans un contexte où nombre d’élections en vue en Afrique se déroulent dans un climat tendu. S’y ajoute la tentative avortée de coup d’Etat, au Burkina, consécutive à l’entêtement d’un président en fin de mandat ? Quant à la France, quelle attitude adopter, à l’endroit de l’opposition mauritanienne ?

Ce qui est paraît quasiment certain, pour certains observateurs et l’opposition, c’est que le pouvoir prépare un « petit quelque chose » à l’endroit de 2019, terme officiel du second et dernier mandat de l’actuel président mauritanien, conformément à l’article 26 de la Constitution. Un petit quelque chose qui pourrait ressembler à une espèce de référendum permettant de faire changer celle-ci. Un pari risqué mais que plusieurs caciques du régime actuel n’hésiteraient pas à jouer. Sinon, que gagnerait Ould Abdel Aziz, en s’engageant dans une telle aventure ?  Pour d’autres, le forcing actuel pourrait présager d’autres négociations, au plan diplomatique, afin de préparer une sortie, par la grande porte, du président actuel, soldant, ainsi et, peut-être, définitivement,  le putsch de 2008…Attendons de voir. Le 10 octobre est dans quelques jours non ?

DL